GPRH : les collectivités territoriales en quête de bonnes pratiques
Par Monique Chatard - Le 16 février 2012.
Au nombre de 1,9 million, “les agents territoriaux représentent un tiers de l'effectif total des trois fonctions publiques et 9 % de la population active française", souligne la Cour des comptes en introduction de son “observation" publiée dans le rapport public annuel 2012 présenté le 8 février. Justifiant ainsi la nécessité de s'intéresser à la gestion prévisionnelle des ressources humaines (GPRH), la Cour relève de nombreux manquements aux fondamentaux de la gestion des emplois et des compétences, mais semble prendre acte des perturbations engendrées par la décentralisation et l'instabilité du cadre légal. D'où une forme de vadémécum des bonnes pratiques.
Ainsi, la GPRH fait l'objet d'une réelle attention du département de la Moselle, qui s'est lancée dès 1995 dans le processus, en trois étapes : diagnostic de l'existant, analyse prospective et mise en œuvre de mesures d'accompagnement. De même pour la ville de Lyon, qui bénéficiait déjà d'un “plan de gestion, des activités, des emplois et des compétences" et qui s'est engagée dans une “démarche plus approfondie" en 2009, avec l'inscription de la GPEC dans le cadre plus général du projet “Émeraude" d'administration de l'ensemble de la commune. Reposant sur des objectifs stratégiques clairement définis, la démarche suit trois étapes similaires à l'exemple mosellan et s'appuie sur un comité de pilotage stratégique, un comité de pilotage opérationnel, un groupe projet associant responsables RH et informatiques, ainsi qu'une une équipe ressource d'animation et de soutien méthodologique. Et la Cour de noter que “la fixation d'orientations claires et d'un calendrier réaliste, la bonne connaissance initiale de l'existant, la détermination d'objectifs mesurables, la diffusion de la démarche dans les directions et l'association de tous les acteurs ont constitué autant
d'éléments essentiels à la mise en œuvre d'une gestion prévisionnelle".
Autre exemple avec la mutualisation des moyens, voie insuffisamment explorée alors que les bonnes pratiques existent : “À la fin 2009, le Département du Var a ainsi lancé l'idée d'une mutualisation d'un certain nombre de fonctions supports entre plusieurs collectivités opérant sur son territoire", relève la Cour, qui souligne par ailleurs que les nouvelles possibilités légales et réglementaires de mutualisation, principalement entre communes et EPCI [Établissements publics de coopération intercommunale,[/footnote] “offrent à cet égard, des opportunités intéressantes". La question de la mutualisation est aussi abordée sous l'angle des “aides externes", qu'il s'agisse des centres départementaux de gestion des personnels de la fonction publique territoriale ou du CNFPT. “Inégal", selon la Cour des comptes, leur apport est cependant particulièrement apprécié, montrant là un besoin d'accompagnement patent. Bonne pratique également, l'activité du CIG (Centre interdépartemental de gestion) des Départements de la petite couronne en Île-de-France, qui “se distingue", précise le rapport, par ses nombreux outils méthodologiques en matière de GPRH, autant de “publications riches, utiles pour toute collectivité française et disponibles sur son [site internet.
Livrant treize recommandations en conclusion de son chapitre GPRH dans les collectivités territoriales, la Cour des comptes invite à la fois à définir de véritables stratégies, à développer l'approche métiers et compétences et à individualiser les carrières, le tout pour répondre à “un contexte institutionnel et démographique mouvant et à un contexte financier contraint".
Plans de formation
Relevant que la Cour souligne que “beaucoup de collectivités n'ont pas élaboré de plan de formation, malgré l'obligation fixée par la loi du 12 juillet 1984, réitérée par la loi du 19 février 2007", le président du Centre de la fonction publique territoriale confirme pour sa part que “moins de 10 % des collectivités respectent l'obligation de transmission du plan de formation à leur délégation régionale du CNFPT". À la décharge des 90 % de collectivités qui s'affranchissent du cadre légal, le plan de formation semble, à de rares exceptions, étranger à toute stratégie prévisionnelle lorsqu'il existe : “Beaucoup de plans consistent en une simple addition des demandes individuelles sans définition d'objectifs ni mise en cohérence avec les projets et les besoins réels de la collectivité et de chaque service", relève la Cour : “Trop de plans de formation ne constituent pas des outils managériaux, mais plutôt des catalogues à la disposition des personnels, qui effectuent librement leur choix. En général, ils restent organisés par type de formation (techniques, management, bureautique, examens et concours, par exemple) et non par nature de formation, par métier ou par projet." Ici comme ailleurs, les contre-exemples existent et le font savoir, à l'instar du président du Conseil général du Nord qui revendique un véritable plan de formation, préparé entre autres au cours des entretiens professionnels, et abondé chaque année par des “parcours de sensibilisation à la fonction de cadre pour les agents ayant pour projet de devenir manager".