L'expérience serait-elle au pragmatisme ce que le savoir serait à la rationalité ? La VAE semble le démontrer, tant ce dispositif est fondé sur la priorité donnée à la démonstration d'un savoir-faire empirique, d'une compétence acquise par sa mise en œuvre.
Il serait toutefois douteux d'opposer la connaissance et l'expérience. En effet, l'expérience acquise se transforme le plus souvent en connaissances nouvelles, en mobilise bien souvent d'autres, acquises antérieurement, pour s'avérer fructueuse. L'expérience part rarement du néant, elle s'appuie sur la maîtrise de savoirs fondamentaux – les mathématiques élémentaires, la maîtrise du langage, notamment – qui permettront les connexions vectrices de création de savoir-faire.
Fondée sur l'observation, sur l'analyse de situations, également sur la mise en œuvre d'actions dont l'auteur tire enseignements, l'expérience vaut par la répétition, celle-ci permettant l'exactitude progressivement acquise, l'accélération du mouvement qui donneront la performance diront certains, l'efficacité préféreront d'autres.
L'expérience rime encore avec l'accumulation de savoirs et de savoir-faire, de perceptions sensorielles, de situations maintes fois vécues qui permettent au final d'en réduire les risques. A l'exemple du marin qui découvre, apprivoise la mer au fil de ses sorties en bateau, pour finir par mieux la connaître, en comprendre le fonctionnement par la mobilisation de ses sens, et en déjouer ainsi les dangers.
Cette nécessaire accumulation permet de comprendre pourquoi l'expérience s'inscrit dans le temps long à l'échelle d'une vie humaine ; de façon contingente, pourquoi le dispositif de la VAE a longtemps reposé sur une durée d'expérience significative - 5 ans, 3 ans puis 1 an successivement exigés - garantissant l'effectivité d'une compétence maîtrisée. Que l'on ne s'y trompe d'ailleurs pas : la Réforme du 22 décembre 2022, si elle déporte la mesure de cette effectivité vers « l'Architecte Accompagnateur de Parcours » n'en supprime nullement la nécessité !
