Amiens - Les “emplois francs" doivent constituer un dispositif de qualification
Par Benjamin d'Alguerre - Le 01 septembre 2012.
François Lamy s'y était engagé le 20 août dernier, après la semaine de heurts qu'avaient connu les quartiers nord d'Amiens : la capitale picarde serait l'une des villes prioritaires dans laquelle le gouvernement expérimenterait les “emplois francs" (proposés prioritairement aux “jeunes" issus de “quartiers sensibles" en échange d'exonérations fiscales accordées aux entreprises employeuses).
Trois jours plus tard, à l'occasion du conseil des ministres, le ministre délégué chargé de la Ville du gouvernement de Jean-Marc Ayrault présentait une feuille de route préconisant “de réserver les emplois d'avenir aux jeunes des quartiers populaires", mais aussi de soutenir les actions de création d'emploi par le déploiement de moyens supplémentaires accordés à l'Éducation nationale dès la rentrée 2012, et de procéder à une vaste politique de rénovation urbaine. Une politique dont Amiens constituera vraisemblablement l'un des laboratoires, avec l'implication tant les services de l'État que ceux de la Région, du département de la Somme ou de la communauté urbaine d'Amiens-Métropole. Toutefois, pour David Thuillier, responsable du service emploi-insertion de l'agglomération amiénoise et directeur du plan local pour l'insertion et l'emploi (Plie), la politique de création d'emplois énoncée par le ministre délégué à la Ville ne saurait faire l'économie d'une dynamique tenant compte des nécessités d'insertion et de formation des publics concernés par ces emplois francs. “Il est parfois reproché aux politiques d'emplois aidés de ne proposer que des heures de travail à leurs bénéficiaires. Pour notre part, nous insistons particulièrement sur la sécurisation des parcours de ceux qui s'y inscrivent afin qu'ils puissent non seulement bénéficier d'un contrat de travail, mais aussi de qualifications", a-t-il le 27 août, à l'occasion d'un entretien accordé à L'Inffo. Et si, pour l'heure, les modalités réglementaires dans lesquelles s'inscriront ces emplois francs n'ont pas été déterminées, le Plie d'Amiens-Métropole a entamé, dès le 27 août, une série de réunions impliquant les services de la politique de la ville, les structures d'insertion, les services sociaux ou la Mission locale du Grand Amiénois. Une mission locale dont le directeur, Christophe Ramis, s'est entretenu avec François Lamy lors du passage en Picardie de ce dernier. Si, à ses yeux, il est encore “prématuré d'évoquer les modalités de ces emplois francs", puisqu'aucun texte n'est venu les encadrer juridiquement, il souligne toutefois que la mission locale du Grand-Amiénois sera particulièrement attentive dans son travail d'identification des filières en tension dans le bassin d'emploi local. Demeure cependant une inconnue : “Les emplois francs promis concerneront-ils uniquement les quartiers nord ou l'ensemble de la métropole ? Car Amiens-Nord n'est pas l'unique zone sensible de l'agglomération."
Des contrats de professionnalisation pour le chantier de la Citadelle
Le 11 septembre prochain, les acteurs de l'insertion de la métropole picarde se rassembleront dans le cadre d'une réunion collective consacrée à la politique de la ville. À son terme, les services de l'agglomération comptent entamer le travail avec les services de l'État, à commencer par Jean-François Cordet, le nouveau préfet de Picardie, nommé le 1er août en remplacement de Michel Delpuech, mais aussi Pôle emploi. Autant de partenaires que le Plie d'Amiens-Métropole compte sensibiliser à la question de l'emploi durable pour les publics bénéficiaires des contrats aidés, à l'image de ce que l'agglomération et le Conseil général ont déjà mis en œuvre pour le chantier de la Citadelle (réfection d'une ancienne placeforte militaire des quartiers nord destinée à se voir reconvertie en pôle universitaire) qui devrait commencer en début d'année 2013. “C'est, actuellement, l'un des plus gros projets immobiliers et urbains d'Amiens, prévu pour s'étaler sur plusieurs années", précise David Thuillier. Un projet dont l'un des objectifs consistait d'ailleurs déjà à fournir de l'emploi aux habitants des zones sensibles, bien avant les violences de l'été. “Au niveau de la municipalité et du Plie, nous avons été très clairs avec les entreprises qui travailleront sur ce chantier : elles ne devront pas se contenter d'embaucher des personnels intérimaires, mais aussi développer des contrats de professionnalisation pour qualifier les demandeurs d'emploi." Les contrats francs promis par François Lamy pourraient-ils être déployés sur ce projet urbain ? “Il est trop tôt pour l'affirmer, explique le directeur du Plie d'Amiens, mais il s'agit là d'un chantier qui pourrait donner lieu à de nombreuses actions en faveur de l'emploi, mais aussi de l'insertion."