“La formation aura un rôle majeur à jouer lors de la relance" (Pierre Courbebaisse, FFP)

Interrompues depuis le 16 mars, les formations en présentiel ne pourront pas reprendre avant quelques semaines. Mais d'ores et déjà, la Fédération de la formation professionnelle (FFP) travaille sur les modalités de sortie du confinement. Pour son président, Pierre Courbebaisse, la priorité est de sécuriser la profession afin de répondre aux enjeux de développement des compétences dans la période post-crise.

Par - Le 22 avril 2020.

Le Quotidien de la formation - Quelle est la situation du secteur après un mois de suspension des activités en présentiel ?

Pierre Courbebaisse - Dès le début de la crise sanitaire, nous nous sommes mobilisés pour aider les adhérents à poursuivre leur activité à distance en publiant par exemple un guide des outils à mettre en place. Cependant déployer une offre en distanciel prend du temps, nécessite des contenus adaptés et un environnement compatible du côté des formateurs comme des stagiaires. Pour autant, je suis impressionné par les progrès réalisés en peu de temps. Avant la crise sanitaire, seulement 10 % des formations étaient dispensées à distance. En un mois, leur nombre a doublé, voire triplé. Mais cela signifie aussi que 70 à 75% du secteur est aujourd'hui à l'arrêt.

Quelles sont les principales difficultés rencontrées ?

Plus que la bascule vers le distanciel, le problème de fond c'est l'annulation des commandes, sans possibilité de report. C'est particulièrement vrai sur le marché des entreprises. Le risque c'est que le rebond se fasse attendre. Certains grands comptes nous disent qu'ils ne reprendront pas les formations avant 2021.

Dans ce contexte, quelles sont les perspectives pour les prochains mois ?

La priorité c'est de préserver la trésorerie de nos entreprises en mobilisant les aides disponibles et d'œuvrer à une reprise rapide des formations en présentiel. Nous travaillons en ce moment sur les modalités de sortie de confinement pour pouvoir, quand la date sera fixée pour nos activités, assurer des formations dans le respect des règles de prévention et de sécurité, sachant que les mesures adoptées dépendront de la typologie des sites et de la nature des formations.

Comment accueillez-vous les décisions du gouvernement pour inciter les entreprises à former leurs salariés à distance ?

L'évolution du FNE-Formation est une bonne chose à condition que les procédures d'accès et de mise en œuvre soient réellement simplifiées, ce qui semble le cas pour les formations dont le montant est inférieur à 1500 euros. Le problème c'est que les entreprises connaissent peu le FNE-Formation et ont aujourd'hui d'autres priorités. Il y a un effort de sensibilisation à faire de la part de tous les acteurs, y compris des Direccte et des opérateurs de compétences. C'est le sens de la campagne de communication que nous venons de lancer (lire ci-dessous). Il me semble cependant qu'il y a des signaux positifs : les inscriptions en formation à distance ont augmenté de 30 % sur l'application “Mon compte formation". S'il y a une demande individuelle forte cela va créer une dynamique dans les entreprises.

Quel impact aura cette crise à plus long terme ?

Cette crise démontre qu'il est possible d'aborder la formation de manière différente – à domicile, à distance, hors temps de travail – mais surtout que le développement des compétences sera déterminant à l'avenir. La formation aura un rôle majeur à jouer dans la relance et dans les mutations en cours ou à venir : évolution du travail, transformation digitale, transition écologique, relocalisation, etc. D'où l'importance de sécuriser le secteur et les établissements qui le composent en investissant dans la formation des formateurs et la construction de partenariats entre les différents acteurs de la filière : producteurs de solutions technologiques, organismes de formation, certificateurs etc.

 

Une campagne pour encourager à se former pendant le confinement

Un hashtag “JeMeFormeChezMoi" et une vidéo de deux minutes dans laquelle interviennent la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, et le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger : c'est le dispositif de communication déployé sur Internet par la FFP pour inciter les Français à développer leurs compétences pendant le confinement. Cette campagne est l'occasion de rappeler l'existence de l'application “Mon compte formation" et la diversité des modalités d'apprentissage à distance. Les adhérents de la fédération sont invités à relayer le message sur leurs sites internet.