Michel

Marchand

Quel avenir pour le réseau en ce début d'année 2008 ?

Michel Marchand, délégué du Regroupement national des APP, et Maurice Monoky, président de l'Apapp (Association de préfiguration de l'animation nationale pour le développement de l'activité du réseau des APP), répondent à nos questions.

Par - Le 13 août 2009.

Inffo Flash - Quelle sont les grands enjeux au calendrier 2008 ?

Michel Marchand - Nous sommes encore dans l'incertitude sur la question des financements. Les DRTEFP sont en attente des arbitrages nationaux, mais nous savons devoir faire face à trois cas de figure : stabilité dans la plupart des régions, baisse de 10 à 15 % dans d'autres, jusqu'à moins 30 à 50 % en Nord-Pas-de-Calais.

Les grands enjeux de l'année 2008 sont ceux d'une année de transition. Dans la mesure où l'État souhaite recentrer son action sur les dispositifs centrés sur l'emploi, nous savons qu'il ne reconduira pas à l'identique le financement des Ateliers de pédagogie personnalisée en 2009.
Maurice Monoky - Le Comité national d'orientation et de suivi (Cnos)[ 1 ] Voir l'article “Les APP organisent leur Comité national d'orientation et de suivi", in Inffo Flash n° 714, daté du 16 au 31 décembre 2007, p. 7. , que nous souhaiterions installer au Sénat fin mars, aura justement pour mission de préparer 2009, et notamment de vérifier l'adhésion du réseau APP au projet porté. D'où l'importance de la campagne d'abonnement que nous venons de lancer, avec un appel à cotisation porté à 500 euros afin de pouvoir poursuivre l'animation nationale .

IF - Quel bilan tirez-vous de la démarche nationale de confirmation du label ?

Michel Marchand - À de rares exceptions, l'ensemble du réseau est labellisé ou le sera d'ici à avril 2008. Pour autant, il n'est pas sûr que cela ne soit pas un “marché de dupes" si l'État, porteur historique, venait à confirmer son désengagement financier. Que vaudra le label si le financeur national se retire, c'est une question primordiale pour l'avenir du réseau. On peut craindre une évolution comparable à ce qui s'est passé pour les Centres interinstitutionnels de bilans de compétences (CIBC), que l'ANPE a transformés en prestation après que l'État se soit désengagé.

IF - Quelle traçabilité de l'activité APP en 2008 suite au désengagement financier de l'État qui finançait l'outil de suivi statistique ?

Maurice Monoky - Le site web et le suivi statistique représentent l'unique vitrine nationale du réseau. Cette remontée mensuelle de l'activité des APP qui fournit des données quantitatives précises est précieuse pour la communication du réseau. Le Cnos va donc essayer de maintenir cet outil statistique.

IF - Quelles sont les chances de survie de la spécificité APP si la dimension nationale venait à disparaître ?

Maurice Monoky - Il est évident que nous nous battons pour qu'elle ne disparaisse pas. La dimension nationale n'est pas de l'ordre de la symbolique, elle sous-tend la survie du réseau et de certaines de ses actions, à l'instar du dispositif APP-Entreprises qui repose sur une contractualisation nationale entre le réseau et les entreprises. Néanmoins, l'interrégional est une porte de sortie que le Cnos aura à cœur de travailler, notamment en liaison avec des représentants de l'ARF (Association des Régions de France).

IF - Une délégation de l'Apapp a été reçue au ministère des Finances le 10 décembre dernier. Quel était l'objet de cette rencontre, et qu'en avez-vous retiré ?

Michel Marchand - Il s'agissait d'obtenir des garanties sur l'avenir du réseau et nous sommes sans nouvelles à ce jour des suites données à cet entretien, qui s'est par ailleurs déroulé dans un climat d'écoute [ 2 ]Contacté par Inffo Flash, Hugues de Balathier, conseiller de Christine Lagarde en charge du dossier APP, indique avoir demandé à ses services une nouvelle expertise pour évaluer les conséquences des orientations prises concernant les APP.
.

IF - État, Régions, collectivités locales, etc., quel serait l'interlocuteur idéal des APP ?

Michel Marchand - C'est un problème de gouvernance interinstitutionnelle. Il faut bien comprendre que c'est la somme des initiatives prises par les différents financeurs qui permet à chacun de bénéficier du maillage territorial. Le désengagement national se fait au détriment de toutes les politiques d'ancrage territorial, pas seulement de celles de l'État. On peut craindre de voir progressivement des plages d'ouverture se restreindre et des antennes supprimées. Le maintien du financement partenarial est indispensable si l'on veut la survie du maillage territorial du réseau. Il faut promouvoir une gouvernance interinstitutionnelle, y compris avec les Opca.

IF - Comment résumer la position des Conseils régionaux vis-à-vis des APP ?

Michel Marchand - Environ un tiers des Conseils régionaux précède l'État dans le soutien accordé aux APP, un tiers abonde les financements de l'État et un tiers développe d'autres dispositifs.

IF - Quel est selon vous le principal problème des APP ?

Michel Marchand - Le réseau a vingt ans. Cela lui confère à la fois une expertise et, aux yeux de certains, une image de “dinosaure". Il faudrait que de la même manière que le réseau a su surfé sur la vague technologique, en passant du minitel à internet, il sache s'adapter à la nouvelle donne de la formation, de plus en plus régie par les lois du marché et une logique d'appels d'offres. Il lui faut certainement apprendre à se vendre. Le problème vient aussi du fait que face à des politiques de l'État qui se recentrent sur l'emploi, l'offre des APP n'apparaît pas immédiatement opérationnelle à certains. Mais c'est justement ce positionnement transverse qui fait la valeur des APP. Tout le monde convient d'ailleurs que c'est important, mais personne ne veut financer le long terme. Il revient donc aux APP de faire en sorte que l'offre soit adaptée aux besoins du marché et que l'ingénierie financière soit respectueuse du service à la population.

IF - Les principaux points forts ?

Michel Marchand - La territorialité, qui repose sur la gouvernance interinstitutionnelle ; la dimension partenariale, qui risque d'être mise à mal par le passage à une logique d'appels d'offres en 2009 ; et l'autoformation accompagnée, que l'on ne rencontre d'ailleurs pas beaucoup dans d'autres dispositifs.

IF - Le label APP est-il suffisamment connu des prescripteurs ?

Michel Marchand - La principale difficulté provient du fort taux de turn-over que l'on rencontre dans les ANPE et les Missions locales. Il revient aux coordonateurs d'APP de veiller à maintenir
le suivi de la relation. Soulignons toutefois que 50 % du public APP est attiré par le “bouche-à-oreille".

IF - La bonne réception du dispositif APP-Entreprises [ 3 ]Voir l'article “Lancement réussi d'APP-Entreprises", in Inffo Flash n° 707, daté du 1er au 15 septembre 2007, p.24 vous incite-t-elle à chercher à développer l'activité du réseau en direction des entreprises ? Pourquoi ?

Maurice Monoky - Il y a trois enjeux majeurs. Premièrement, faire valoir le rôle des APP dans l'accès à la formation en entreprise des personnes à bas niveaux de qualification ; deuxièmement, ne pas oublier que si les prévisions gouvernementales d'un retour au plein emploi dans les prochaines années se confirment, le besoin de formation en entreprise de ces publics à bas niveau de qualification n'est
pas près de se tarir ; et, enfin, aller chercher l'argent de la formation là où il se trouve.

IF - Le rapport sénatorial sur la réforme de la formation professionnelle, comme le rapport Lambert sur les relations État-collectivités locales, conclut au nécessaire renforcement de la régionalisation. Qu'en pensez-vous ?

Maurice Monoky - À moins de requalifier la mission des APP sur la dimension de l'accès à l'emploi, ce qui n'est pas leur rôle, il est de plus en plus évident que
la régionalisation est la seule porte de sortie.
Michel Marchand - L'essentiel est de parvenir à décentraliser tout en conservant l'égalité territoriale et une équité de traitement pour la population.

Notes   [ + ]

1. Voir l'article “Les APP organisent leur Comité national d'orientation et de suivi", in Inffo Flash n° 714, daté du 16 au 31 décembre 2007, p. 7.
2. Contacté par Inffo Flash, Hugues de Balathier, conseiller de Christine Lagarde en charge du dossier APP, indique avoir demandé à ses services une nouvelle expertise pour évaluer les conséquences des orientations prises concernant les APP.
3. Voir l'article “Lancement réussi d'APP-Entreprises", in Inffo Flash n° 707, daté du 1er au 15 septembre 2007, p.24