Jean-Claude

Tricoche

À l'occasion du colloque organisé par l'Unsa le 23 janvier (voir également à ce propos le n° 695 d'Inffo Flash, page 6), Inffo Flash a demandé à Jean-Claude Tricoche, secrétaire national de l'Unsa, de revenir sur les principaux points du texte adopté par le conseil national de son organisation sur la sécurisation des parcours professionnels.

Par - Le 26 janvier 2007.

Inffo Flash : Pourquoi la sécurisation des parcours vous paraît-elle essentielle ?

Jean-Claude Tricoche : Face au développement de la flexibilité dans l'organisation du travail, les outils traditionnels de protection du salariat se révèlent insuffisants ou inadaptés. Pour l'Unsa, il est nécessaire de construire un véritable “filet de protection professionnelle et sociale" pour les salariés, en impliquant aussi les entreprises. Pour organiser un véritable droit à la sécurité et à la progression professionnelles, notre organisation propose d'agir sur trois dimensions essentielles :

  1. les garanties collectives associées au contrat de travail, avec notamment un transfert des droits sociaux en cas de rupture du contrat de travail ;
  2. la sécurisation de l'entrée des jeunes dans l'emploi (il s'agit d'assurer la prévention par un accompagnement vers l'insertion) ;
  3. l'accroissement de l'employabilité et des possibilités de promotion sociale par le droit pour tous à la formation et à la validation des acquis de l'expérience.

Inffo Flash : Quelles actions préconisez-vous concrètement pour les jeunes ?

Jean-Claude Tricoche : Pour éviter la multiplication des dispositifs d'insertion et leur faible efficacité, il faut offrir à chaque jeune qui rencontre des difficultés d'entrée dans l'emploi un parcours accompagné d'insertion, associant orientation et formation en alternance et favorisant une première expérience professionnelle. Pour plus d'efficacité, notre syndicat préconise d'articuler l'action de l'ensemble des acteurs de l'insertion sur la base d'un guichet unique. Pour favoriser la sécurisation des parcours professionnels des jeunes à l'issue d'une première expérience professionnelle, l'Unsa propose la création d'un droit différé à la formation financé par les pouvoirs publics et inversement proportionnel à la durée de la formation initiale, sur la base de l'accord national interprofessionnel (Ani) du 20 septembre 2003.

Inffo Flash : En matière d'anticipation, quel rôle devraient jouer les entreprises ?

Jean-Claude Tricoche : La gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) tarde à se mettre en place dans les entreprises. Elle est pourtant indispensable pour préparer les mobilités et donner des perspectives professionnelles aux salariés et maintenir leur employabilité. Pour l'Unsa, l'article 72 de la loi de cohésion sociale du 18 janvier 2005 [ 1 ]Obligation de négociation triennale dans les entreprises d'au moins 300 salariés, notamment sur la mise en place d'un dispositif de GPEC . devrait contribuer à une évolution positive, sous réserve que soit abaissé le seuil d'application et que les petites entreprises disposent d'appuis territoriaux appropriés. Les mobilités peuvent offrir des opportunités d'évolution professionnelle ou de carrière aux salariés, encore faut-il qu'ils aient une visibilité de leur devenir et un niveau d'employabilité leur permettant de connaître et de saisir ces opportunités.

Inffo Flash : Quels droits souhaiteriez-vous pour les salariés ?

Jean-Claude Tricoche : Nous pensons qu'il faut garantir un droit individuel attaché au salarié et non à l'entreprise. L'Unsa propose un “compte individuel de temps de formation" (CITF) géré par un dispositif de mutualisation permettant la transférabilité du temps capitalisé en cas de mobilité externe à l'entreprise. La gestion de ce compte serait assurée par une caisse autonome de mutualisation nationale ou régionale. Quand le salarié est dans l'emploi, l'employeur verse une contribution à la Caisse autonome, dans le cadre de l'obligation légale ou conventionnelle. Au chômage, le salarié peut “tirer sur son compte", c'est la caisse de mutualisation qui prend en charge le coût. Au moment du retour à l'emploi, une partie du coût du capital temps formation dont dispose le salarié à son arrivée est prise en charge par la caisse autonome. Dans ce système, la caisse autonome fait office d'assurance formation en finançant les périodes de rupture, mais aussi mutualise ce risque pour qu'il soit financièrement et collectivement supportable.

Inffo Flash : Quelles propositions formulez-vous concernant les demandeurs d'emploi ?

Jean-Claude Tricoche : Il convient de souligner que seulement 3 % des salariés licenciés pour motif économique sont couverts par un plan de sauvegarde de l'emploi et, donc, par un dispositif de reconversion. Nous demandons que les dispositifs de reclassement et d'accompagnement soient ouverts à l'ensemble des salariés privés. La sécurisation des parcours professionnels dépend pour une grande part du service public de l'emploi (SPE), car la fluidité du marché du travail est un facteur de dynamisation indispensable. Un SPE rénové et unifié apporterait une contribution importante à un meilleur fonctionnement du marché du travail. L'Unsa préconise la création d'un régime général d'indemnisation du chômage servi à tous les demandeurs d'emploi.

Propos recueillis par Patricia Gautier-Moulin

Notes   [ + ]

1. Obligation de négociation triennale dans les entreprises d'au moins 300 salariés, notamment sur la mise en place d'un dispositif de GPEC .