Une stratégie marketing-formation, “condition de survie" pour les OF

Par - Le 16 avril 2013.

“Marketing" et “formation". Pour certains, accoler ces deux termes a comme un goût d'oxymore, pour ne pas dire d'insanité. Pour d'autres, c'est désormais une réalité, un métier, certes encore nouveau, mais pertinent, puisque répondant à de réelles attentes du marché de la formation.
Le job de ces nouveaux professionnels de la mercatique RH ? “Aider à convaincre !", explique Myriam Keita-Brunet, fondatrice et codirigeante du cabinet Training Angel, l'une des premières agences françaises à s'être positionnée sur cette activité. “Aider les responsables formation à convaincre les salariés de l'intérêt qu'ils ont à se former, mais aussi les dirigeants du bien-fondé que représente l'investissement formation pour la stratégie de leur entreprise."

Questions de méthode

Et à ce jeu de la séduction (Stéphane Diebold, président du Garf n'hésite pas, pour sa part, à parler d'“érotisation de la formation"), il n'existe pas encore de méthode miracle et infaillible. “Chaque entreprise est unique, chacune évolue dans son propre environnement, chaque projet de développement nécessite sa stratégie adaptée", avoue ainsi cette ancienne élève de l'Escem de Tours.

S'il n'existe donc aucun modèle reproductible à l'envi, les anges de la formation agissent pourtant selon une méthodologie éprouvée, résumable en un acronyme : “AC-C-DE". “AC pour analyser et comprendre (l'écosystème de l'entreprise et les besoins en développement des compétences), C pour co-construire (un plan d'action marketing adapté), D pour déployer ledit plan et E pour évaluer les effets du plan au sein de l'écosystème", résume la fondatrice de l'agence-conseil. Une agence qui agit principalement auprès de grands groupes industriels, mais aussi d'organismes de formation ayant atteint une certaine taille critique.

“Savoir se différencier"

Apprendre aux OF à vendre de la formation ? L'idée peut sembler incongrue de prime abord, mais s'explique par la profusion de ceux-ci sur un marché français presque saturé (comme François Hollande lui-même le soulignait dans son discours de Blois du 4 mars dernier [ 1 ]L'Inffo n° 830, p. 2.). “Pour nombre d'OF, apprendre à vendre leurs
savoir-faire et à mettre en valeur leur offre auprès des responsables formation des entreprises est une question de survie !, juge Myriam Keita-Brunet. Dans un marché aussi concurrentiel que celui de la formation professionnelle, savoir cultiver ses spécificités permet de se différencier des autres." Justement, dans une telle configuration, Training Angel n'a-t-il jamais été amené à dispenser le même service à deux organismes directement concurrents ? “Le cas de deux organismes de formation en totale concurrence ne s'est jamais présenté, assure Muriel Janoir-Bessioud, associée au sein de l'agence. Les OF se différencient forcément par au moins une de leurs spécificités : nous les aidons à trouver lesquelles et à les promouvoir auprès du marché. Chacun est unique dans un écosystème collectif. À nous de les aider à trouver en quoi…"

Former de futurs concurrents ?

Paradoxe ou balle dans le pied ? Car qu'est-ce qui empêche un OF ayant recours aux conseils d'experts en marketing de la formation d'être tellement convaincu des bienfaits de cette activité qu'il choisisse, par la suite, de développer cette activité en interne ? Myriam Keita-Brunet estime plausible cette possibilité, mais plutôt que de la craindre, elle s'en réjouirait plutôt : “Il est évident que le marché se développe, commence à se structurer et que certains OF se positionnent désormais sur un marketing de la formation opérationnel, mais nous demeurons néanmoins assez peu sur ce terrain." Preuve, à ses yeux, de la viabilité de cette activité : “Si Training Angel restait seul là, oui, je m'inquiéterais !"

Les sirènes de l'externalisation

Quant à l'hypothèse de voir de grands groupes, à leur tour, étoffer leurs services RH en se dotant d'experts en marketing de la formation, cela ne l'angoisse guère plus. “Au contraire, ce serait une belle réalité ! Plus les entreprises développeront de l'expertise métier, plus elles la tireront vers le haut." En revanche, elle avoue ne pas prêter oreille aux
Cassandre qui perçoivent une tendance irréversible des entreprises à externaliser, voire sous-traiter leurs fonctions formation sous prétexte que la gestion du 0,9 % constituerait une obligation un peu pénible pour elles. “Je ne crois pas à une sous-traitance totale des budgets formation. Que les démarches administratives et logistiques connaissent une externalisation accrue et dévolue, par exemple, aux Opca, du fait de leurs nouvelles missions de conseil, c'est évident, mais les entreprises, elles, ont très bien compris la richesse de leur potentiel humain dans leur développement stratégique."

Benjamin d'Alguerre

“Inform'elles"

Pour Training Angel, le développement du business passe également par l'échange permanent autour des pratiques du marketing de la formation. A cette fin, Myriam Keita-Brunet a fondé en 2010 le club Inform'Elles, un réseau regroupant aujourd'hui plus de 130 responsables RH et responsables de formation. Sa particularité : le réseau se veut 100% féminin.

“À nos yeux, Inform'Elles constitue un laboratoire d'analyse des besoins et des attentes des professionnelles de la formation et du marché", explique la directrice de Training Angel. Un “laboratoire" qui organise, deux fois par mois, des “training lunches" qui sont autant d'occasions pour ces actrices de la formation d'échanger autour de leur métier.

Notes   [ + ]

1. L'Inffo n° 830, p. 2.