Un “Ebay de la formation open source" peut devenir une réalité

Onglet “Achat de formation" − Clic ! − Pop-up “Ajouter au panier ?" − Clic ! − “Payer cet objet avec PayPal" − Clic ! − “Merci. Votre achat de quatre heures de formation a bien été enregistré. Un message de confirmation vous attend dans votre boîte mail." Science-fiction ? Aujourd'hui, oui. Mais demain ? L'e-consommation de formation en ligne pourrait-elle devenir aussi banale que l'est, actuellement, l'achat de produits d'occasion sur Ebay ? Chez Alter Way, opérateur de service spécialisé dans l'informatique open source (PHP, MySQL, Android, Linux, Open Cloud, etc.), on s'y prépare.

À cet effet, l'OF a ouvert, le 27 mars dernier, un nouveau site web dédié à la formation (“Alter Way – Le centre de formation", en toute simplicité) qui, s'il ne permet pas, pour l'instant, l'achat en ligne, constitue une première étape vers le développement d'un e-commerce dédié à la formation. Et si cette PME parisienne (dont l'activité principale demeure avant tout la conception de logiciels) mise autant sur cette “formation 3.0", c'est parce qu'en matière de formation informatique, elle a, de son expérience, compris que dans leur immense majorité, les principaux demandeurs de formations techniques ultra-pointues n'étaient pas les services RH, mais les informaticiens eux-mêmes.

“Quand vous vendez de l'expertise, il faut la montrer !"

Statistiquement, les probabilités qu'un responsable formation ou qu'un conseiller Pôle emploi prononce un jour spontanément la phrase suivante : “Tiens, et si j'intégrais au catalogue l'achat de modules consacrés à la gestion du framework IaaS de cloud-computing non Pythoniste dans une approche DevOps ?" demeurent assez faibles. “Qui est réellement notre client ? L'analyste programmeur, qui sait avoir besoin de cette compétence, ou son responsable RH ?", interroge Jonathan Le Lous, responsable de l'offre innovation chez Alter Way. “Techniquement, c'est le second qui achète, mais concrètement, c'est le premier qui en aura l'initiative." C'est cette double réalité qui a conduit l'entreprise à développer son nouveau site (“conçu 100 % open cloud !") dont le principe premier est de montrer à l'écran toutes les technologies dont il vend les apprentissages. “Quand vous vendez de l'expertise, il faut la montrer !", estime Jonathan Le Lous. Mais puisque les formés ne sont pas les acheteurs (sauf dans le cas où ceux-ci aient pris l'habitude de consulter leur DSI sur le plan de formation), l'entreprise a développé une stratégie marketing “classique" (promotions sur certaines formations en fonction du calendrier, hot-line informative et commerciale, suivi de contact, etc.) destinée à convaincre les décisionnaires d'achats. “Dans le domaine de la formation, nous sommes des commerçants. Nous adaptons donc nos techniques de vente à cette réalité."

Des outils en évolution constante

Voilà pour les acheteurs “de référence" (agents de Pôle emploi, responsables formation d'entreprise ou d'Opca), mais, outre la vitrine internet, comment Alter Way procède-t-elle pour séduire les programmeurs susceptibles d'être conquis par les formations proposées ? “Notre stratégie marketing de réseau consiste, comme souvent dans le commerce, à offrir gratuitement du savoir et des contenus avant de les orienter vers nos services payants", explique le responsable de l'innovation.

Une communication mercatique pour laquelle celui qui est, depuis 2004, un membre actif des communautés d'utilisateurs des logiciels libres. Communautés souvent associatives, mais aussi liées à des fondations et des think tanks (Afup - Association française des utilisateurs de PHP), Apache Software Foundation, Debian, April ^{[ 1 ]}Promouvoir et défendre le logiciel libre. www.debian.org, etc.) particulièrement présentes au travers de forums internet. “Les logiciels libres ont ceci de particulier qu'ils sont développés... librement, par des individus ou des groupes qui partagent leurs connaissances via le web. Ce sont des outils en évolution constante." Des internautes qu'Alter Way convie régulièrement à ses “meet-ups", des petits déjeuners informels où ces libres programmeurs peuvent échanger “IRL" ^{[ 2 ]}In the real life, “dans la vraie vie" (hors d'internet)..

La formation ne relève pas de l'achat compulsif

Cependant, demeure encore un écueil qui empêche, dans l'immédiat, Alter Way de proposer une formule e-commerce totale avec achat en ligne direct : “La formation reste un marché spécifique qui ne relève pas de l'achat compulsif façon Cdiscount." Le futur PriceMinister de la formation n'est donc pas à ce jour un projet viable. Ou pas complètement. “Le système d'achat par panier deviendra pertinent le jour où nous serons susceptibles de proposer du e-learning à l'achat en ligne", explique Jonathan Le Lous. Car, paradoxalement, le domaine le moins adapté à la vente par internet est précisément la formation numérique. “Les contenus e-learning deviennent rapidement obsolètes, sont remplacés par de nouveaux contenus très rapidement et un site qui en proposerait à la vente devrait donc être remis à jour dans des délais difficiles à tenir", regrette-t-il. “Le e-learning, ce n'est pas uniquement une plateforme Moodle avec quelques PDF à télécharger… mais nous travaillons, en ce moment, sur le développement de modules numériques de base, peu variants." Avec, comme challenge, le développement d'une technique d'update rapide des contenus. “Un tel outil de rich media totalement accessible
par le biais des technologies web, conçu en partenariat avec les Universités Paris II et III, est actuellement en projet". À quel horizon ? “Nous visons l'objectif 2014."

L'externalisation : des intermédiaires qui agissent sur le terrain du marketing

Une société d'externalisation de la formation a pour mission de “mettre en avant, à travers des procédés de marketing, le plan de formation ainsi que les offres proposées à l'entreprise dont elle gère les achats de formation", comme l'explique Jérôme Lesage, PDG de Place de la formation, qui accompagne des entreprises “dans l'optimisation des achats et de la gestion de la formation". Une de ses activités est effectivement de faire en sorte que l'entreprise acheteuse d'actions de formation puisse avoir une bonne lisibilité de l'offre avant de se décider. Car, rappelle-t-il, “il y a une richesse extrême, en termes de valeur, dans l'offre de formation aujourd'hui disponible. Encore faut-il que celle-ci soit plus lisible". C'est pourquoi il accompagne également des organismes de formation qui souhaitent “mettre des touches marketing à leurs offres. Certains d'entre
eux proposent d'excellentes prestations sans, malheureusement, savoir se vendre". En effet, “sur les quelque 53 000 prestataires de formation, une grande majorité ne disposent pas de moyens pour faire du marketing", observe Jérôme Lesage. Il conseille donc aux organismes de formation de “travailler leur marketing", et, le cas échéant, de s'appuyer sur les professionnels pour “développer leurs potentialités" et rendre leurs offres plus lisibles. Les organismes de formation doivent “sortir du bois et se mettre en avant afin de gagner des parts de marché", insiste-t-il.

Selon Jérôme Lesage, les cabinets d'externalisation n'ont pas vocation à accompagner les entreprises dans le marketing de la formation. Cependant, en tant qu'intermédiaires, ceux-ci redirigent certains de leurs clients vers des organismes spécialisés en marketing. C'est “une activité naissante" et les “petits et moyens organismes de formation ne sont ni suffisamment informés ni suffisamment sensibilisés" sur cet enjeu.