Francis

Da Costa

À l'occasion de son assemblée générale annuelle, le 25 janvier à Paris, le Medef a rendu public son livre blanc Besoin d'air, diagnostic et “projet de société" écrit à partir des contributions de près de 50 000 chefs d'entreprise. Francis Da Costa présente pour Inffo Flash les propositions de l'organisation patronale en matière de formation.

Par - Le 16 février 2007.

Inffo Flash : Comme l'ensemble des acteurs économiques et politiques, le Medef prône un renforcement de la formation tout au long de la vie. L'Ani et la loi de 2004 ne donnent-ils pas assez d'outils pour répondre aux besoins ?

Francis Da Costa : Les outils sont là et les premiers résultats sont encourageants. L'Ani propose une logique de parcours conjuguée à une logique de projet professionnel et économique. C'est le croisement entre deux axes : l'entreprise et son développement, l'individu et son projet, car la formation, le développement des compétences, doivent conduire à la pérennité des entreprises, au développement de l'individu, au maintien de l'employabilité pour les salariés les plus fragiles, in fine à la croissance économique. La phase de “co-construction" entre l'employeur et le salarié est une étape capitale pour la “co-initiative" à laquelle le Medef est attaché. La situation professionnelle est reconnue comme productrice de formation.

Moins de trois ans après que l'ensemble des textes légaux, réglementaires et conventionnels nécessaires à la mise en œuvre de la réforme de la formation ait été promulgué, le nombre de contrats de professionnalisation conclus ne cesse de progresser. Près de 143 000 l'ont été en 2006, soit une progression de 50 % par rapport à 2005. Dans le même temps, le nombre de contrats d'apprentissage a lui aussi très sensiblement augmenté (+ 10 % en 2006). Quant au Dif, il faut qu'entreprises et salariés s'approprient ce nouveau dispositif créé voici tout juste trois ans. Selon une enquête, 3 % des 15 millions de salariés du secteur privé auraient déposé une demande de Dif en 2005, soit 500 000 personnes. Enfin, la période de professionnalisation se développe. Le dispositif a concerné plus de 240 000 salariés en 2005, près de 330 000 en 2006.

Inffo Flash : Le Medef souhaite que la réflexion sur la formation continue soit moins portée sur le financement ou l'organisation que sur son contenu. Que proposez-vous concrètement ?

Francis Da Costa : Aujourd'hui, il nous faut continuer à développer les passerelles entre la formation initiale et la formation continue. à titre d'exemple, le principe de la formation différée est inscrit dans l'Ani. Il s'agit de donner un “capital temps" permettant une reprise d'études à l'âge adulte. Par ailleurs, la VAE est un lien entre formation initiale et validation des compétences acquises en situation professionnelle. Nous serons vigilants sur sa mise en œuvre.

Que doit-on faire pour mieux adapter leurs formations aux besoins des entreprises ? Agir en amont, afin d'éviter que 150 000 jeunes sortent chaque année sans qualification ni diplôme de l'enseignement secondaire et que 100 000 jeunes sortent sans diplôme de l'enseignement supérieur. Le dispositif d'orientation dans notre pays est un échec reconnu unanimement, mais que personne n'est arrivé à réformer jusqu'à présent. Il ne s'agit pas de se pencher sur l'orientation vers une formation, mais de l'orientation vers un métier et un emploi, la formation étant un moyen et non un objectif en soi. L'orientation tout au long de la vie doit être considérée comme une priorité. Les observatoires prospectifs des métiers et des qualifications mis en place progressivement dans les branches professionnelles et au niveau interprofessionnel permettront aussi d'apporter des informations utiles à l'orientation.

En outre, la professionnalisation doit être développée à tous les niveaux : poursuivre, avec l'appui des Conseils régionaux et de l'État, le développement de l'apprentissage du CAP aux diplômes de l'enseignement supérieur, dans tous les secteurs d'activités et dans les entreprises de toutes tailles ; et développer le nombre de contrats de professionnalisation en faveur des jeunes.

C'est le sens de la campagne de promotion de l'alternance menée par le Medef en 2006 et en 2007 : notamment, renforcer l'implication du Medef et des branches dans les comités d'expertise et de suivi des licences et des masters professionnels ; favoriser les liens entre la recherche et les PME, via un développement des conventions industrielles de formation par la recherche (Cifre).

Enfin, il est indispensable de développer le nombre de stages en entreprise afin de familiariser les jeunes avec le monde du travail. Le Medef a été à l'initiative d'une charte des stages et il encourage les entreprises à l'appliquer. Par ailleurs, la “semaine école-entreprise" connaît un succès croissant.

Inffo Flash : Vous souhaitez le renforcement du poids et de la responsabilité des syndicats. Quel rôle le Medef souhaite-t-il leur faire jouer ?

Francis Da Costa : Le dialogue social en France ne cesse de faire la preuve de son dynamisme. En 2005, 44 accords ont été conclus au niveau interprofessionnel, 1 144 dans les branches et 19 300 dans les entreprises. Le Medef souhaite que ce dialogue s'amplifie. C'est pourquoi il a proposé la “délibération sociale", nouvelle méthode de concertation qui devrait prévaloir dans le renouveau du dialogue social. En outre, pour bien fonctionner, les entreprises ont besoin de règles adaptées à leurs spécificités et aux attentes de leur personnel : la négociation collective est la méthode la mieux adaptée pour élaborer de telles règles. Enfin, une priorité est reconnue à la négociation collective dans le cadre de la loi de modernisation du dialogue social, adoptée par le Parlement. Aucun projet de réforme dans le domaine social ne pourra être élaboré sans concertation préalable avec les partenaires sociaux. Il est nécessaire de conforter cette reconnaissance de la place du dialogue social en inscrivant son rôle dans la Constitution, de sorte que son autonomie soit pleinement garantie.

Propos recueillis par Knock Billy