Entretien avec Fabrice Gutnik, nouveau président de l'Association française de réflexion et d'échange sur la formation (Afref)

“Notre projet : redonner du sens à la formation"

Fondée voici plus de cinquante ans pour “rassembler toutes les personnes exerçant des responsabilités en matière de formation", l'Afref veut aujourd'hui prendre un nouvel élan. Élus en octobre dernier, son nouveau président, le sociologue d'entreprise Fabrice Gutnik, et son nouveau délégué général, le consultant Claude Villereau, préparent “Afref Cap 2013". Explications.

Par - Le 01 février 2013.

“Notre projet : redonner du sens à la formation"

Fondée voici plus de cinquante ans pour “rassembler toutes les personnes exerçant des responsabilités en matière de formation", l'Afref veut aujourd'hui prendre un nouvel élan. Élus en octobre dernier, son nouveau président, le sociologue d'entreprise Fabrice Gutnik, et son nouveau délégué général, le consultant Claude Villereau, préparent “Afref Cap 2013". Explications.

Quels chantiers allez-vous mettre en œuvre dans le cadre de votre mandat ?

Globalement, notre projet a vocation à redonner du sens à la formation. Nous partons de trois constats. D'abord, l'importance de la division du travail en matière d'ingénierie en formation : ingénierie des accompagnements, des dispositifs, des territoires. Les activités se sont “technicisées" et, surtout, dépolitisées. Ensuite, la formation des adultes en France est essentiellement tournée vers la formation professionnelle, alors que, par exemple, les Universités populaires participent de la formation et du partage des savoirs pour tous. Enfin, nous ne pouvons que constater la polarisation des débats sur des thèmes relevant des moyens plus que des fins de la formation des adultes. Notre ambition est de rassembler et de redynamiser les échanges entre tous les acteurs concernés par la question du sens.

Concrètement, les activités de l'Afref vont-elles évoluer ?

Depuis 1961, l'Afref a vocation à “mettre des idées sur la table" en permettant le dialogue entre les professionnels de la formation des adultes et des ressources humaines plus largement, avec leurs pairs, des consultants, des chercheurs, des politiques, des syndicalistes, à partir notamment des “Jeudi de l'Afref".
Nous allons également développer d'autres activités et organiser les 1ères Universités de l'Afref, en juillet 2013, qui porteront sur la professionnalisation des acteurs de la formation. Il s'agit d'un enjeu important pour considérer, à l'instar de Claude Dubar [ 1 ]Sociologue, professeur à l'Université de Versailles, Saint-Quentin-en-Yvelines., “l'organisation sociale et la catégorisation des activités du travail, le sens du travail et la structuration des marchés du travail, en formation des adultes".
Autre nouveauté : nous allons organiser des “Trophées de l'innovation en formation", en novembre 2013. Il s'agit de mettre en avant et de partager les activités ou projets innovants en matière de formation des adultes, en entreprises et dans les associations.
Enfin, nous allons également mettre en place des groupes thématiques, tels que “Formation et santé", qui produiront des notes d'orientation dans l'objectif général de dynamiser le dialogue et l'aide à la décision.

Qu'en est-il de la visibilité de l'association ?

Il est en effet nécessaire de poursuivre l'amélioration de notre visibilité, ce qui passe d'abord par la refonte de notre site. Il doit devenir un véritable outil de travail pour nos adhérents. Nous avons d'ailleurs développé un partenariat avec le centre de documentation sur le travail et la formation du Cnam en ce sens, afin de proposer une veille dans le domaine de la formation des adultes. Il s'agit aussi de devenir un centre de ressources et de leur faire bénéficier de véritables services.

Par ailleurs, la professionnalisation est un sujet très sensible également pour les étudiants. Nous souhaitons pouvoir les aider dans leur recherche d'emploi grâce au développement de partenariats permettant leur accompagnement.

L'Afref a toujours été fidèle à ses principes d'humanisme, de liberté d'opinion et à sa culture de l'ouverture. Nous devons travailler à l'élargissement de ses relations avec l'ensemble des acteurs que ce soient les entreprises, les associations professionnelles ainsi que les institutions publiques et parapubliques. 

La professionnalisation est-elle l'enjeu majeur des professionnels de la formation ?

Oui, il y a une attente quant à la reconnaissance de la légitimité et de l'utilité sociale de leurs activités. Les acteurs de la formation des adultes ne se rencontrent pas assez pour décider ensemble de leur avenir. La professionnalisation est un objectif politique. 
Il est nécessaire, par exemple, de prendre la mesure des difficultés rencontrées dans l'exercice des métiers, voire de la précarité de certains d'entre eux. Il faut également tenir compte de l'évolution de notre époque qui voit croître l'intelligence collective avec nos bibliothèques numériques. Il ne suffit pas de collecter individuellement des informations pour comprendre nos métiers. Il faut hiérarchiser collectivement l'information qui se diversifie et la compléter pour anticiper l'évolution de nos métiers, dans des contextes économiques et sociaux toujours plus complexes et évolutifs. Enfin, nous sommes dans un monde où la formation des adultes est aussi celle des citoyens et doit donc contribuer à l'émancipation individuelle et collective. Les réseaux sociaux ont apporté des changements que nous devons prendre en considération pour la professionnalisation et l'action. 

Les attentes de nos adhérents évoluent, l'Afref s'adapte pour rassembler l'ensemble des acteurs et porter un projet fédérateur.

L'Afref peut-elle devenir un interlocuteur indispensable pour les pouvoirs publics ?

Notre objectif étant de donner du sens, nous comptons en effet pouvoir prendre position sur certains sujets. L'Afref constitue une agora qui pourra aussi être force de propositions.

Propos recueillis par Sandrine Guédon

Notes   [ + ]

1. Sociologue, professeur à l'Université de Versailles, Saint-Quentin-en-Yvelines.