Carle

Inffo flash : Après les multiples auditions réalisées par la Mission sénatoriale, comment avez-vous perçu le monde de la formation professionnelle ?

Jean-Claude Carle : Je résumerai mon sentiment en un seul mot : complexité, avec un grand “C". La formation professionnelle m'est apparue comme un domaine complexe où, comme l'a affirmé Jacques Delors, il faut être polytechnicien ou énarque pour y comprendre quelque chose. S'ajoutent des corporatismes forts, certes essentiels, mais qui montrent leurs limites et impliquent ce que j'appelle le 3e “C", à savoir le cloisonnement : en d'autres termes, on ne sait pas ce que fait le voisin, c'est la politique de la “patate chaude". D'ailleurs, au cours des auditions, certains interlocuteurs ont eux-mêmes reconnu que c'est un domaine complexe, peu lisible et donc pas efficace. Je dirai que c'est un régal pour les initiés mais que cela ne fait pas le bonheur de ceux qui doivent en profiter. La complexité du système fait que se former est un parcours du combattant, à la fois pour les salariés et pour les entreprises, au point que beaucoup d'entre elles préfèrent s'acquitter de la contribution, comme pour se débarrasser du problème. Je souhaite qu'on sorte de cette logique.

Inffo flash : Quelle est selon vous la préconisation la plus importante de votre rapport ?

Jean-Claude Carle : Pour moi, il y a deux préconisations fondamentales : l'une concernant la formation initiale et l'autre la formation continue, les deux systèmes étant très étroitement liés. En effet, on demande à la formation continue de faire ce que la formation initiale n'a pas réussi à faire. Donc, pour moi, la première préconisation importante est celle qui concerne le PRDF, à savoir le rendre plus prescriptif pour qu'il ait une valeur d'engagement pour les signataires : la Région, l'Education nationale et, partenaire fondamental, le monde professionnel. L'autre préconisation concerne le compte épargne-formation qui devra suivre la personne depuis sa sortie du système scolaire, dans sa vie professionnelle et même sa retraite. Ce dispositif s'appuierait sur un DIF renforcé et transférable dans le sens d'une meilleure sécurisation.

Inffo flash : Quelles vont être les suites données au rapport ?

Jean-Claude Carle : Le rapport a été remis au Premier ministre qui a confirmé que la formation professionnelle sera un chantier prioritaire pour 2008. La commission propose, c'est à l'exécutif de disposer ; je souhaite bien évidemment que certaines de nos propositions soient reprises, en tout cas je suis disponible pour assurer le service après-vente. Par ailleurs, nous nous sommes prononcés pour qu'un chef de file « formation professionnelle" puisse assurer la coordination et avoir une action d'arbitrage. La solution serait donc que quelqu'un soit nommé et rattaché au Premier ministre, tel un ministre ou un secrétaire d'État. Il faut en la matière une gouvernance claire, à l'État d'assurer l'équité.

Propos recueillis par Sandrine Guédon-Zadunayski