La portabilité du Dif : une mesure qui fait l'unanimité

C'est une des avancées de la loi, saluée par tous les acteurs, même si certains syndicats auraient souhaité aller plus loin.

Par - Le 01 novembre 2008.

lors qu'il était question dans divers rapports publics de supprimer ce dispositif voire de le fusionner avec le Cif, la nouvelle loi, en consacrant une section dans le Code du travail à la “portabilité du Dif", réaffirme son existence et son utilité.

20 heures minimum par an pour chaque salarié dans la limite de six ans (ou 120 heures). La loi de 2004 avait ainsi instauré un crédit d'heures pour chaque salarié destiné à être utilisé, à son initiative et avec l'accord de l'employeur, pour se former. Les modalités de mise en œuvre ont été renvoyées à la négociation collective.

Les parlementaires ont organisé la “portabilité" en se penchant sur le sort du crédit Dif lorsque le salarié est amené à quitter l'entreprise. Autrement dit, que deviennent les droits acquis au titre du Dif après un licenciement, une démission, une rupture conventionnelle ou encore le terme d'un CDD ? Après plusieurs versions, le texte définitif donne le choix au salarié, sous réserve de la modalité de la rupture, entre une utilisation immédiate (avant le préavis) ou une utilisation différée (pendant la période de chômage ou chez le nouvel employeur). Deux temps doivent donc être distingués.

Avant la rupture d'un contrat

En cas de licenciement, et si le salarié en fait la demande avant la fin du préavis, ce dernier a droit à un financement total ou partiel d'une formation, d'un bilan de compétences ou d'une VAE. À défaut d'une telle demande, le financement n'est pas dû par l'employeur.
Si cette possibilité était déjà prévue par la loi de 2004 sous l'appellation de “transférabilité", trois nouveautés méritent néanmoins d'être soulignées. La première concerne les motifs de licenciements. Jusqu'à présent, deux d'entre eux n'ouvraient pas droit à financement : faute grave et faute lourde. Désormais, seule la faute lourde prive le salarié de son droit à financement. Dans la pratique, et en l'état actuel du droit, le salarié licencié pour faute grave se trouvera dans l'impossibilité de faire sa demande de Dif. En effet, la faute grave est selon la Cour de cassation une faute “d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis" (Cass. soc., 26 février 1991, n° 88-44-908). En d'autres termes, la faute grave est celle qui justifie la cessation immédiate du contrat de travail sans préavis.
La deuxième nouveauté concerne le montant du financement de l'employeur : montant forfaitaire (9,15 euros minimum) au lieu et place de l'allocation de formation (50 % du salaire horaire net). L'objectif étant de corriger les injustices en termes de financement. En effet, la prise en charge sur la base d'un montant forfaitaire a le mérite de mettre tous les salariés sur un pied d'égalité, contrairement à l'allocation de formation dont le montant varie selon la rémunération du salarié.
Enfin, la troisième nouveauté est avant tout une précision. La loi dispose que lorsque l'action est réalisée pendant l'exercice du préavis, elle se déroule obligatoirement pendant le temps de travail. Ce qui oblige donc l'employeur à maintenir la rémunération du salarié en formation jusqu'à la rupture définitive de son contrat de travail.

Après avoir quitté l'entreprise

Il s'agit de l'un des apports majeurs de la nouvelle loi. Désormais, tout salarié quittant l'entreprise pour quelque cause que ce soit (sauf licenciement pour faute lourde) conserve la possibilité de financer une formation suivie ultérieurement en utilisant le crédit Dif acquis dans son ancienne entreprise. Une seule condition : la rupture ou le terme du contrat de travail doit ouvrir droit à l'assurance chômage.
Ce financement est égal à un montant forfaitaire (9,15 euros minimum) multiplié par le nombre d'heures acquises par le salarié au titre du Dif dans son ancienne entreprise et non encore utilisé. Cette somme peut être mobilisée :
• dans sa nouvelle entreprise : le salarié a deux ans suivant son embauche pour faire sa demande. Si l'employeur accepte, la somme permettra de financer tout ou partie d'une action de formation, de bilan de compétences ou de VAE. S'il refuse, la somme permettra de financer uniquement les actions relevant des priorités de la branche, actions qui, précise la loi, doivent se dérouler hors temps de travail et n'ouvrent pas droit à l'allocation formation. Dans tous les cas, le paiement de cette somme est assuré par l'Opca du nouvel employeur et sera puisé, sauf dispositions conventionnelles dérogatoires, sur les fonds de la “professionnalisation" ;
• pendant sa période de chômage, la mobilisation de la somme a lieu en priorité pendant la période de prise en charge par le régime d'assurance chômage. Elle se fait après avis du référent chargé de l'accompagnement de l'intéressé. Quant au paiement de la somme, il est assuré par l'Opca dont relève la dernière entreprise dans laquelle l'intéressé a acquis les droits au Dif. Cette somme est également imputée, sauf dispositions conventionnelles dérogatoires, au titre de la section
“professionnalisation".

Fouzi Fethi

[(“Cif" hors temps de travail

Si la possibilité de réaliser un Cif en tout ou partie pendant le temps de travail n'est pas modifiée, la nouvelle loi offre en plus la possibilité au salarié d'obtenir la prise en charge d'une formation se déroulant en dehors du temps de travail, sans demander à son employeur une autorisation d'absence, et éventuellement sans que celui-ci ne soit informé de sa démarche.
Pour en bénéficier, le salarié doit avoir au moins un an d'ancienneté dans son entreprise. Si le contrat à durée indéterminée est clairement visé, il n'en est pas de même du contrat à durée déterminée et du contrat de travail temporaire au sujet desquels la loi est muette.

C'est au salarié d'effectuer une demande de financement – total ou partiel – des frais liés à cette formation auprès de l'Opacif dont relève son entreprise. La prise en charge par ce dernier n'est pas automatique : il peut en effet accepter, refuser ou prendre en charge partiellement les frais en question.
Pendant la formation, le salarié ne perçoit ni rémunération ni allocation de formation, mais il bénéficie d'une protection contre le risque “accident du travail". La durée minimum des formations qui pourront ouvrir droit à cette nouvelle modalité de prise en charge par les Opacif sera déterminée par un décret.

B. C.)]