Thierry Repentin, ministre délégué chargé de la Formation professionnelle et de l'Apprentissage
Par Béatrice Delamer - Le 01 juillet 2012.
La formation professionnelle et l'apprentissage ont leur ministre délégué. Thierry Repentin a été nommé le 21 juin auprès de Michel Sapin, qui reste ministre du Travail, de l'Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social dans le deuxième gouvernement de Jean-Marc Ayrault.
C'est un spécialiste des questions de logement qui accède au ministère autrefois occupé par Nadine Morano. Lors de la campagne présidentielle, il était responsable du pôle “habitat et politique de la ville" du candidat François Hollande.
En toute logique, il présidera la table ronde n° 2 “Développer les compétences et la formation tout au long de la vie" de la Conférence sociale qui se tiendra les 9 et 10 juillet 2010 au Cese. Jusque là c'était la seule à ne pas être présidée par un ministre. Une chose réglée.
Béatrice Delamer
Parcours
Né le 5 avril 1963 à Saint-Pierre-d'Albigny, Thierry Repentin est diplômé de l'Institut d'études politiques de Grenoble et titulaire d'un DEA de relations internationales. Élu sénateur PS de Savoie en 2004, il était devenu en 2008 vice-président de l'agglomération de Chambéry métropole, adjoint au maire de Sonnaz et conseiller général de Savoie. Il présidait le Scot (schéma de cohérence territorial) Métropole Savoie, l'Établissement public foncier de Savoie et l'Union sociale pour l'habitat (USH), qui fédère les organismes de HLM, tout en étant membre du Conseil national de la montagne depuis 2009, et du bureau de l'Association nationale des élus de la montagne (Anem).
Un nouveau ministre qui emporte l'adhésion
_“Les acteurs de la formation professionnelle ont de la chance : ils ont aujourd'hui un excellent ministre !" Ainsi s'exprime Alain Cacheux, vice-président de USH (Union sociale pour l'habitat) que présidait Thierry Repentin jusqu'à sa nomination au poste de ministre de la formation professionnelle. Celle-ci a causé un certain étonnement : cet homme, plutôt reconnu pour son expertise en matière de logement, sera-t-il a même d'occuper sa nouvelle fonction, de s'emparer des problématiques complexes de la formation professionnelle, et cela alors que les acteurs sont encore occupés à absorber les bouleversements induits par la loi du 24 novembre 2009 ? Pour répondre à cette question, L'Inffo est allé à la rencontre de ceux qui l'ont côtoyé.
“Un homme de dialogue" et “un travailleur assidu" : tels sont, unanimement, les qualités prêtées à Thierry Repentin. “J'ai travaillé avec lui dans le cadre des États généraux du logement en 2010", se souvient Jean-Michel Cerdan, secrétaire confédéral de la CFTC et membre de la commission logement du syndicat. “Dans ce cadre, 37 associations et organisations ont élaboré 15 propositions à destination des pouvoirs publics pour renouveler les politiques de logement. J'ai à cette occasion pu constater les compétences de Thierry Repentin : parvenir a un compromis avec tant d'acteurs n'était pas simple, mais il y est arrivé ! C'est un homme très compétent dans le secteur. De plus il est pragmatique et sait trouver le consensus", ajoute-t-il.
Jean-Claude Carle, sénateur UMP de Haute-Savoie et spécialiste de la formation, ne cache pas lui non plus son opinion favorable sur le nouveau ministre. “Je connais Thierry Repentin depuis longtemps. Nous sommes tous deux sénateurs de Savoie. À cet égard, il préside un groupe d'études sur le développement économique de la montagne auquel j'appartiens. Nous n'avons certes pas les mêmes idées politiques, mais je pense qu'il est tout à fait capable de se saisir du dossier de la formation professionnelle à bras le corps. C'est une personne pour laquelle j'ai de l'estime." Sa spécialisation dans le domaine du logement plutôt que dans celui de la formation pourrait-elle constituer un handicap ? Jean-Claude Carle ne le pense pas : “Je dis toujours qu'il ne faut jamais mettre un agriculteur à la tête du ministère de l'agriculture. Cela ne donne jamais de bons résultats", sourit-il. Un avis partagé par Alain Cacheux : “Il va beaucoup s'investir sur ce dossier, je lui fait confiance. De plus, il sera entouré de collaborateurs de l'administration centrale. N'oublions pas que son rôle en tant que ministre sera plus politique que technique !"
Aura-t-il toute latitude pour agir ?
Pour autant, le champ de la formation n'est pas étranger à Thierry Repentin. Maurice Carraz, ancien président (OPH) d'Habitat Formation, l'Opca des acteurs de la ville, se rappelle qu'en tant que président de l'USH, il a participé à la désignation d'Uniformation comme organisme d'accueil, dans le cadre de la récente fusion des Opca. “Thierry Repentin a apporté tout son appui à l'évolution de l'habitat et du lien social, pour permettre au secteur de garder son unité à Uniformation, au sein d'une SPP (section paritaire professionnelle) et d'un département dédié, intitulé Habitat et lien social", déclare-t-il. Ainsi Thierry Repentin est-il signataire de l'accord de réagrément d'Uniformation.
Si les qualités du nouveau ministre ne font aucun doute pour Jean-Claude Carle, celui-ci s'interroge toutefois sur sa capacité à rénover le monde de la formation professionnelle : “Sortir des cloisonnement, gérer les suite de la réforme… C'est une tâche passionnante qui l'attend, mais il est possible de se demander si son ministère de tutelle lui laissera toute latitude pour agir. Il faut noter qu'il est également contraint par tous les engagements pris par François Hollande au cours de la campagne pour les présidentielles."
Aurélie Gerlach
Christian Ville, directeur de cabinet
Christian Ville, nommé président du Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie (CNFPTLV) par décret le 9 février 2012, ne sera resté à ce poste que quelques mois. À l'heure où nous mettions sous presse, l'arrêté de nomination était encore en cours de signature, mais sa nomination comme directeur de cabinet de Thierry Repentin, ministre délégué à la Formation professionnelle et à l'Apprentissage, était confirmée au ministère. Il devrait parallèlement devenir directeur adjoint du cabinet de Michel Sapin (cf. L'Inffo n° 812, p. 3), pour les problématiques de formation professionnelle.
Né à Lyon, cet inspecteur général des affaires sociales de 59 ans a débuté sa carrière comme inspecteur du travail d'abord dans les Hauts-de-Seine, puis dans la Loire avant de rejoindre l'Intefp en 1983 comme responsable de la formation des élèves inspecteurs du travail, puis en occupant la fonction de directeur des sessions extérieures, jusqu'en 1989. Par la suite, Christian Ville a été successivement délégué régional à la formation professionnelle en Poitou-Charentes (1992-1995), DRTEFP en Limousin (1995-1998) puis en Rhône-Alpes, région où il occupera ensuite le rôle de directeur général adjoint des services du Conseil régional de 2004 à 2010.
Jérôme Giudicelli, récemment nommé conseiller chargé du développement des compétences, de la formation professionnelle et de l'alternance au cabinet de Michel Sapin, devrait, de son côté, être nommé directeur adjoint du cabinet de Thierry Repentin. Diplômé de l'Institut d'études politiques de Paris, il a été affecté au ministère de l'Emploi peu après sa sortie de l'Éna, en 2000. Il y a occupé les postes d'adjoint au chef de la mission de l'indemnisation du chômage à la DGEFP (2001-2003), puis de chef de mission marché du travail. De 2004 à 2010, Jérôme Giudicelli a été directeur de la formation professionnelle et de l'apprentissage au Conseil régional des Pays de la Loire, avant d'y devenir directeur général délégué à l'emploi, à l'économie et aux innovations. Il devrait, malgré sa nomination au cabinet de Thierry Repentin, rester intégré au cabinet Sapin.
Sophie Donzel, adjointe au maire de Nanterre (au développement économique, à l'emploi et au commerce) depuis 2001, se voit confier le poste de chef de cabinet du ministère délégué. Depuis 2006, elle était assistante parlementaire de Thierry Repentin au Sénat. Âgée de 32 ans, Sophie Donzel est diplômée de l'IEP de Bordeaux.
Législatives : tous les ministres élus
Vingt-cinq ministres du premier gouvernement Ayrault briguaient un poste de député. Le Premier ministre avait été clair : celui ou celle qui ne serait pas élu(e), devrait quitter son poste. Le 10 juin dernier, six d'entre eux l'ont emporté dès le premier tour : Jean-Marc Ayrault, Delphine Batho (déléguée à la Justice), Bernard Cazeneuve (Affaires européennes), Frédéric Cuvillier (Transports), Laurent Fabius (Affaires étrangères) et Victorin Lurel (Outre-Mer). Il restait donc un petit suspense pour les dix-neuf autres : tous ont été rassurés au soir du second tour. Ils laisseront leur suppléant siéger au Palais Bourbon − à l'exception de Michel Sapin, qui se présentait en suppléant de Jean-Paul Chanteguet.
En dépit d'une faible participation (55,05 %), les législatives de 2012 ont donné la majorité absolue à la majorité présidentielle, avec 300 sièges sur 577 pour le PS et divers gauche. Conformément à la tradition républicaine, Jean-Marc Ayrault a remis la démission de son gouvernement à François Hollande le 18 juin. Le président de la République l'a acceptée et a immédiatement renommé Jean-Marc Ayrault comme chef du gouvernement.
Claire Padych
Mouvements
Outre Thierry Repentin, trois autres nouveaux entrants dans ce gouvernement Ayrault II : Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée chargée de la Décentralisation,
Guillaume Garot, ministre délégué chargé de l'Agroalimentaire,
et Hélène Conway, ministre déléguée chargée des Français de l'étranger.
Delphine Batho devient ministre de l'Écologie, du Développement durable et de l'Énergie,
Sylvia Pinel ministre de plein exercice chargée de l'Artisanat, du Commerce et du Tourisme,
Nicole Bricq, remplacée par Delphine Batho, devient ministre chargée du Commerce extérieur.
Certains portefeuilles sont “enrichis" :
la Consommation, pour Benoît Hamon, ministre délégué à l'Économie sociale et solidaire,
la Forêt, pour Stéphane Le Foll, ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire,
la Lutte contre l'exclusion, pour Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée aux Personnes handicapées,
la Mer et la Pêche, pour Frédéric Cuvillier, ministre délégué des Transports,
Yamina Benguigui garde la Francophonie mais perd les Français de l'étranger, portefeuille d'Hélène Conway.
COMMENTAIRE
Jean-Patrick Gille, député PS d'Indre-et-Loire, spécialiste des questions de formation [ 1 ]Gérard Cherpion, député UMP qui a porté durant la précédente législature la proposition de loi relative à l'alternance, était en ballotage défavorable face à Jack Lang dans les Vosges, mais l'a finalement emporté. , entame son deuxième mandat parlementaire. Un mandat “placé sous le signe de l'urgence", comme il l'a indiqué dans un entretien accordé à L'Inffo. Urgence pour la situation de l'Afpa, notamment. Un sujet sur lequel l'élu tourangeau avait alerté le candidat Hollande bien avant son élection. “Je l'avais prévenu que ce dossier serait l'un des premiers à exploser, et c'est exactement ce qui s'est produit." Saluant le choix de Jean-Luc Vergne, ancien président de l'Association, de démissionner : “Un geste salutaire en période de crise, même s'il ne résout pas le premier problème de l'Afpa, qui demeure celui de sa trésorerie." Quant au retour d'un ministère dédié à la Formation professionnelle, elle s'inscrit “dans la logique des choses", puisque le nouveau ministre peut épauler Michel Sapin, “notamment sur des dossiers transversaux comme celui de Pôle emploi, de la réorganisation des fonds de la formation, ou pour renforcer le dialogue social avec les organisations représentatives du patronat et des salariés". Et si l'Union nationale des Missions locales (UNML) qu'il préside n'a pas été sollicitée pour la conférence sociale des 9 et 10 juillet prochains, son agenda prévoit une rencontre prochaine avec Michel Sapin.
Benjamin d'Alguerre
Notes
1. | ↑ | Gérard Cherpion, député UMP qui a porté durant la précédente législature la proposition de loi relative à l'alternance, était en ballotage défavorable face à Jack Lang dans les Vosges, mais l'a finalement emporté. |