Emmanuelle Wargon - Des politiques de santé à la DGEFP

Par - Le 16 février 2013.

“Je sais écouter et construire une solution à partir de toutes les positions exprimées."

Emmanuelle Wargon ne s'embarrasse pas du décorum. Dans son bureau de la DGEFP, calme en ce début de soirée, elle est assise à la table de réunion. Sobre, droite sans être raide, sérieuse sans être distante, elle fait mentir l'image d'Épinal du haut fonctionnaire compassé. Ses réponses sont claires, sans affectation ni détour. La nouvelle déléguée générale à l'emploi et à la formation professionnelle n'est pas femme à se mettre en scène : elle a trop à faire pour cela. Elle mesure l'étendue de sa mission : “Une forte responsabilité et une grande marque de confiance, car la DGEFP est au cœur de la politique voulue par notre gouvernement."

La vocation du service public

C'est au cours de ses études que lui vient la vocation du service public. “En troisième année, à HEC, j'ai effectué un stage aux bureaux new-yorkais de la banque Lazard. Cela s'est plutôt bien passé, mais je me suis rendue compte que je me voyais plus travaillant pour l'État, au service de l'intérêt général, qu'au sein d'une entreprise. Je pense que mon histoire familiale a pu favoriser ce choix : ma mère est énarque, mon père polytechnicien et ancien ministre [ 1 ]Lionel Stoleru, ancien secrétaire d'État (1974-1991). ."
Après un passage par Sciences-Po, l'Éna (1997), puis quatre ans à la Cour des comptes, elle rejoint le cabinet de Bernard Kouchner (alors ministre de la Santé). “J'y ai découvert le monde de l'industrie pharmaceutique. Le croisement entre enjeux économiques et les enjeux de sécurité sanitaire m'a passionnée", se souvient-elle. Directrice générale adjointe de l'Afssaps [ 2 ]Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé. , puis directrice adjointe à l'AP-HP [ 3 ]Assistance publique - Hôpitaux de Paris. de 2006 à 2007, elle “ne trouve pas sa place" au sein de cette “grosse structure très complexe".

“Du RSA aux ARS"

C'est alors que Martin Hirsch alors tout juste haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté lui propose de rejoindre son équipe pour mettre en place le RSA. “Il avait déjà une idée assez précise de ce qu'il voulait faire et avait surtout besoin de quelqu'un d'ordonné pour l'aider à traduire son projet. C'était un pari, mais il a bien fonctionné." La position de Martin Hirsch à cette époque est “compliquée", juge-t-elle. “Il avait été nommé par François Fillon dans le cadre d'une démarche d'ouverture. Il lui fallait à la fois faire preuve de loyauté tout en gardant sa liberté. Pour moi, il a réussi à rester fidèle à lui-même."

Après le départ de Martin Hirsch du gouvernement, retour à la case santé : “Je suis passée du RSA aux ARS !", s'amuse Emmanuelle Wargon. Secrétaire générale des ministères chargés des Affaires sociales, elle pilote notamment les toutes nouvelles Agences régionales de santé. Un dossier délicat, selon Michel Chassang, président du CSMF (Confédération des syndicats médicaux français) : “La profession était contre la création des ARS. Malgré cela, elle est parvenue à nouer de bonnes relations avec nous. C'est une personne compétente et à l'écoute." “Elle s'investit, suit ses dossiers à fond. Elle a toujours été disponible pour les directeurs d'agence et les a beaucoup soutenus", nous confie de son côté Claude Évin, directeur de l'ARS Île-de-France.

Emmanuelle Wargon admet ne pas être spécialiste des politiques de l'emploi et de la formation et avoir “très peu de temps pour passer la phase de « découverte »". En effet, le planning est chargé : “La réforme de 2009 a été mise en œuvre. 2013 sera notamment consacrée au suivi des Com [ 4 ]Conventions d'objectifs et de moyens.. Nous allons rencontrer chacun des Opca pour faire un premier bilan des Com et des perspectives à venir."

Toutefois, l'un de ses atouts, dit-elle, c'est qu'elle sait “écouter, essayer de comprendre [ses] interlocuteurs et construire une solution à partir de toutes les positions exprimées". “C'est quelqu'un d'opiniâtre, de très engagée. Je lui fais totalement confiance pour mener à bien sa mission", déclare son ancien adjoint aux ministères chargés des Affaires sociales, Nicolas Grivel, aujourd'hui directeur adjoint au cabinet de Michel Sapin.

Et la vie de famille ? Compliqué à gérer, admet cette mère de trois enfants. “Je ne suis pas « Wonder woman ». Je cours tout le temps en ayant toujours l'impression de ne pas en faire assez où que je sois. Une discipline importante est nécessaire : je travaille vite, je suis organisée. J'espère partir vers 20 heures, ce qui est assez tôt pour un délégué général ou un directeur de cabinet."

2002 - directrice générale adjointe de l'Afssaps (Agence française
de sécurité sanitaire des produits de santé)

2007 - directrice de cabinet de Martin Hirsch, haut-commissaire
aux solidarités actives contre la pauvreté
_ 2010 - secrétaire générale des ministères chargés des Affaires sociales

2012 - déléguée générale à l'emploi et à la formation professionnelle

Notes   [ + ]

1. Lionel Stoleru, ancien secrétaire d'État (1974-1991).
2. Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé.
3. Assistance publique - Hôpitaux de Paris.
4. Conventions d'objectifs et de moyens.