Rapport annuel de la Cour des comptes : pour une profonde révision du Dif et du Cif
La Cour des comptes a rendu public le 4 février son rapport annuel 2009, qui comporte un chapitre consacré aux “dispositifs de formation à l'initiative des salariés". La Cour juge que le Cif et le Dif n'atteignent pas leurs objectifs et sont onéreux. Elle formule six recommandations pour les réformer en profondeur.
Par Centre Inffo - Le 16 février 2009.
Dif et Cif “n'apportent qu'une contribution très incomplète à la correction des inégalités d'accès à la formation professionnelle continue et à la sécurisation des parcours professionnels, en raison notamment de leur absence de complémentarité, d'un faible nombre de bénéficiaires et de leur absence de ciblage sur les publics les plus fragiles. Pour autant, sur un plan financier, ils se révèlent, et tout particulièrement le Dif, particulièrement lourds".
C'est ce que constate la Cour des comptes, dans son dernier rapport annuel[ 1 ]Disponible sur le site www.ccomptes.fr, publié le 4 février. Les magistrats ont contrôlé différents organismes qui interviennent dans la gestion du Cif (Fongecif Île-de-France, Agecif-IEG pour EDF-GDF, et Fonds unique de péréquation).
La Cour des comptes formule six recommandations :
“recentrer sans délai et très fortement" le Dif, en “revenant sur le principe d'une ouverture généralisée qui creuse les inégalités de formation plus qu'elle ne les corrige", et en le réservant exclusivement aux seuls publics les plus fragiles, pour des formations permettant de sécuriser effectivement leurs parcours : salariés qui n'ont pas bénéficié d'une formation initiale débouchant sur une qualification, salariés de PME et TPE, seniors, etc. ;
dédier au financement du Dif ainsi recentré une fraction de la contribution acquittée au titre du Cif par les entreprises ;
“articuler étroitement" Cif et Dif selon une logique de “droit différé à la formation" pour les publics fragiles en situation de reconversion ou de mobilité, en rendant obligatoire la mobilisation du Dif en cas de demande de Cif, et en mettant en place une “portabilité limitée" du Cif en cas de transition professionnelle[ 2 ]Selon des modalités analogues à celles prévues pour le Dif par l'Ani du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail. ;
fusionner les dispositifs de Cif-CDD et de Dif-CDD, en majorant la contribution des entreprises au Cif-CDD ;
“reconfigurer le réseau des Opacif", en centralisant l'ensemble de la collecte au sein d'un “organisme à caractère national et interprofessionnel", en supprimant les Agecif et collecteurs spécifiques, et en confiant aux seuls Fongecif (régionaux) une “mission d'instruction des demandes", selon des priorités, des critères et des niveaux de prise en charge harmonisés ;
mettre en place un “système de mutualisation effectif" des fonds de la formation sur le plan national, notamment en permettant la “fongibilité" des réserves du Fup (Fonds unique de péréquation) au profit du financement de parcours de formation pour les salariés prioritaires, et par la création de “fonds régionaux pour la formation tout au long de la vie, au niveau régional".
Selon la Cour des comptes, il existe un “risque considérable" pour le système de financement de la formation professionnelle continue et les finances publiques. “La montée en charge du Dif appelle une réorientation profonde et immédiate de ces dispositifs, sauf à accepter de laisser s'accumuler des droits à la formation dont le financement se révèlera rapidement insupportable, avec toutes les conséquences désastreuses qui pourraient en résulter sur le plan social et économique."
[(Le coût du Dif...
La Cour avance que “le coût global deviendrait potentiellement impossible à soutenir à terme si l'ensemble des salariés éligibles utilisaient sur leur temps de travail leur Dif à hauteur du crédit dont ils bénéficient annuellement. Ce ne sont pas moins en effet de 12 millions environ de salariés en contrats à durée indéterminée qui, compte tenu de leur ancienneté, acquièrent chaque année un tel droit à formation. S'ils mobilisaient intégralement leur crédit de 20 heures, la dépense supplémentaire qui en résulterait s'élèverait, selon les estimations réalisées par la Cour et validées par les services du ministère chargé de l'Emploi, à près de 13 milliards d'euros par an, répartie entre prise en charge de frais pédagogiques, à hauteur de 8,5 milliards, et couverture des rémunérations pendant le temps de formation, à hauteur de 4,45 milliards."
... étendu à la fonction publique
L'extension du Dif à la fonction publique inquiète la Cour des comptes. La dépense annuelle supplémentaire qui en découlerait si la totalité des agents concernés en demandait le bénéfice est estimée à 5,5 milliards d'euros, dont environ la moitié pour les fonctionnaires de l'État. La dépense de formation des administrations publiques serait ainsi multipliée par deux.)]
Notes
1. | ↑ | Disponible sur le site www.ccomptes.fr |
2. | ↑ | Selon des modalités analogues à celles prévues pour le Dif par l'Ani du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail. |