Les points clés de la réforme, analysés par Bertrand Martinot
Par Centre Inffo - Le 01 mars 2010.
Le délégué général à l'emploi et à la formation professionnelle, Bertrand Martinot, est revenu sur les points saillants de la réforme lors de son allocution de clôture de la 11e UHFP. Il a détaillé les principales innovations de l'Ani et de la loi.
Le FPSPP
D'abord, le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) revêt “deux caractères, il est paritaire et s'occupe de sécurisation des parcours professionnels, a exposé en préambule Bertrand Martinot. Le gouvernement n'a voulu en aucune manière remettre en cause la gestion paritaire des fonds de la formation professionnelle. D'ailleurs, la loi renvoie aux partenaires sociaux le principe d'affectation des fonds, ce que confirme l'accord-cadre du 12 janvier 2010". Si le FPSPP cible les salariés les moins outillés, dont les parcours professionnels ont été les plus chaotiques, il faut au préalable “abattre un certain nombre de cloisons et sortir de la logique de statut", a plaidé Bertrand Martinot. La création de Pôle emploi “va dans ce sens, il n'y a plus de différence entre le chômeur indemnisé et le chômeur non indemnisé".
Autre “cloison à abattre", “la faculté à sortir d'un secteur en difficulté, et, pour ceux qui ont retrouvé un emploi, à acquérir de nouvelles compétences". 37 % des chômeurs ayant trouvé un emploi ont retrouvé une qualification. “L'effort doit être mis sur les salariés qui ont des compétences obsolètes. Un salarié et un demandeur d'emploi, ce n'est pas la même chose, mais il n'y pas de différence fondamentale". À cet égard, l'accord-cadre du 12 janvier 2010, signé par les partenaires sociaux, “a fixé des objectifs très ambitieux : 500 000 salariés sous-qualifiés, plus 200 000 demandeurs d'emploi" formés en 2010 grâce aux financements du nouveau Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels.
L'optimisation des circuits de financement
Deuxième point fort de la loi, “l'optimisation des circuits de financement : davantage de transparence, de rigueur. Le système doit être asymétrique, des plus grandes vers les plus petites entreprises. Il ne faut pas que le financement des petites entreprises aille vers les plus grandes", a insisté Bertrand Martinot.
Le salarié “acteur de sa formation"
Troisième point : le concept du salarié “acteur de sa formation". Dans cette perspective, il s'agit d'“adapter l'offre de formation aux individus concrets. Il se trouve que dans le fonctionnement du marché du travail, même s'il y a une solidarité au sein de la branche, de l'entreprise, les parcours sont de plus en plus individualisés, a fait remarquer le délégué. Beaucoup a été fait pour stimuler les politiques de branche, rapprocher les achats de formation aux besoins réels, les Assedic y ont beaucoup travaillé, puis Pôle emploi ; le travail a été fait en grande partie, mais il reste des marges de progrès en termes d'individualisation des parcours", a poursuivi Bertrand Martinot. De ce point de vue, “la loi donne de nouveaux outils, assouplit les outils existants" : l'utilisation du Dif après la rupture du contrat de travail, le Cif hors temps de travail. Des outils à la main des partenaires sociaux", a rappelé le DGEFP.
Le pilotage
Quatrième élément-clé de la réforme : “Se doter d'instruments de pilotage, mettre de la cohérence" dans un système de formation professionnelle piloté par trois “donneurs d'ordre" : les partenaires sociaux, les Régions et l'État. Le délégué a défendu le rôle de ce dernier, “beaucoup montré du doigt, accusé d'impérialisme et de vouloir recentraliser la formation professionnelle". Or, certaines “politiques nationales dépassent les acteurs, les sujets liés à la stratégie de Lisbonne, ou la cohésion sociale, l'État ne peut être absent du jeu" ; sans oublier “la dimension régalienne : l'État écrit les textes, a rappelé le DGEFP. L'État intervient aussi pour des questions d'égalité de traitement entre les citoyens. Par exemple, l'État sait impulser, mettre les acteurs autour de la table. Ce n'est pas l'État qui fait tout, mais c'est lui qui rend les choses possibles."
Mais il ne cherche pas à se substituer aux partenaires sociaux et aux Régions. “Ces trois acteurs se parlent dans le respect des prérogatives de chacun. Entre la jungle et le Gosplan, il y a la place pour l'intelligence collective", a assuré le délégué.
Une stratégie coordonnée
Cinquième et dernier élément de la réforme, “tout ce qui relève d'une stratégie coordonnée de la formation professionnelle", aux antipodes de l'actuel “éparpillement" du système. “Ce n'est pas au citoyen de porter le poids de la complexité technico-administrative. De ce point de vue, le dossier avance bien", a rassuré Bertrand Martinot.
Enfin, il s'est félicité que le portail Orientation & Formation, dont le Centre Inffo est maître d'œuvre, soit financé par l'intermédiaire du FPSPP, conformément à l'accord du 12 janvier 2010.
LES INTERROGATIONS SUR LA REFORME
Nombreux questionnements dans les trois ateliers de l'Université consacrés à la réforme. Première interrogation : quand s'appliquera-t-elle ? La loi annonce 32 décrets. Parmi-eux, dix ont déjà été publiés. Le reste le sera d'ici la fin mars, a affirmé Bertrand Martinot, délégué général à l'emploi et à la formation professionnelle.
“Sur le fond, les échanges ont porté notamment sur la portabilité du Dif et son mode de fonctionnement, constate Jean-Philippe Cépède, responsable de la direction juridique-observatoire du Centre Inffo. Ainsi, il a été précisé que celle-ci ne pouvait fonctionner que si la personne inscrite à Pôle emploi bénéficiait des allocations d'aide au retour à l'emploi. La portabilité est donc exclue pour le salarié qui démissionne soit pour s'inscrire en tant que demandeur d'emploi, soit pour intégrer une nouvelle entreprise. Toutefois, la démission dite “légitime" donne droit aux allocations chômage.
De même, le rôle du Fonds paritaire sur la sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) a fait l'objet de débats. “Il est considéré comme l'outil du décloisonnement", précise Paul de Vaublanc, chargé d'études juridiques au Centre Inffo. En effet, bien que ses ressources proviennent des entreprises, il pourra financer une partie de la formation des demandeurs d'emploi via la préparation opérationnelle à l'emploi (POE) qui se calque sur l'action de formation préalable au recrutement (AFPR).
Enfin, les échanges ont aussi porté sur le renforcement du niveau national dans le domaine de la formation professionnelle. Ainsi, ont été évoqués les conventions d'objectifs et de moyens entre l'État et les Opca, la convention cadre prévu entre l'État et le FPSPP et la contractualisation du PRDFP avec le préfet de région et cela, à compter du 1er juin 2011.