L'Afpa fait face au “bilan critique" de la Cour des comptes

Par - Le 01 février 2014.

Hervé Estampes, directeur général
de l'Afpa (Association nationale
pour la formation professionnelle
des adultes), était auditionné par le
Sénat le 21 janvier [ 1 ]Yves Barou, président de l'Afpa, était
excusé.
. Annie David,
présidente de la commission des
affaires sociales, a donné la parole à
Anne Froment-Meurice, présidente de
la 5e chambre de la Cour des comptes,
saisie au premier semestre 2013 par
les présidents des commissions des
finances et des affaires sociales, suite
à la nette détérioration de la situation
de l'Afpa fin 2012, et à la démission
du président et du directeur général.

Situation encore très
fragile


La Cour des comptes a travaillé avec
quatre axes d'analyse : l'organisation
et la gouvernance de l'Afpa ; sa
mission de formation des demandeurs
d'emploi ; la gestion de l'association
et sa situation financière ; et la
problématique immobilière. Constat
d'Anne Froment-Meurice : si, depuis
2005, l'Afpa a perdu son statut
d'opérateur de l'État, “son statut
et sa gouvernance restent marqués
par une forte présence de l'État. (...)
Elle est désormais soumise au droit
de la concurrence, mais a tardé à se
conformer au nouveau cadre concurrentiel."
L'association a perdu 24 %
de ses stagiaires entre 2007 et 2012.

,Pour ce qui est des chômeurs, la
présidente de la 5e chambre a noté
que l'Afpa “est un opérateur de
référence", déplorant toutefois “des
critiques formulées par les stagiaires"
et des absences fréquentes de
formateurs. Côté financement, Anne
Froment-Meurice a indiqué que la
situation financière et économique
de l'Afpa reste très fragile et a noté
“une perte probable" de 35 millions
d'euros en 2013. Enfin, l'État a prévu
de transférer son patrimoine sous
forme de baux emphytéotiques mais
des “désaccords" existent à ce sujet
entre l'Afpa et France Domaines.

Or, ces baux sont prévus comme
garanties bancaires.
Face à ce “bilan critique", la Cour
formule douze recommandations que
l'on peut regrouper en trois sousparties
: elle appelle l'État à clarifier
sa stratégie vis-à-vis de l'Afpa ; elle
préconise d'adapter l'organisation
des stages, qu'il n'y ait plus qu'un
formateur par formation et qu'il puisse
y avoir des analyses de marché.
Enfin, elle souligne la nécessité de
poursuivre les négociations sur le
maillage territorial.

“Pas besoin de
financements
complémentaires"


En réponse, le directeur général de
l'Afpa a évoqué une année 2013 au
cours de laquelle il a fallu refinancer
la structure (pour moitié par l'État,
pour le reste par les banques) mais
aussi apaiser le climat social et
“rénover notre offre qui était datée".
Il a insisté sur la réduction d'effectifs
(360 équivalents temps plein) et a
annoncé que si cette année, la perte
s'élèverait sans doute à 30 millions
d'euros, 2014 verrait “un retour à un
excédent brut d'exploitation de deux
ou trois millions d'euros".

Le directeur général a également
présenté trois axes stratégiques. Le
premier : une formation “à rayonnement
national", et non pas seulement
des dispositifs régionaux. Il a insisté
sur “l'insuffisance de commandes
publiques de la part des Régions" et
précisé que l'Afpa essayait de “sensibiliser
le législateur". Il a ensuite noté
que sur le “marché" des demandeurs
d'emploi, l'Afpa était potentiellement
en concurrence avec 58 000 organismes
de formation. Si la qualité de
ses formations est reconnue, puisque
les statistiques indiquent que 68 %
des demandeurs d'emploi formés par
l'Afpa retrouvent un emploi dans les six
mois, Hervé Estampes a mis en garde
sur les coûts : “Une formation low cost
ne vous amène nulle part !" Enfin sur le
volet de l'immobilier, il a indiqué que la
meilleure solution serait que ces biens
entrent dans le domaine privé de l'État.

Une “politique du titre"

Dernière personnalité à être auditionnée,
Christophe Strassel, adjoint
à la déléguée générale à l'emploi
et à la formation professionnelle
(DGEFP), a reconnu que le passage
d'opérateur à association mise en
concurrence avec les autres centres
de formation n'avait “pas été facile".
Il a néanmoins insisté sur les atouts
de l'Afpa : une “politique du titre"
qui justifie une subvention de l'État
de 75 millions d'euros ; l'expertise
dans la formation des demandeurs
d'emploi. Le représentant de la
DGEFP a souligné que la participation
de l'État en fonds propres était de
200 millions d'euros entre 2013 et
2015 avec 120 millions déjà versés.

“Pour 2014, le chiffre d'affaires
devra être en ligne avec ce qui a été
défini", a-t-il insisté. Il a également
indiqué que l'État soutenait les baux
emphytéotiques.

“La mise en concurrence
nous a laminés"


Après cet exposé, les sénateurs
ont pris la parole pour obtenir des
précisions, notamment sur la perte
de 30 millions d'euros pour 2013
et surtout sur le paradoxe entre le
statut d'ex-opérateur de l'État mais
qui conserve un rôle d'organisme
de formation tout à fait particulier.
“Le dialogue avec les Régions s'est
renoué qualitativement et quantitativement
(…) C'est la mise en
concurrence qui nous a fait mal, qui
nous a laminés", a répondu Hervé
Estampes.

Quant au problème de l'immobilier,
la réforme de la formation
professionnelle devrait être source
de discussions qui passionneront
députés et sénateurs. “Je souhaite
que l'Afpa puisse vivre encore
longtemps", a conclu Annie David,
avant d'indiquer que la commission
des affaires sociales ne s'y opposant
pas, le rapport de la Cour des comptes
et l'intégralité des débats du jour
seraient rapidement mis à la disposition
du public.

Notes   [ + ]

1. Yves Barou, président de l'Afpa, était
excusé.