SYCFI - L'auto-entreprise, “danger économique" pour les formateurs indépendants ?

Par - Le 16 juin 2013.

Le Sycfi (Syndicat des consultants formateurs indépendants), dans une lettre ouverte à Jean-Marc Ayrault, diffusée le 3 juin, dénonce les “limites du modèle économique" de l'autoentrepreneuriat, accusé de mettre la profession en danger en pratiquant des tarifs sous-évalués. Ce n'est pas tant que Lionel Soubeyran, président du Sycfi [ 1 ]Le syndicat organise, via son site internet, une consultation des formateurs freelances en vue de rédiger des cahiers de propositions à transmettre aux pouvoirs publics dans le cadre de la réforme de la formation annoncée., soit braqué contre l'auto-entrepreneuriat, “au contraire, il s'agit d'un statut idéal pour quelqu'un qui souhaite démarrer dans la profession", mais plutôt qu'il redoute les préjudices que la pérennisation de ce statut au sein de la corporation qu'il représente fait courir pour les formateurs freelances dans un contexte économique déjà dégradé (voir L'Inffo n° 828, le dossier).

“La concurrence qu'ils font peser sur nous est déloyale"

La faute, notamment, aux faibles charges fiscales pesant sur les auto-entrepreneurs (20 %, et uniquement s'ils font des bénéfices) là où les autres indépendants − qu'ils exercent au titre du portage salarial, de l'EURL [ 2 ]Entreprise unipersonnelle à responsabilité
limitée.
ou de la SARL [ 3 ]Société à responsabilité limitée.– se voient taxés à hauteur de 40 % de leur activité. D'autant qu'avec un plafond de revenus fixé à 32 000 euros par an, la grande braderie des tarifs devient la norme pour les formateurs auto-entrepreneurs… souvent à la grande satisfaction des organismes de formation qui font appel à ces derniers en tant que sous-traitants. “Lorsque ces auto-entrepreneurs n'envisagent pas de développer une activité pérenne – dans le cas, par exemple, de cadres à la retraite qui exercent à ce titre pour compléter leur pension – la concurrence qu'ils font peser sur nous est déloyale", proteste Lionel Soubeyran. Mais aussi synonyme de précarisation pour ces formateurs low cost eux-mêmes, s'ils tirent l'essentiel de leur chiffre d'affaires de cette activité. “Avec un tel plafonnement de revenus, ils peuvent espérer, au maximum, un revenu de 800 ou 900 euros par mois, une fois leurs charges payées ! Comment peuvent-ils en vivre ?" Sans compter que, par ricochet, cette situation met également en danger le régime de retraite des indépendants, puisque l'arrivée depuis 2009 des auto-entrepreneurs sur le marché contribue à gonfler le nombre d'affiliés à la Cipav [ 4 ]Caisse interprofessionnelle de prévoyance
et d'assurance vieillesse.
quand bien même ces derniers cotiseraient peu, ou pas du tout.

Parrainer les autoentrepreneurs débutants

Pour autant, c'est en organisation syndicale – et non patronale, comme l'UPA – que le Sycfi interpelle le Premier ministre, en se proposant d'encadrer le régime de l'auto-entreprise dans le but de le pérenniser.“L'auto-entreprise a été conçue comme un tremplin pour
l'emploi visant à s'engager dans un projet de création et d'en tirer, à
terme, un revenu décent", explique le président du Sycfi, qui appelle à la création d'une “période transitoire" entre l'auto-entrepreneuriat et
un statut mieux adapté à une activité consolidée… et moins précaire.

À cet effet, le syndicat propose d'assister les auto-entrepreneurs dans leurs premiers pas par le biais d'une politique de parrainage, mais auss d'intégration dans le réseau professionnel
du Sycfi. “Ce débat aurait trouvé toute sa place au sein de la Commission nationale des professions libérales (CNAPL), théoriquement présidée par Pierre Moscovici, observe Lionel Soubeyran. Aussi, nous regrettons vivement que, depuis son entrée en fonction à Bercy, le ministre n'ait jamais convoqué cette instance." Cette absence de concertation en amont a entraîné la
rédaction de cette lettre ouverte au Premier ministre.

Avec, d'ores et déjà, un premier résultat tangible, puisqu'une délégation du Sycfi a été reçue le 10 juin rue de Grenelle, par Jérôme Giudicelli, conseiller du pôle formation professionnelle de Michel Sapin.

LE PLAN D'ACTION DE L'OCDE

L'organisation de coopération et de développement économiques
(OCDE) a mis au point un plan d'action pour les jeunes. Elle
recommande de développer les systèmes de “deuxième chance" et
insiste également sur l'efficience des formations en alternance.
“Les pays dotés de systèmes de formation en apprentissage
efficaces affichent un chômage des jeunes plus faible et des
niveaux de fréquentation plus élevés suggère qu'une formation
pratique en milieu professionnel permet d'intégrer divers
groupes de jeunes, en les encourageant à rester ou à se réinvestir
dans le système éducatif, et facilite la transition vers le monde
du travail".

Mais “des mécanismes efficaces d'assurance qualité sont
nécessaires pour garantir la qualité des formations en
apprentissage et autres dispositifs de formation en milieu
professionnel. Ces derniers doivent comprendre un système
national efficace de certifications basées sur les compétences,
afin d'identifier clairement les résultats sur les plans éducatif
et professionnel et de fournir des informations fiables et
accessibles, tant pour les étudiants que pour les employeurs,
dans les différents secteurs industriels et géographiques".

Notes   [ + ]

1. Le syndicat organise, via son site internet, une consultation des formateurs freelances en vue de rédiger des cahiers de propositions à transmettre aux pouvoirs publics dans le cadre de la réforme de la formation annoncée.
2. Entreprise unipersonnelle à responsabilité
limitée.
3. Société à responsabilité limitée.
4. Caisse interprofessionnelle de prévoyance
et d'assurance vieillesse.