“Jeux utiles", simulateurs et pédagogie active... à la découverte des nouveaux environnements d'apprentissage

Par - Le 01 avril 2011.

“Des jeux vidéo aux nouveaux environnements d'apprentissage", tel était le thème de la journée d'études organisée par le Fffod et l'Afpa à l'agora du Carrefour numérique de la Cité des sciences et de l'industrie, le 10 mars dernier.

S'il a été question de serious games, l'ambition était plutôt de relancer un certain enthousiasme créatif, en prenant le temps d'explorer le potentiel des systèmes d'interaction homme-machine pour la formation, commente Jacques Naymark vice-président du Fffod (Forum français pour la formation ouverte et à distance) et directeur de projets technologies d'apprentissage à l'Afpa : “Tous les pionniers de l'innovation en formation s'en souviennent, c'est exactement ce qu'a fait voici trente ans Seymour Papert, en publiant «Jaillissement de l'esprit» [ 1 ]Jaillissement de l'esprit : ordinateurs et apprentissage. Flammarion, Atelier du Père Castor, 1981, 298 p. . Après l'EAO, la FOAD et le e-learning, l'approche multimodale, nous sommes probablement à la fin d'un cycle."

Et nous passerions actuellement d'une réflexion sur les dispositifs de formation à une autre, tournée vers la notion d'“environnements numériques d'apprentissage". Accessibilité grand public des systèmes interactifs (Wii [ 2 ]Console de jeu du fabricant japonais Nintendo., Kinect [ 3 ]Réponse de Microsoft à Nintendo., etc.), évolution des approches pédagogiques, nécessité de réduire les coûts d'accès à la formation dans un contexte de croissance des besoins... “Il existe aujourd'hui un contexte culturel, technologique, économique et démographique favorable à ce recentrage".

Stéphane Natkin, titulaire de la chaire Systèmes multimédia au Cnam et directeur de l'École nationale du jeu et des médias interactifs numériques, a rappelé les cinq objectifs d'un “jeu utile" : “Apprendre, analyser, sensibiliser, comprendre, convaincre." Mais comment créer un système d'apprentissage qui tienne compte des “trois types de difficultés (perceptive, logique et physique)", alors que “personne ne sait mesurer les relations entre les courbes d'apprentissage et de difficulté" ? Et quid de la qualité d'un jeu, de son objectif d'utilité, alors que son concept même repose sur un objectif gratuit, sans conséquence sur la vie réelle ? “Il nous faudrait à la fois une mesure de la qualité et une mesure d'utilité, qui montrent que ces deux objectifs ne sont pas trop contradictoires" - ce, alors que “dès que vous demandez une prise de distance pour théoriser, ce n'est plus du jeu", sourit Stéphane Natkin.

Faut-il en conclure que “plus vous amènerez le joueur à jouer, moins il apprendra" ? Tel est bien le type de question qu'il faudra résoudre pour pallier l'absence de progrès en matière de méthodes pédagogiques, en dépit des évolutions technologiques.

Voir ici nos articles sur l'intervention de Jean Vanderspelden et sur les simulateurs.

“JEU SERAI", UTILE POUR L'ORIENTATION

Lauréat du volet numérique du plan de relance dans la catégorie “Logiciel innovant", dédié à l'apprentissage, la formation, l'entraînement, la sensibilisation, la communication, et/ou à l'éducation, Jeu Serai est “un jeu pour choisir son avenir", explique Stéphane Natkin. En tempérant aussitôt : “C'est une aide au processus d'orientation, surtout pas un conseiller virtuel d'orientation en 3D. (…) C'est un travail de recherche qui n'est pas simple et nous ne sommes pas certains que cela va fonctionner. L'objectif est d'arriver à obtenir, au moins, le même niveau d'évaluation qu'avec les méthodes classiques."

Pour les porteurs du projet, “l'idée est d'utiliser les mécanismes fondamentaux du jeu vidéo (exploration, défi, récompense, apprentissage) pour évaluer les centres d'intérêt et de motivation de l'utilisateur, ainsi que la façon dont il réalise ses choix afin de l'aider dans sa démarche individuelle d'orientation". S'appuyant sur les critères du modèle de Holland et du modèle d'Harren, Jeu Serai devrait être disponible en version Web en fin d'année.

Partenaires : Cnam, Wizarbox, Seaside Agency, l'Arcnam Poitou-Charentes et l'Université Paris Ouest La Défense.

QU'EST-CE QU'UN “JEU UTILE" ?

Selon Stéphane Natkin, un “jeu utile", notion qu'il préfère à celle de “serious game", est “un système dynamique formel", dont “le comportement, délimité par des règles, produit des conséquences variables et ayant des effets quantifiables". Le joueur doit avoir la sensation que son comportement influence de façon contrôlée le comportement du jeu. Il doit être émotionnellement attaché aux résultats. Mais le “jeu utile" est associé à un objectif défini, et il doit être possible de mesurer l'utilité d'usage de ce jeu par rapport à cet objectif.

Notes   [ + ]

1. Jaillissement de l'esprit : ordinateurs et apprentissage. Flammarion, Atelier du Père Castor, 1981, 298 p.
2. Console de jeu du fabricant japonais Nintendo.
3. Réponse de Microsoft à Nintendo.