Moyens alloués à l'expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée » (question parlementaire)

Malgré quelques fluctuations du taux de contribution au développement de l'emploi celui-ci reste dans le haut de la fourchette et n'induit pas une baisse du budget de l'expérimentation.

Par - Le 01 décembre 2023.

Question de Mme Corinne Féret (Calvados - SER)

(JO Sénat du 07/09/2023, page 5250)

Mme Corinne Féret attire l'attention de M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion sur les moyens alloués par l'État à l'expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée » (TZCLD).
En effet, l'arrêté du 31 juillet 2023, fixant le niveau de financement des emplois créés dans le cadre de la loi n° 2020-1577 du 14 décembre 2020 relative au renforcement de l'inclusion dans l'emploi par l'activité économique et à l'expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée », prévoit une baisse des moyens alloués par l'État à cette dernière. Ainsi, la contribution au développement de l'emploi passerait de 102 % à 95 % du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) à partir du 1er octobre prochain. Cette décision suscite l'incompréhension parmi les acteurs de l'expérimentation, particulièrement de ses membres fondateurs (ATD Quart Monde, Emmaüs France, le secours catholique, la fédération des acteurs de la solidarité et le Pacte civique) et de ses partenaires (le Fonds ETCLD, APF France Handicap, Coorace et Solidarités nouvelles face au chômage).
En réduisant, cette année, de plusieurs millions d'euros, le financement des emplois créés grâce au projet TZCLD, c'est tout le modèle économique des entreprises à but d'emploi qui s'en trouvera fragilisé. Plus grave encore, dans certains territoires, cette décision aura pour conséquence une baisse, voire un gel, des embauches prévues au détriment des personnes éloignées durablement du monde du travail, mobilisées pour accéder enfin à un emploi.
C'est d'autant plus incompréhensible que cela va à rebours d'une puissante dynamique européenne inspirée par l'expérimentation française. Plusieurs territoires dans de nombreux pays européens (Belgique, Allemagne, Italie, Autriche, etc.) se lancent dans des démarches semblables au projet français. Différents avis et rapports récents du comité européen des régions et du rapporteur spécial de l'ONU sur les droits de l'homme et l'extrême pauvreté recommandent d'ailleurs la mise en place d'initiatives locales contre le chômage de longue durée similaires à ce qui existe dans notre pays.
Dans le Calvados, sur le territoire de Colombelles, où l'expérimentation TZCLD est menée depuis 2016, personne ne pourrait comprendre une telle baisse des moyens nécessaires pour mettre fin au fléau que constitue la privation durable d'emploi. Ceci, d'autant plus, à l'heure où l'objectif du « plein emploi » est affiché partout par le Président de la République et le Gouvernement. Ce faisant, elle demande à l'État de maintenir le niveau de la contribution au développement de l'emploi à hauteur de 102 % du SMIC. Plus globalement, elle souhaiterait qu'il s'engage durablement à soutenir financièrement l'expérimentation.

Réponse du Ministère du travail, du plein emploi et de l'insertion publiée le 30/11/2023

( - page 6693)

La loi du 14 décembre 2020 relative au renforcement de l'inclusion dans l'emploi par l'activité économique et à l'expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée » a prolongé, pour une durée de cinq ans l'expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée ». Elle est mise en place dans soixante territoires, dont les dix territoires habilités dans le cadre de la loi du 29 février 2016. A ce jour, 58 territoires sont habilités, La possibilité d'augmenter le nombre de territoires habilités au-delà de soixante est ouverte, à titre dérogatoire, par décret en Conseil d'État. Cette expérimentation fait l'objet d'une évaluation conduite par un comité scientifique, composé de personnalités reconnues pour leurs compétences académiques et de représentants des services des études et des statistiques des personnes publiques intéressées. Ce comité scientifique, présidé par M. Yannick L'Horty, a été installé en juin 2023. Le rapport d'évaluation sera rendu en 2025. L'expérimentation est mise en place avec le concours financier de l'Etat et des départements concernés ainsi que des autres collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale volontaires mentionnés au Il de l'article 9 de la loi du 14 décembre 2020 et d'organismes publics et privés volontaires, susceptibles de tirer un bénéfice financier de ces embauches. L'expérimentation a bénéficié d'un soutien conséquent et continu de l'Etat : entre 2017 et 2022, le financement de l'Etat est passé de 14,9 M€ en 2017 à 32,8 M€ en 2022. Entre 2021 et 2023 l'augmentation des crédits votés a été de 57 % pour atteindre 44,94 M€, afin de financer en prévisionnel à fin 2023, un volume de 2 276 salariés en Equivalents Temps Plein (hors financements des Conseils Départementaux et autres partenaires). L'Etat apporte son concours financier à plusieurs titres. Il finance tout d'abord une dotation d'amorçage pour chaque ETP nouvellement créé, à hauteur d'un taux plafond de 30% du SMIC horaire, mais aussi un Complément Temporaire d'Equilibre (CTE) en cas de déséquilibre financier des structures et enfin une Contribution au Développement de l'Emploi (CDE). Un décret fixe la Contribution au Développement de l'Emploi (CDE) dans une fourchette de 53 à 102 % du SMIC par emploi. Elle était à 95 % avant la crise Covid, par l'arrêté du 26 décembre 2018. Elle a été montée à 102 % durant la crise Covid, soit le maximum, par un arrêté du 12 juillet 2021. Par un arrêté du 31 juillet 2023 elle a de nouveau été fixée à 95 % à compter du 1er octobre 2023, soit le même niveau qu'en 2019. Le taux reste dans le haut de la fourchette et n'induit pas une baisse du budget de l'expérimentation. En effet pour 2024, le budget dédié à cette expérimentation est porté dans le projet de loi de finances à hauteur de 68,6 ME, représentant une augmentation de 53% des crédits inscrits dans la loi de finances pour 2023, ce qui constitue la plus forte croissance du budget du ministère du travail.

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