La Tchéquie face aux défis de la formation des adultes
Soucieuse de favoriser l'apprentissage tout au long de la vie, la Tchéquie multiplie les initiatives pour articuler l'éducation formelle et non formelle. Le pays s'appuie notamment sur son Registre national des qualifications (Národní soustava kvalifikací - NSK). Malgré ces efforts, le taux de participation des adultes à la formation continue reste modeste : en 2024, seulement 9,9 % des 25-64 ans avaient pris part à une activité éducative formelle ou non formelle selon la Labour Force Survey. L' Adult Education Survey révèle néanmoins qu'en 2022, 40 % des adultes tchèques avaient suivi au moins une formation non formelle.

Par Michel Jouini - Le 28 avril 2025.
Un cadre institutionnel et législatif structuré
La gouvernance de la formation des adultes repose principalement sur deux ministères : le Ministère de l'Éducation, de la Jeunesse et des Sports et le Ministère du Travail et des Affaires sociales, qui définissent les orientations stratégiques. La législation nationale, en particulier la loi sur l'éducation (n° 561/2004) et la loi sur la reconnaissance des résultats de l'éducation continue (n° 179/2006), fournit un cadre robuste pour la formation tout au long de la vie et pour la validation des acquis de l'expérience. Le NSK (registre national des qualifications), pierre angulaire de ce dispositif, propose aujourd'hui une offre diversifiée, avec 1451 qualifications professionnelles et 217 qualifications complètes alignées sur les niveaux 2 à 7 du Cadre Européen des Certifications.
La formation des adultes en Tchéquie est portée par une grande diversité d'acteurs : écoles, universités, organismes privés, employeurs, syndicats, ONG ou associations professionnelles. Toutefois, pour proposer des formations reconnues ou subventionnées, ces entités doivent obtenir une accréditation officielle délivrée par le Ministère de l'Éducation. Parallèlement, le système de reconversion professionnelle (Rekvalifikace) permet aux demandeurs d'emploi — mais aussi, dans certains cas, aux salariés ou indépendants — d'acquérir de nouvelles qualifications en réponse aux besoins du marché du travail. Ces formations, axées sur les compétences pratiques, sont souvent financées par les bureaux de travail locaux ou auto-financées par les participants.
Un nouveau levier : "Jsem v kurzu", l'équivalent tchèque du CPF ?
Pour faciliter l'accès individuel à la formation, la Tchéquie a lancé le programme "Jsem v kurzu" ("Je suis en cours"), inscrit dans le cadre du Plan national de relance.
Ce dispositif permet aux adultes souhaitant se former ou se reconvertir de bénéficier d'un compte personnel de formation et d'un soutien financier couvrant jusqu'à 82 % du coût d'une formation, avec un plafond fixé à 50 000 CZK (environ 2 000 euros) sur une période de trois ans. Le reste du coût est à la charge du participant.
Accessible via une plateforme officielle recensant les cours de reconversion et de formation continue accrédités, "Jsem v kurzu" fonctionne sur un modèle proche du Compte personnel de formation français. Malgré son ambition, "Jsem v kurzu" présente plusieurs défis majeurs;
D'une part, la plateforme n'est pas régulée strictement, et il n'existe pas de contrôle rigoureux des organismes de formation agréés, ce qui expose le système à des risques de qualité variable.
D'autre part, le financement du programme ne repose pas sur une contribution dédiée des entreprises, comme c'est le cas pour le CPF en France, mais sur des fonds européens issus du Plan national de relance. Cette dépendance pose la question de la pérennité du financement une fois les aides européennes terminées.
Présent à Prague les 24 et 25 avril 2025 à l'occasion du premier "Partnership Forum" de 2025 organisé par le Cedefop dans le cadre du réseau ReferNet, Centre Inffo a été accueilli par le Národní Pedagogický Institut. Les échanges et présentations menés lors de cet événement ont mis en lumière les défis auxquels la Tchéquie est confrontée dans la réforme de son système de formation initiale et continue.