François Hollande appelle à clarifier le système “trop enchevêtré" de la formation professionnelle
Annoncée et préparée depuis l'élection présidentielle, la conférence sociale des 9 et 10 juillet a été ouverte par François Hollande, qui a appelé de ses vœux un dialogue social “au cœur du changement" pendant les cinq années à venir. Objet de la deuxième des sept tables rondes, la formation professionnelle apparaît plus que jamais inscrite dans un continuum, tout au long de la vie : deuxième, voire troisième chance pour les décrocheurs, mais aussi appui aux mobilités et, surtout, amélioration de la lisibilité et de l'accessibilité, pour les demandeurs d'emplois et les salariés.
Par Nicolas Deguerry - Le 01 août 2012.
“Définir un pacte de confiance et d'efficacité entre État, salariés, entreprises, partenaires sociaux", ainsi le président de la République François Hollande a-t-il formulé son objectif, le 9 juillet, en ouvrant la conférence sociale au Conseil économique, social et environnemental (Cese).
Exposant sa méthode, il a proposé de s'appuyer sur trois principes qui demandent le développement d'une “culture de la négociation" : premièrement, “aborder l'ensemble des sujets, sans exclusive. (…) L'emploi étant la priorité première". Deuxièmement, “fixer un agenda cohérent et partagé permettant d'avancer en commun dans le respect de l'indépendance de chacun". Troisièmement, “s'inscrire dans la durée".
Il a identifié “trois grands défis" pour ces années à venir : comptes publics, compétitivité, chômage. Sur ce dernier point, le président a observé : “Le taux de chômage dépasse aujourd'hui 10 % de la population active et progresse de manière continue depuis plus de trente mois. Il touche les jeunes, mais aussi les travailleurs les plus âgés : 45 % des plus de 55 ans, seulement, ont un emploi et près de 450 000 personnes sont au chômage depuis plus de trois ans, ce qui veut dire une exclusion profonde." D'où un appel à, “sans attendre (…) améliorer notre système de formation professionnelle, répondre plus efficacement aux offres d'emploi, accompagner plus rapidement les chômeurs vers l'activité et utiliser tous les mécanismes d'insertion".
François Hollande attend des partenaires sociaux qu'ils préparent, éventuellement par un accord interprofessionnel, la mise en œuvre début 2013 du contrat de génération, dont l'objectif est de “faire davantage de place dans nos entreprises aux jeunes qui veulent s'insérer et aux seniors qui veulent continuer à travailler et à transmettre leurs compétences".
Concernant le développement des compétences, le président a fixé quatre “obligations" pour “clarifier un système trop enchevêtré" :
possibilité d'une deuxième, voire troisième chance, pour ceux qui ont échoué en formation initiale ;
sécurisation des parcours professionnels des salariés souhaitant changer d'activité, par un accompagnement renforcé à la mobilité ;
extension des dispositifs négociés par certaines Régions, pour aider les entreprises à traverser les baisses d'activité sans recourir à des licenciements ;
amélioration de la lisibilité et de l'accessibilité du système de formation professionnelle aux demandeurs d'emploi et aux salariés.
Évoquant les inévitables “points de désaccord" qui se feront jour, François Hollande a appelé les acteurs à s'inscrire dans un “compromis positif", de nature à lancer “une dynamique durable qui sera en elle-même un changement dans la méthode, pour permettre le changement dans la réalité". Et d'annoncer un premier bilan dans un an.
Nicolas Deguerry
Les cinq dossiers à l'agenda 2012-2013 de Thierry Repentin
Deux jours de conférence sociale. Huit heures de concertation. Et cinq axes de travail portés à l'agenda de Thierry Repentin pour 2012-2013, comme ce dernier l'a indiqué à l'occasion d'un entretien accordé à L'Inffo à la sortie de la table ronde consacrée à la formation professionnelle.
“Une table ronde marquée par un fort appétit de dialogue", a salué le ministre de la Formation professionnelle et de l'Apprentissage. Et si les discussions ont été l'occasion de quelques haussements de ton, c'est cependant sous les applaudissements que se seront achevés les débats. Un signe “encourageant", pour Thierry Repentin.
Pas de grande réforme de la formation, donc, mais, en revanche, “un plan d'urgence pour la formation des demandeurs d'emploi sera lancé dès la rentrée", a-t-il annoncé avant de détailler les autres orientations d'un agenda dont l'échéance a, pour l'instant, été fixée au premier trimestre 2013. Outre ce plan d'urgence, des chantiers seront ouverts en matière d'accès des jeunes à la formation, ainsi que de lutte contre l'illettrisme. Quant au grand service public de l'orientation, développé depuis 2009, il a vocation à être renforcé. “Ce service de l'orientation existe, mais il manque encore de corps", a jugé Thierry Repentin, favorable au projet de constitution d'une base de données nationale en ligne. Cinquième chantier, la constitution du fameux “compte individuel de formation" promis par François Hollande. Si cette dénomination reste, pour l'instant, provisoire, le ministre compte missionner rapidement le Conseil national de la formation tout au long de la vie (CNFPTLV) afin que celui rende un rapport au premier trimestre 2013 sur les modalités de ce nouveau droit. “Un droit qui ne passera pas par une spoliation des fonds consacrés au Dif et au Cif !", a-t-il tenu à préciser.
Dans l'immédiat, le ministre de la Formation s'est voulu rassurant à l'égard des partenaires sociaux. S'il a laissé le soin à Jean-Marc Ayrault d'annoncer, à la tribune du Conseil économique, social et environnemental, qu'aucune nouvelle ponction ne serait opérée sur le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, c'est en personne que Thierry Repentin s'est engagé à consulter les représentants des organisations d'employeurs et de salariés avant le début de toute discussion relatives à “l'acte III de la décentralisation". Une manière d'indiquer aux partenaires sociaux qu'aucune régionalisation du FPSPP n'était à l'étude. “Les Régions peuvent cependant constituer des espaces de diagnostic partagé. Dans ce cadre, des contractualisations entre Fonds paritaire et Conseils régionaux peuvent être envisagés dans le cadre d'objectifs particuliers." Autre signe de la main tendue à l'endroit des représentants des employés, des employeurs et des collectivités, Thierry Repentin a tenu à organiser, en fin de journée, une réunion exceptionnelle d'urgence consacrée à l'avenir de l'Afpa.
Benjamin d'Alguerre
La “feuille de route sociale" détaillée par Jean-Marc Ayrault
Le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) ne sera plus ponctionné et “l'État mettra tout en œuvre pour assurer l'avenir de l'Afpa". Deux décisions énoncées par Jean-Marc Ayrault le 10 juillet, en conclusion de la conférence. Il a aussi estimé qu'il n'était pas nécessaire d'élaborer une nouvelle grande réforme de la formation professionnelle.
Le Premier ministre a dressé la feuille de route des mois qui viennent, en y associant les partenaires sociaux. “L'accès à l'emploi et la qualité du travail doivent être menés de front", a-t-il indiqué, avant de détailler les mesures qu'il souhaite voir aboutir, et en particulier les modalités et le calendrier du contrat de génération et des emplois d'avenir, annoncés par le candidat Hollande.
La mise en œuvre des emplois d'avenir est désormais une solution qui devrait voir le jour à court terme pour favoriser l'insertion professionnelle des jeunes faiblement qualifiés. Le gouvernement “conduira au cours de l'été une consultation des partenaires sociaux et des acteurs territoriaux" en vue de propositions qui pourraient être votées “dès la rentrée parlementaire d'octobre". De même, pour le “double objectif d'insertion professionnelle durable des jeunes et de maintien dans l'emploi des salariés seniors", le contrat de génération fera l'objet d'une négociation au niveau national interprofessionnel “d'ici la fin 2012" en vue de définir ses modalités pour une mise en place en 2013. Le Premier ministre s'appuiera sur les négociations de branche et d'entreprises, le dispositif devant notamment être modulé selon les tailles des entreprises. Les acteurs de la formation professionnelle seront évidemment concernés par ce contrat de génération qui devrait nécessiter de nombreux volets, à commencer par le tutorat.
En revanche, toute la question était de savoir quelle suite allait être donnée à la négociation “compétitivité emploi" initiée en février dernier, sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Jean-Marc Ayrault a été très clair : “Elle n'est plus à l'ordre du jour." Conscient de la précarisation et des licenciements massifs qui se profilent dans les entreprises de toutes tailles et notamment dans le secteur industriel, le Premier ministre a choisi de mettre en avant “une nouvelle démarche pour la sécurisation de l'emploi" qui devrait aboutir à la fin du premier trimestre 2013 et se déclinera en deux volets : accompagner les mutations économiques des entreprises et lutter contre la précarité de l'emploi. Pour le premier aspect, Louis Gallois (commissaire général à l'investissement, ancien président du comité exécutif d'EADS) sera chargé d'une mission sur la compétitivité des entreprises dans le but de préparer la mise en œuvre d'actions concrètes pour la fin 2012. En ce qui concerne le deuxième volet, Jean-Marc Ayrault a choisi de lutter contre les “CDD, intérim, temps partiel subi" par la renégociation de la convention d'assurance-chômage.
Le ministre du Travail, Michel Sapin, a estimé que cette négociation offrait des possibilités considérables aux organisations patronales et syndicales. En fait, la question des licenciements dits “boursiers" arriveront très rapidement sur la table des négociations. Et subsidiairement, une autre question se posera inévitablement : le gouvernement devra-t-il légiférer sur ces licenciements ?
Claire Padych
Le soulagement des partenaires sociaux
“L'assurance que le gouvernement ne touchera non seulement pas au Fonds en lui-même, mais également au paritarisme. C'est une décision de nature à inspirer la confiance." Telle est la première réaction de Thierry Lepaon, secrétaire confédéral de la CGT, suite au discours du Premier ministre, prononcé à l'issue de la conférence sociale. “Dans ces conditions, le taux de collecte pourra s'élever à 13 %"[ 1 ]Selon la loi, les partenaires sociaux doivent proposer chaque année un taux de contribution compris entre 5 % et 13 %. , s'est réjouit le représentant de la CGT. “En cas de non-ponction, les partenaires sociaux sont prêts à négocier la prochaine convention-cadre triennale dès septembre 2012", expliquait Jean-Pierre Therry, secrétaire confédéral CFTC. “Nous sommes dans une dynamique qui pourrait s'annoncer vertueuse", s'est félicité de son côté François Hommeril, secrétaire national de la CFE-CGC en charge du pôle formation tout au long de la vie. Quant à Alain Cordesse, président de l'Usgeres, il juge cette annonce comme “un signe très fort", propre à “faire retrouver la confiance aux partenaires sociaux".
Aurélie Gerlach
Jean-Marc Ayrault a souhaité que les participants à la conférence sociale puissent travailler sur le “chantier ambitieux" du congé individuel de formation (Cif) et sur la portabilité des droits à la formation, dès septembre 2012. Il a plaidé pour que la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) soit à l'origine de négociations régulières entre les partenaires sociaux sur les questions de formation en entreprise. Enfin, le Premier ministre a demandé que les partenaires sociaux soient associés à la prochaine étape de décentralisation.
Après deux jours de conférence sociale autour de la formation professionnelle, les acteurs vont donc devoir très vite se mettre au travail pour respecter le calendrier très serré que leur a imposé Jean-Marc Ayrault.
Les points saillants de la table ronde "formation" selon Vincent Merle, son facilitateur
“Les échanges ont permis de mener à des constats, avec une expression très libre, et d'identifier des enjeux communs", déclare Vincent Merle dans sa synthèse de la table ronde consacrée au développement des compétences et à la formation tout au long de la vie, organisée dans le cadre de la conférence sociale des 9 et 10 juillet 2012. Désigné comme “facilitateur" de cette table ronde, Vincent Merle, titulaire de la chaire “Travail, emploi et acquisitions professionnelles" au Conservatoire national des arts et métiers (Cnam), enseignant en sociologie et actuel président d'Aquitaine Cap Métiers, a en effet été chargé, tout comme les facilitateurs des autres tables rondes, de pointer les temps forts des échanges, les points de consensus, mais également les interrogations des participants. Il indique ainsi que selon les participants, la formation professionnelle trouve tout son sens en cette période de crise économique, et “doit permettre de mieux répondre aux différents défis rappelés par le président de la République sur la compétitivité"..
Stabiliser les dispositifs
“Les acteurs ont exposé le besoin d'inscrire les dispositifs dans une plus grande stabilité. Ils ont rappelé que nous sortions d'une réforme de la formation professionnelle, concrétisée par la loi de 2009. Celle-ci a conduit à modifier les règles du jeu et les équilibres entre les acteurs", souligne le facilitateur. Ainsi, les participants ont considéré qu'une part de la complexité du système provenait de la superposition des dispositifs. Le sentiment général étant qu'il “faut d'abord faire évoluer la reforme récente", et qu'une “amélioration de la lisibilité du système" est nécessaire.
Cinq thèmes ont été abordés, rappelle Vincent Merle : la qualification des jeunes, la formation des demandeurs d'emploi, la formation des salariés, la création d'un compte de formation individuel et enfin, les coopérations locales. “La formation apparaît plus en plus comme un élément de la sécurisation professionnelle des individus, et les participants ont mis en avant le fait qu'elle doit aussi favoriser la progression professionnelle. À cet égard, les partenaires sociaux ont rappelé qu'ils ont inscrit, dans leur Ani de 2009, la progression d'un niveau de qualification au cours de la carrière professionnelle."
La reprise d'un autre thème fort a été notée par Vincent Merle : le désir de voir chaque individu être acteur de son propre parcours, au sein d'un système dans lequel la formation ne serait pas simplement prescrite. “Pour être acteur, il est nécessaire de franchir une étape, celle de l'accès à un premier niveau de qualification. Les partenaires sociaux ont rappelé qu'ils demandaient de longue date aux pouvoirs publics de mettre en place une formation initiale différée." La création d'un compte individuel de formation a été abordée, les acteurs ayant toutefois souligné que celui-ci devait s'inscrire dans les cadre des conventions collectives.
Selon Vincent Merle, un autre point de convergence s'est dégagé : celui de la reconnaissance de l'échelon régional, de l'idée que “les bonnes procédures ne viennent pas forcément d'en haut, que l'État doit apprendre à travailler avec les Régions, qui ont une forte capacité d'ouverture". Les partenaires sociaux ont à cet égard insisté sur la contractualisation comme cadre de coopération.
Enfin, parmi les thématiques mises en avant par les acteurs, Vincent Merle a été surpris du consensus qui s'est dessiné autour de l'enjeu orientation, “qui a été présenté comme majeur", la réforme étant jugée encore “inaccomplie". La mobilisation en faveur de politiques pour lutter contre l'illettrisme a également été frappé le facilitateur de la table ronde.
Aurélie Gerlach
Le FPSPP, sous le regard des organisations patronales
Lors de la table ronde consacrée à la formation, “les organisations représentatives se sont unanimement exprimées en faveur d'un fonctionnement du FPSPP tel que prévu par la loi du 24 novembre 2009, qui l'a instauré", a indiqué le vice-président du Fonds, Francis Da Costa, qui participait en tant que président de la commission formation du Medef. “Aucune organisation présente ne souhaitait une décentralisation ou une déconcentration du FPSPP. Seule l'Association des Régions de France a exprimé le vœu d'un partenariat renforcé." L'ARF, dont les deux représentants, René Souchon (président du Conseil régional d'Auvergne) et François Bonneau (président du Conseil régional du Centre), n'ont pas exprimé de revendication quant à une régionalisation accrue des fonds de la formation.
D'ailleurs, pour le président de la commission formation de la CGPME, Jean-Michel Pottier, le FPSPP ne saurait être davantage régionalisé sans toucher aux textes fondateurs. “Les agréments des Opca et les signatures de contrats d'objectifs et de moyens sont contractualisés au niveau national. Sans modification de la loi, il n'est, de toutes façons, pas possible de procéder autrement, quant bien même le Fonds peut lancer des appels à projets territoriaux." Mais pour l'heure, la CGPME concentre davantage son attention sur la négociation de septembre prochain, consacrée à la prochaine convention-cadre triennale sur le taux de contribution des Opca au FPSPP.
Benjamin d'Alguerre
“Repartir sur de bonnes bases"
“Globalement positifs." C'est ainsi que Stéphane Lardy, secrétaire confédéral en charge de l'emploi et de la formation professionnelle à FO, juge les échanges qui se sont tenus dans le cadre de la table ronde. “La méthode est intéressante et nous a permis de parler de sujets de fond. De plus nous avons apprécié que le Premier ministre annonce que la ponction n'aurait pas lieu. C'est un acte majeur, qui permet de redonner confiance aux partenaires sociaux et de repartir sur de bonnes bases. Nous allons pouvoir travailler sur la convention-cadre du FPSPP !"
D'autre part, Stéphane Lardy prend note que l'État a évoqué la possibilité d'une contractualisation entre les Régions et le FPSPP.
“Cette possibilité est inscrite dans notre Ani du 7 janvier 2009, mais l'État ne nous à jamais permis de la mettre en œuvre dans le cadre des appels à projets du Fonds. Nous pouvons envisager de contractualiser avec les Régions sur des thèmes tels que l'illettrisme ou la reconversion des chômeurs. Il faudrait que le FPSPP puisse intervenir directement dans les territoires, c'est ce qui s'appellerait de la coopération. Pas besoin pour cela de passer par des fonds de sécurisation régionaux !" Cependant, le secrétaire confédéral FO n'est pas en faveur d'une entrée des Régions au CA du FPSPP.
Le compte individuel de formation, que souhaite mettre en place le gouvernement, occasionne de nombreuses interrogations. “Qui gérera ce compte ? Quels types de financements seront mobilisés ? Le Cif, le Dif, une partie du plan ou encore une cotisation spécifique du salarié ? À quel type de certification cela doit-il mener ? À quel moment de la carrière ? Quel sera l'effet levier ?" Pour le secrétaire confédéral FO, une chose est sure : “Si ce droit n'est pas garanti collectivement, il renforcera les inégalités d'accès."
La formation des salariés et le plan de formation ont également constitué un thème fort des échanges. Le représentant FO a affirmé, au cours de la table ronde, que son organisation était favorable à une négociation du plan de formation au sein de l'entreprise − et non plus une simple consultation du CE. “Les représentants du personnel seraient être en mesure de défendre les salariés qui n'ont pas accès à la formation."
Aurélie Gerlach
L'accent sur la sécurisation des parcours
Tel était “l'objectif global" de la CFDT en matière de formation, lors de la conférence sociale : la sécurisation des parcours professionnels. Avec le souhait que soit programmée “une évaluation de l'ensemble des dispositifs, de façon à pouvoir produire un diagnostic partagé de ce qu'ont pu produire les Ani de 2003 et 2009", nous indique Marie-Andrée Seguin, secrétaire nationale en charge des questions de formation.
S'agissant des principales revendications, la CFDT a distingué les “mesures urgentes" relatives aux demandeurs d'emploi et aux jeunes et actifs sans qualification, des “réflexions à approfondir" en matière de dialogue social dans l'entreprise, droit individuel à la formation et gouvernance de la formation professionnelle.
Pour les demandeurs d'emploi, Marie-Andrée Seguin préconise “le raccourcissement des délais d'entrée en formation, la mobilisation maximale de l'outil de formation de l'Afpa et l'orientation des financements disponibles vers des actions de formation concernant l'acquisition des savoirs de base et la lutte contre l'illettrisme". Autre urgence, les jeunes qui sortent sans qualification du système scolaire, qui nécessitent de “travailler la question de l'orientation et de l'alternance", mais aussi les actifs sans qualification, qui “doivent pouvoir obtenir un droit d'accès à des formations qualifiantes" vers des “emplois de qualité" liés aux “mutations" en cours.
Quant aux sujets de réflexion proposés par la CFDT, y figure l'introduction de la formation comme objet de dialogue social dans l'entreprise, “en instaurant une concertation et une négociation au sein de l'entreprise sur les politiques de formation".
Nicolas Deguerry
Pour "Un grand service public de l'orientation"
“Créer un grand service public national de l'orientation et repenser la formation initiale afin de faire en sorte que la formation professionnelle devienne une voie classique pour les jeunes, et non plus un choix par défaut." Telles sont les idées fortes dont l'UPA s'est faite porteuse les 9 et 10 juillet. Un service public de l'orientation, donc, qui serait idéalement tripartite, puisqu'il devrait impliquer les partenaires sociaux aux négociations en plus des Régions et de l'État, comme l'a expliqué Pierre Burban, secrétaire national de l'organisation patronale, à L'Inffo. “Beaucoup de métiers de l'artisanat demeurent en tension en dépit des chiffres du chômage", a-t-il rappelé, prenant l'exemple du secteur du bâtiment, où les besoins en recrutement oscillent entre 90 000 et 130 000 places. “Il est nécessaire d'améliorer l'adéquation entre l'offre et la demande." D'ailleurs, “les efforts effectués par l'ancien gouvernement en faveur de l'apprentissage ne doivent pas être abandonnés", a averti Pierre Burban.
Des propositions sociales pour septembre
Formation initiale différée, compte individuel de formation, CCREFP, emplois d'avenir, contrats de génération… l'été s'annonce studieux pour l'Union nationale des syndicats autonomes (Unsa) qui, à la suite de la conférence sociale du Palais d'Iéna, prépare ses propositions en matière de formation et d'emploi avec pour horizon la prochaine rentrée sociale.
Au sujet du “compte individuel de formation" (quel que soit le nom que ce dispositif sera amené à porter dans l'avenir) qui ne serait pas attaché au contrat de travail, mais au salarié lui-même, tout au long de sa vie professionnelle, “François Hollande avait évoqué l'idée d'un crédit de vingt heures par an durant quarante ans, soit un total de huit cents heures par salarié au cours d'une carrière professionnelle", rappelle Jean-Marie Truffat, secrétaire national en charge de la formation. Un sujet qui n'aura pas été tranché au palais d'Iéna, mais que l'Unsa espère voir intégré aux réflexions du groupe de travail proposé par le Premier ministre qui devra rendre ses premières conclusions dès la rentrée de septembre.
Cependant, le déploiement d'un tel compte individuel de formation, tout au long de la vie empiète fortement sur le périmètre déjà occupé par le Dif. Se propose-t-on de réinventer un dispositif déjà existant ? “C'est plus complexe. L'une des pistes qu'explorera le groupe de travail consistera justement à réfléchir sur les outils de mutualisation extérieure à mettre en œuvre pour financer et déployer tant la formation initiale différée que le compte individuel de formation."
Quant aux “emplois d'avenir", il en a été question autour de la table ronde présidée par Michel Sapin. Pour Jean Grosset, secrétaire général adjoint de l'Unsa, ces 80 000 emplois aidés promis “représentent des mesures d'urgence, de courte durée et dans un contexte de crise". Ce qui, à ses yeux, ne signifie pas qu'ils ne peuvent être pérennisés, ni donner lieu à des actions de formation. Les “contrats de génération", pour leur part, semblent “s'inscrire dans le même état d'esprit que ce qui existe déjà en matière d'alternance et d'apprentissage".
Benjamin d'Alguerre
Les employeurs du “hors-champ" souhaitent participer aux négociations
C'est côte à côte que l'Usgeres (Union de syndicats et groupements d'employeurs représentatifs dans l'économie sociale) et le Syneas (Syndicat des employeurs associatifs de l'action sociale et médico-sociale) s'étaient rendus au palais d'Iéna, les 9 et 10 juillet. Et c'est à nouveau de concert que ces deux organisations comptent élaborer une feuille de route sociale commune.
Une première invitation dont les délégués espèrent qu'elle puisse constituer le prélude à une meilleure reconnaissance des employeurs de l'économie sociale dans le champ de la formation, via, notamment, la possibilité pour eux, à terme, de participer aux réunions du FPSPP, mais aussi du Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie (CNFPTLV), voire, en régions, aux débats animés au sein des Comités de coordination régionaux de l'emploi et de la formation professionnelle (CCREFP). “Le secteur du hors-champ, et notamment celui du médico-social, présente des particularismes qui ne sont pas assez pris en compte par les dispositifs existants", explique Guy Courtois, vice-président du Syneas. Dans ces conditions, l'Usgeres et le Syneas ont fait savoir qu'ils entendaient “contribuer, au-delà du diagnostic partagé, aux axes de travail présentés par le Premier ministre sur l'ensemble des thématiques sociales à l'issue de la conférence, et en priorité sur l'emploi et la formation professionnelle".
Un troisième Opca interprofessionnel ?
Et Alain Cordesse, président de l'Usgeres, d'ajouter : “Le Premier ministre a salué la volonté des organisations patronales représentatives d'ouvrir le sujet de la représentativité des employeurs et de formuler des propositions. Cela nous paraît tout à fait important et nous sommes prêts à participer à cette réflexion." Le hors-champ sera-t-il susceptible d'intégrer les négociations côté employeurs ? “Lors de la conférence sociale, la CFTC a d'ailleurs, par la voix de son secrétaire confédéral en charge des questions de formation, Jean-Pierre Therry, ouvert la possibilité de voir se constituer un troisième Opca interprofessionnel, concentré, justement, sur l'économie sociale et solidaire. “Une idée qu'il nous faudra mûrement réfléchir", souligne Guy Courtois, pour qui la création d'un tel organisme collecteur devrait passer par la fusion d'Unifaf, Uniformation et l'Opca PL.
Benjamin d'Alguerre
Notes
1. | ↑ | Selon la loi, les partenaires sociaux doivent proposer chaque année un taux de contribution compris entre 5 % et 13 %. |