« Nous allons déployer des parcours CPF co-construits » (Alain Roumilhac, président de ManpowerGroup France)

Par - Le 23 juillet 2018.

Alors que le projet de loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » est toujours en discussion au Parlement, Alain Roumilhac, président de ManpowerGroup France livre au Quotidien de la formation sa vision de la réforme et des grandes orientations de la formation professionnelle. Le groupe spécialiste de l'intérim et du recrutement forme plus de 50 000 personnes par an.

Le Quotidien de la formation : Comment les entreprises abordent-elles le sujet de la formation professionnelle ?

Alain Roumilhac : Aujourd'hui, les chefs d'entreprise font de l'adaptation des compétences un sujet prioritaire. Cette prise de conscience est partagée quelle que soit la taille ou l'activité des entreprises. Les dirigeants placent désormais cet enjeu en bonne place dans leur agenda stratégique. La seule question qu'ils se posent désormais c'est comment répondre à un défi d'une telle envergure. Nous le constatons dans nos activités en pleine croissance d'accompagnement de la mobilité interne et des transformations des compétences. Afin de garantir une meilleure adéquation entre les besoins des entreprises et le profil des candidats, nous associons un parcours formation aux recrutements que nous confient nos clients. La pénurie de compétences adaptées touche aujourd'hui beaucoup de secteurs : le digital, les transports, l'agroalimentaire ou encore les centres d'appel. Nous avons structuré notre offre autour de notre entité FuturSkill qui identifie, forme et intègre des talents pour nos clients. Nous travaillons également à plus grande échelle avec les branches. Autre tendance qui va s'accentuer avec la réforme, les entreprises - en particulier celles qui n'auront plus la possibilité de mobiliser les fonds mutualisés - cherchent de plus en plus à mesurer l'efficacité de la formation dispensée. Pour répondre à cette exigence, nous disposons aujourd'hui d'outils d'évaluation numériques capables d'évaluer l'acquisition de compétences y compris comportementales.

QDF : Comment évolue l'offre de formation ?

A. R : Nous assistons à une accélération de grandes tendances amorcées il y a quelques années. La formation doit répondre aux enjeux de l'individualisation de l'offre et des transitions professionnelles. Tout le monde ne part pas avec le même bagage et la même expérience. Et de plus en plus de salariés changent de métier ou doivent faire évoluer leurs compétences.

Il faut construire des parcours individualisés. Aujourd'hui, l'ingénierie de formation peut s'appuyer sur les outils digitaux pour articuler les actions en présentiel et à distance, explorer des approches innovantes et adapter l'offre.

Chez Manpower, nous avons mis en place un accompagnement spécifique pour développer les compétences de nos propres talents. Nos « agents de talents » suivent et conseillent un groupe d'intérimaires dans leurs évolutions professionnelles. En 2017, la durée d'emploi des bénéficiaires de cette solution a augmenté de 17 %. »

QDF : Selon vous, la réforme engagée par le gouvernement va-t-elle dans le bon sens ?

A. R : Développer l'alternance est fondamental. Cette modalité de formation a fait ses preuves, en particulier sur les métiers en tension. Cela fait longtemps que l'on cherche à résoudre l'écart entre les besoins des entreprises et l'offre d'apprentissage. En impliquant les branches professionnelles, la réforme va dans le bon sens. Pour autant, nous devons être très vigilants.

Il ne se passera rien si on ne motive pas les jeunes et leurs parents. Il est essentiel de mettre en œuvre une véritable politique publique de l'orientation.

Le CPF monétisé doit être appréhendé comme un levier d'employabilité à la main des individus. Cette nouvelle approche exigera un peu de pédagogie. L'accès à un accompagnement de qualité sera crucial. Au sein de Manpower, nous allons déployer des parcours CPF co-construits avec nos intérimaires. Nous l'assumons. Nous avons d'ailleurs commencé à nouer des partenariats avec des acteurs de la formation comme OpenClassrooms.