Laurent

Beauvais

La Région a fait de l'“éco-citoyenneté en formation" l'un de ses chantiers majeurs. Laurent Beauvais[[ Élu président du Conseil régional le 3 avril 2008.
]] annonce l'organisation en mai prochain par le CNFPT et le Centre Inffo d'une journée nationale d'échanges sur ce thème.

Par - Le 29 avril 2008.

Inffo Flash - Quelles sont les grandes orientations de la politique que vous envisagez de développer en matière de formation ?

Laurent Beauvais - Je me situe dans la continuité de celles qui ont été fixées par le PRDFP, adopté à l'unanimité en février 2006 après une large phase de concertation et de consultation (CESR, CCREFP, Chambres régionales consulaires, Conseils généraux, etc.). Il comporte d'abord des orientations partagées pour la période 2006-2010 : élever le niveau général de formation et de qualification ; favoriser l'accès de tous à un premier niveau de qualification (une priorité au regard d'une région qui compte plus de 2 700 jeunes qui sortent sans qualification du système éducatif) ; veiller à la répartition territoriale de l'offre ; développer et coordonner l'information sur les métiers, sur les formations et l'orientation ; promouvoir et accompagner la
formation tout au long de la vie ; et créer les conditions d'un pilotage régional, et d'une animation territoriale et régionale. Il renforce en outre la concertation avec les services de l'État, les partenaires sociaux et les Conseils généraux, dans le respect des compétences de chacun : la Région, en tant que chef de file, doit favoriser le décloisonnement des politiques de formation professionnelle.
Il s'agit aussi de faire un effort significatif sur l'offre de formation post-bac : trop de jeunes quittent la région pour poursuivre leurs études supérieures. La diversification des filières de formation, l'ouverture de licences et de masters professionnels et la création de formations d'ingénieurs sont des priorités.

IF - À l'Assemblée régionale, la Commission FTLV s'est rapprochée de la reconversion industrielle. Et une nouvelle vice-présidence est chargée “du développement économique, du commerce, de l'artisanat, de l'emploi et de l'économie sociale et solidaire". Quel sens la Région donne-t-elle à ces changements ?

L. B. - Concernant les missions des Commissions, il convient de parler d'une nouvelle répartition. Néanmoins, le rapprochement entre l'économie
et l'emploi n'est, en effet, pas neutre.
Il doit exister, et c'était déjà le cas sous la présidence de Philippe Duron, une
articulation entre les politiques relatives au développement économique, aux reconversions industrielles et à la formation professionnelle, articulations nécessaires pour atteindre les objectifs déclinés dans le cadre du schéma régional d'aménagement du territoire, du schéma régional de développement économique et du plan régional de développement des formations professionnelles.
À titre d'illustration, la Région a mis en place début 2007 un nouveau dispositif appelé “Une formation - un emploi", qui vise un double objectif : permettre aux entreprises qui s'installent ou se développent sur le territoire régional de trouver la main-d'œuvre qualifiée répondant à leurs besoins, et favoriser l'accès à l'emploi de demandeurs d'emploi en bénéficiant d'une formation qualifiante. La Région prend en charge financièrement la formation, qui doit être certifiée, et,
parfois, la rémunération des personnes, stagiaires de la formation professionnelle. L'entreprise, quant à elle, doit s'engager à embaucher la personne formée. En 2007, 77 entreprises ont été ainsi accompagnées dans l'accroissement des compétences de leurs ressources humaines et 429 demandeurs d'emploi ont pu bénéficier d'un accès à la qualification et à l'emploi. Ces liens entre développement économique et emploi seront renforcés au travers de la politique que la Région entend mener autour de la question des mutations industrielles et des transitions professionnelles qui en découlent.
La mobilisation des acteurs économiques autour de la redynamisation de territoires ou de secteurs d'activité va de pair avec
la recherche de solutions partenariales construites autour de la question de l'évolution des qualifications et des compétences professionnelles pour favoriser le retour à l'emploi des salariés touchés par un licenciement économique, anticiper les effets des restructurations et accompagner le tissu des entreprises à entrer dans une dynamique de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.
L'action de redynamisation menée sur le Pays Saint-Lois, touché par la fermeture de l'entreprise Euromoteurs, en est une illustration.

IF - Vous souhaitez également poursuivre la promotion du développement durable en Basse-Normandie. Comment cette “éco-citoyenneté" s'appliquerait-elle dans le domaine de la formation professionnelle ?

L. B. - Le chantier de l'éco-citoyenneté en formation professionnelle a été un des premiers chantiers mené par la Région dans sa démarche de développement durable. Lancée en 2005, la démarche, accompagnée par un cabinet externe, concerne aujourd'hui l'ensemble des organismes de formation bénéficiant d'un financement de la Région (cf. Inffo Flash n° 721, p. 19). Trois groupes de recherche-actions, constitués de formateurs ou de dirigeants d'organismes de formation ont participé aux réalisations suivantes : un référentiel de compétences utilisable dans toutes les actions de formation ; l'expérimentation dans des projets de formation du développement de compétences éco citoyennes ; et la réalisation par des dirigeants d'organismes d'un diagnostic de fonctionnement et de management au regard d'une démarche éco citoyenne.
À la suite de trois journées régionales d'échanges et de mutualisation des expériences, la Région va promouvoir
la généralisation de l'introduction des nouvelles pratiques développées dans l'offre de formation professionnelle qu'elle finance. Une journée nationale d'échanges sur ce thème, à l'attention des Régions sera organisée par le CNFPT et le Centre Inffo en Basse-Normandie, les 29 et 30 mai prochain.

IF - La Basse-Normandie s'est engagée sur une progression de 15 % du nombre des apprentis sur cinq ans. Quels moyens entend-elle mettre en place pour atteindre cet ambitieux objectif ?

L. B. - La Région Basse-Normandie s'est en effet engagée, dans le cadre du contrat d'objectifs et de moyens relatifs au développement de l'apprentissage, signé avec l'État pour la période 2005-2009, à augmenter de 15 % le nombre des apprentis.
Pour atteindre ces objectifs, la Région s'appuie, d'une part, sur la prise en compte des besoins spécifiques en formation des niveaux V et IV des très petites entreprises, particulièrement dans le bâtiment. Une démarche qui est concertée avec la Commission régionale paritaire emploi-formation du BTP.
Et d'autre part, elle s'appuie sur le développement de l'apprentissage public, en appui des CFA ÉN départementaux, créés en 2005. Une démarche qui
s'appuie sur des priorités en termes de filières de formation (BTP et industrie principalement), en termes d'aménagement du territoire (essaimage de l'offre sous forme d'unités de formation par apprentissage), en termes de niveaux de formation (IV et post-bac). À ce titre,
la Région a créé en 2007, sous l'égide de l'Université de Caen Basse-Normandie, un CFA public du supérieur.

IF - Quelle place la Région accordera-t-elle aux questions de formation et d'insertion professionnelle des femmes sous votre présidence ?

L. B. - La Région va poursuivre les actions diversifiées qu'elle mène dans le domaine de la formation professionnelle des femmes. Elle le fera de deux manières. Tout d'abord, en privilégiant l'approche dite “intégrée". Il s'agit de favoriser l'accès des femmes aux métiers majoritairement masculins et de lutter contre les discriminations dans l'accès à l'emploi et à la formation professionnelle dans le cadre des dispositifs de droit commun. L'égalité hommes-femmes et la lutte contre les discriminations sont des critères de sélection des actions de formation professionnelle financées par la Région. Il est à noter que la Basse Normandie est très proche de l'objectif fixé dans la stratégie de Lisbonne sur le taux d'activité des femmes : 58 % des femmes de 15 à 64 ans sont sur le
marché du travail en Basse-Normandie pour un objectif de Lisbonne établi à 60 % à l'horizon 2010. Il ne faut pas ralentir
l'effort consenti étant entendu que
l'essentiel des progrès à accomplir consiste désormais à améliorer la qualité de
l'emploi des femmes.
En second lieu, la Région mène des actions spécifiques autour de ce thème. Elle soutient, en cofinancement avec l'État et l'Europe, une Mission régionale dont le rôle est de modifier les représentations traditionnelles des métiers au regard du sexe dans les organismes
de formation, d'orientation et les entreprises. La Région finance aussi depuis 2007 des bourses récompensant
des jeunes filles s'orientant vers les filières accueillant traditionnellement des hommes en apprentissage. Elle finance enfin en 2008 un module de formation à distance sur l'égalité professionnelle hommes-femmes à destination des chefs d'entreprise, des responsables des ressources humaines, des représentants de personnels, de conseillers en formation et orientation et de demandeurs d'emploi. Ce ne sont que des exemples, d'autres actions d'aide à l'élargissement des choix et à l'accès des femmes aux métiers de l'industrie ou du transport et de la logistique seront menées en 2008, afin qu'elles profitent du développement de ces activités sur les territoires.

Propos recueillis par Knock Billy