N° 6 - Juillet-Août 2018
Pour se digitaliser, BPCE mise sur la formation
Par Nicolas Deguerry - Le 05 juillet 2018.
L a négociation d'un accord de GPEC a beau être une obligation triennale, elle peut aussi être porteuse d'ambitions. C'est le cas de l'accord signé à BPCE (Banque populaire - Caisse d'épargne) le 21 décembre 2017. Le texte, paraphé par la CFDT, la CFE-CGC et l'Unsa, prévoit notamment un volet substantiel sur la formation : le groupe bancaire y consacrera 10 millions d'heures sur trois ans, soit une augmentation de 25 % de son effort dans ce domaine.
BPCE (95 000 salariés en France), prévoit de fermer 400 agences et de supprimer 4 000 postes en comptant sur les départs naturels d'ici à 2020. C'est le contexte de la transformation digitale de son offre et des compétences de ses salariés. “Dans un environnement en forte transformation et de bouleversements technologiques, les exigences et les comportements des clients se modifient", expliquent les signataires. Par ailleurs, de nouveaux acteurs arrivent sur le marché : Orange, par exemple, vient de lancer sa banque 100 % en ligne.
800 “compétences-clés"
La transformation digitale de l'offre de BPCE poursuit trois objectifs : rendre les clients autonomes sur leurs opérations bancaires ; focaliser les forces de vente sur le conseil en digitalisant les processus ; et augmenter de 50 % le nombre de conseillers spécialisés. Le volet salariés de cette transformation prévoit de les équiper tous d'outils digitaux d'ici trois ans. 800 “compétences-clés" seront recrutées dans le domaine du digital, ce qui suppose de “développer l'image employeur du groupe".
Ces objectifs ont été posés dans le plan stratégique 2018-2020 de la banque, adopté au mois de novembre. L'accord de GPEC du mois de décembre 2017 est la mise en œuvre des deux derniers objectifs, dont les ambitions sociale et managériale sont précisées : faciliter l'appropriation des évolutions technologiques, faire progresser l'“esprit de service", développer le “management participatif", améliorer l'“expérience collaborateur".
L'accord de GPEC contient un volet en faveur des jeunes (notamment un objectif de 3,5 % d'alternants à fin 2020) et des seniors (dont des congés de fin de carrière). Ainsi que des dispositions en direction des représentants du personnel.
“Les parties signataires de l'accord GPEC ont souhaité associer cet accord à la réalisation du nouveau plan stratégique TEC 2020, explique la direction de BPCE. Elles conviennent ainsi que la dimension des ressources humaines composant le groupe prend une place déterminante dans les conditions de son succès."
“Le plan stratégique était strictement financier et ne comportait pas de volet social, indique Youssef Ben Messaoud, coordinateur CFDT, c'est pourquoi nous étions assez critiques, tout en étant conscients que l'entreprise a besoin de s'adapter à la nouvelle donne économique. Mais l'accord GPEC contient des avancées intéressantes, c'est pourquoi nous l'avons signé." La CFDT était notamment attachée à maintenir un volet en faveur des jeunes et des seniors malgré la fin des contrats de génération, ainsi que la possibilité de départs anticipés malgré celle des préretraites.
Non-signataire, Sud-Solidaires dénonce de son côté, dans un tract, “la course effrénée au tout digital" et “l'arrivée de l'intelligence artificielle (le fameux robot qui dans certaines banques suisses remplace déjà les conseillers en patrimoine)".
Six métiers amenés à monter en compétences
Les signataires de l'accord de GPEC listent six métiers amenés à monter en compétences (lire encadré). Pour réaliser leur transformation digitale, BPCE compte sur le plan de formation de chacune des entreprises du groupe, qui “s'assureront de prévoir les moyens suffisants pour accompagner les salariés concernés" et sur l'apprentissage à distance, notamment via sa plateforme proposant des vidéos nommée “B'digit".
La banque veut aussi mobiliser plusieurs dispositifs à financement paritaire, principalement les périodes de professionnalisation. L'accord précise que les formations demandées par l'employeur sont réalisées pendant le temps de travail. Les signataires de l'accord rappellent l'existence des dispositifs à la main de salariés (CPF, Cif, VAE, conseil en évolution professionnelle, bilan de compétences). Ils peuvent compléter l'effort de l'entreprise.
L'augmentation de 25 % du nombre d'heures de formation, pour atteindre 10 millions d'heures sur trois ans constitue un effort financier important pour BPCE, qui y consacre déjà 6,5 % de sa masse salariale. La direction de la banque ne communique pas sur le budget que cela représente. “L'essentiel du budget de formation, qui est déjà conséquent, est consacré au réglementaire et au commercial, ce qui correspond à un réel besoin, explique Youssef Ben Messaoud. Pour aller sur le numérique, il faut donc faire un effort supplémentaire."