Identifier les causes des décrochages en CFA (Céreq)

Le Céreq (Centre d'études et de recherches sur les métiers et les qualifications) vient de publier les conclusions d'une enquête sur le décrochage des jeunes en formation, comparant la situation en lycées professionnels et en centres de formation d'apprentis. Une enquête qui permet de différencier deux conceptions du décrochage, et d'identifier les leviers de prévention selon les voies de formation.

Par - Le 30 août 2019.

« La prévention du décrochage occupe une place importante dans l'enseignement professionnel, lui-même fonctionnant comme une filière de “raccrochage" pour de nombreux collégiens en difficultés scolaires », rappelle le Céreq (Bref n° 180, août 2019). Les CFA et les lycées professionnels n'ont pas affaire aux mêmes types de ruptures de parcours. L'étude a notamment porté sur le CFA interprofessionnel des quartiers Nord de Marseille (450 apprentis), et sur le CFA Marseille (CFA de branche situé dans une technopole de la ville de Marseille, 139 apprentis).

L'indicateur-clé : la résiliations du contrat de travail

En CFA, la question du décrochage apparaît avec les résiliations de contrats de travail. Les actions de prévention privilégient de ce fait les relations avec les entreprises. L'enquête montre que les équipes de formateurs des CFA n'utilisent pas la notion de décrochage, sauf lorsque le contrat d'apprentissage est résilié « sans suite », c'est-à-dire sans conclusion d'un nouveau contrat. Les actions de prévention conduites par les CFA concernent donc le suivi de ces résiliations, spécialité par spécialité.

Ce suivi permet d'identifier les causes des résiliations, « d'abord liées à la qualité des relations entre apprentis et employeurs, et au décalage qui peut exister entre les conditions réelles du travail en entreprise et les représentations que s'en faisait le jeune a priori », souligne le Céreq. Un décalage qui explique les ruptures précoces, souvent en période d'essai. Il est aggravé dans les secteurs d'activité marqués par un déficit d'attractivité et de mauvaises conditions d'emploi.

Un autre indicateur : la non-obtention du diplôme

Au-delà de cette approche par les résiliations de contrat, une autre conception, minoritaire, s'intéresse aux apprentis qui n'obtiennent pas le diplôme préparé. Dans le CFA interprofessionnel par exemple, les taux de réussite sont très élevés, sauf dans certaines spécialités pour lesquelles « le travail peut concurrencer la formation, certains employeurs cédant à la tentation, en cours de cursus, d'embaucher à temps plein un apprenti qu'ils souhaitent fidéliser. Ici la certification est sacrifiée à la conclusion immédiate d'un contrat de travail ordinaire. »

Dans les deux filières de formation, le décrochage fait l'objet d'une réflexion collective qui guide les actions de prévention, mais tous les membres des communautés éducatives n'y participent pas à parts égales. Dans les lycées professionnels, la réflexion se construit dans le cadre des groupes de prévention du décrochage scolaire (GPDS). Dans les CFA, elle est engagée à la fois par la direction à travers sa stratégie managériale, et par la Région et/ou les branches professionnelles, « dans le cadre des référentiels de qualité qu'elles promeuvent ».

Des actions préventives

Dans les CFA, les « développeurs » (en charge du démarchage des employeurs en vue de conclure des contrats d'apprentissage) « sont en première ligne », souligne le Céreq. Leur action préventive, alimentée par les visites d'entreprises et les données relatives aux résiliations, débouche sur le repérage d'entreprises susceptibles de concentrer davantage de ruptures contractuelles afin d'éviter d'y envoyer les jeunes.

« L'action préventive peut être facilitée par l'inscription du CFA dans un espace sectoriel », observe le Céreq. Ainsi, le CFA de branche bénéficie des ressources des instances professionnelles. Celles-ci peuvent être de nature financière (aides aux apprentis en matière de transport et de logement), mais aussi d'ordre relationnel (telle une coopération d'acteurs partenaires sur le territoire, qui favorise la coordination avec les employeurs). Ou encore « cognitif » : outils de liaison avec les maîtres d'apprentissage, mutualisation d'expériences relatives à la formation en situation de travail, statistiques comparatives sur les résiliations permettant à chaque établissement de se situer régulièrement dans son espace sectoriel de référence.

À l'inverse, le CFA interprofessionnel enquêté se trouve relativement isolé et soumis à la concurrence d'« autres dispositifs de formation, moins coûteux pour l'employeur qu'un contrat d'apprentissage, comme les stages diplômants financés par la Région ».