Questions à David Targy, directeur d'études à Precepta

Par - Le 01 octobre 2009.

“La réforme va provoquer des redistributions entre les organismes de formation"

Comment se porte le marché privé de la formation en cette période de crise économique ?

Nous avons ressenti, lors de notre enquête, que la plupart des acteurs ont vécu une année 2009 moins bonne que les précédentes. La croissance devrait néanmoins être positive, car des facteurs exceptionnels de soutien de l'activité se sont mis en place. En premier lieu, nombre d'entreprises ont “utilisé" leur budget de formation pour occuper leurs effectifs au cours de périodes de sous-activité.

Par ailleurs, des actions de formation, souvent conjointement financées par les entreprises et les Régions, ont été mises en place dans le cadre des plans sociaux. Le contrecoup risque de peser sur la croissance 2010, d'autant que, d'après nos projections, le contexte économique restera déprimé.

À court terme, allons-nous assister à la disparition d'organismes ?

Il pourrait effectivement y avoir des disparitions, ou des structures mises en sommeil, faute de perspectives. Mais la situation saine et l'organisation souple de la plupart des entreprises leur permettent d'affronter une zone de turbulence. De façon générale, il n'y aura pas de cataclysme au niveau de ce secteur.

D'ici à 2015, doit-on s'attendre à des concentrations ?

Plusieurs facteurs peuvent expliquer la possibilité de concentration dans le secteur. D'abord, le facteur “pyramide des âges", avec le vieillissement d'employeurs qui, arrivant à l'âge de passer la main, pourraient rechercher des repreneurs en s'adossant aux grands groupes. Ensuite, l'introduction du e-learning réclamant d'énormes investissements, on peut s'attendre à des concentrations pour y répondre. D'ailleurs, beaucoup de fonds d'investissement manifestent actuellement un grand intérêt pour ce secteur attractif, qui offre de belles perspectives de marges.

Quel peut être, selon vous, l'impact de la prochaine réforme sur l'offre privée ?

Le projet de loi comporte beaucoup d'éléments positifs, mais aussi négatifs.

Ainsi, par exemple, la séparation des comptes au sein des Opca entre les
entreprises de moins et de plus 50 salariés peut avoir un effet ambivalent : soit il ouvre aux organismes de formation un vaste marché des TPE-PME, qui étaient jusqu'à présent très peu actives en matière de formation ; soit il provoque un effet de rétention, car les budgets n'étant plus mutualisés, les fonds risquent de ne pas être utilisés pour les actions de formation.

D'autre part, c'est une bonne chose que d'impliquer davantage les Opca dans l'accompagnement des entreprises, en leur donnant un rôle de “dynamisation" du marché par, notamment, l'incitation à la dépense des budgets de formation. _ Par ailleurs, la portabilité du Dif et la formation en dehors du temps de travail peuvent également favoriser la demande.

La volonté de réorienter les flux financiers vers les publics en difficulté, éternels perdants dans la distribution des budgets formation, constitue un retour de balancier plutôt positif au niveau social, mais aussi un moteur dans la redistribution entre les organismes de formation. Ceux dont l'offre cible particulièrement les cadres peuvent légitimement craindre cette orientation de la réforme : elle va générer sûrement une baisse de leurs recettes.