Adapter la FOAD à l'arrivée imminente de la “génération Y" : un défi pour le réseau des Gréta
Par Benjamin d'Alguerre - Le 16 mars 2013.
Initiée timidement voici trente ans dans le cadre du “plan informatique pour tous" de 1985, la formation ouverte et à distance (FOAD) au sein du réseau des Gréta a connu des hauts et des bas. Il aura ainsi fallu attendre l'an 2000 pour qu'une première tentative de développement des technologies de l'information et de la communication pour l'enseignement (TICE) et des outils multimédias au plan national (les Gréta sont présents dans vingt-sept académies sur trente) voie le jour, mais l'essai ne sera pas transformé.
“Ce fut un échec", a admis François Hisquin, formateur au Cafoc [Centre académique de formation continue.[/footnote] de Versailles, qui intervenait le 21 février dernier lors d'un “Jeudi de l' [Afref" consacré, précisément, à l'usage des TICE dans la formation des adultes. Un premier échec, dû, en grande partie, à l'absence d'une réelle culture numérique au sein des Gréta. “Vendre quarante heures de formation à un client, on savait faire.
Vendre un parcours de formation… c'était plus problématique." Sans compter le profil des stagiaires des Gréta, pas nécessairement habitués à l'environnement informatique. “Nos stagiaires disposent d'un niveau de formation initiale assez bas et leur moyenne d'âge s'élève, en général, à la quarantaine. Dans ces conditions, il n'est pas possible de procéder à la manière d'une Université classique où les cours sont mis en ligne à la disposition des étudiants. Les publics que nous recevons ont besoin d'un accompagnement constant."
Tutorat renforcé : oui, mais…
Il faudra attendre 2005 pour que la “seconde vague" du déploiement des TICE au sein du réseau devienne effectif. Depuis, la FOAD a fait son chemin dans les parcours de formation conçus et scénarisés par les Gréta, qu'il s'agisse de former des publics d'origine sub-saharienne à la maîtrise de la langue française, des standardistes à l'accueil téléphonique ou des cadres de la fonction publique au management.
Autant de parcours, autant de scénarios à inventer et de tutorats spécifiques à mettre en place, quitte, parfois, à devoir freiner l'enthousiasme des tuteurs… “Nos contrats stipulent que les accompagnants s'engagent à fournir des réponses dans les vingt-quatre heures ouvrées après qu'un stagiaire leur ait signifié une question. Problème : certains s'obligent à répondre dans l'heure, y compris le week-end et nous demandent ensuite de les rémunérer pour ce travail dominical, alors que ce n'est pas compris dans leurs contrats", a expliqué François Hisquin. Quant aux corps d'inspection, ils ont également exprimé certaines réserves sur le recours à la FOAD, particulièrement concernant la nature d'un éventuel accident survenant durant le temps de formation à distance. “Accident domestique ou accident du travail ? Cela n'est pas éclairci dans la loi", a regretté le formateur versaillais.
Demeure également la question du “tracking" (suivi) des stagiaires, nécessairement renforcé pour empêcher un abandon de la formation du fait de l'isolement de l'apprenant, mais qui peut se traduire, dans les faits, par une certaine forme d'empiètement sur la vie privée.
Les “petites poussettes" à la porte des Gréta
Dans un avenir proche, de nouveaux défis attendent les programmes de FOAD des Gréta [ 1 ]Y compris le développement d'outils de type “mobile-learning", même si ce format est encore jugé peu adapté avec les volumes de cours dispensés au sein des Gréta. Si la “génération Y" ne frappe pas encore à la porte des établissements (même si certains Conseils régionaux, comme celui d'Île-de-France, financent des formations spécifiques pour les jeunes), le réseau ne devra pas moins se préparer à concevoir des cycles d'apprentissages adaptés à ceux
que Michel Serres appelait les “petites poussettes", souvent perçus comme “hypernumérisés". Et concernant l'imputabilité des formations et leur financement, l'actuel système ne favorise pas l'usage des réseaux sociaux dans les processus d'apprentissage développés par les Gréta. “Les futures générations de stagiaires seront demandeuses d'une réactivité des enseignants et des tuteurs quasi immédiate", a souligné le formateur du Cafoc. Et si, aujourd'hui, les solutions n'existent pas encore, “il nous appartient de les inventer !"
Notes
1. | ↑ | Y compris le développement d'outils de type “mobile-learning", même si ce format est encore jugé peu adapté avec les volumes de cours dispensés au sein des Gréta |