Question à Joss Frimond, consultant et co-auteur de l'étude sur “le marché de la formation langue à l'heure de la mondialisation"

“Les premiers mouvements de regroupement : à partir du deuxième semestre 2009"

Vous prévoyez une concentration dans le secteur. Quelles en sont les facteurs ?
Cette concentration du marché de la formation est déjà en cours. Il est probable, si la tendance actuelle se poursuit, que les regroupements d'organismes vont s'amplifier, en particulier à partir de 2010. Cinq facteurs expliquent cette situation.

Tout d'abord, la crise a déjà eu un impact important sur les budgets de formation des grandes entreprises en 2009 (entre 20 et 30 % de réduction des budgets). Ces réductions risquent de se généraliser à l'ensemble des entreprises à partir de 2010. Ensuite, le financement du Dif, qui a “boosté" le marché en 2007 et 2008 et au cours du premier semestre 2009, commence déjà à montrer les premiers signes d'essoufflement (certains Opca ont récemment fortement réduit leur contribution). Troisième point, la réforme de la formation, en réorientant des crédits importants des Opca vers la professionnalisation des populations fragiles, va sans doute restreindre encore les budgets alloués aux formations transversales comme les langues, à partir de 2010. Par ailleurs, les pouvoirs publics, les entreprises et les Opca, en étant plus exigeants en termes de procédures et de certification, vont accentuer la pression sur les petits organismes et sur ceux qui sont insuffisamment professionnalisés. Et enfin, si les opérateurs de formation à distance continuent à se développer au rythme actuel et parviennent à satisfaire la demande, à moyen terme, la part de face à face globale diminuera inévitablement.

Ces différents facteurs risquent d'aiguiser la compétition pour les parts de marché sur tout le territoire. Nous verrons probablement dans les années à venir un mouvement similaire à celui observé dans la distribution au cours des années 1970-1980 : la constitution d'un nombre restreint de grandes marques et la réduction en nombre de commerces de proximité.

Quel est le scénario pour les mois et les années à venir ?

On peut sans doute s'attendre aux premiers mouvements de regroupement à partir du deuxième semestre 2009. Les défaillances de certaines entreprises profiteront à d'autres, en ouvrant des parts de marché aux plus dynamiques et à ceux qui ont déjà anticipé la tendance en se spécialisant ou en se positionnant sur le créneau du blended learning. À moyen terme (deux à trois ans) l'effet générationnel créera d'autres opportunités pour les acquéreurs potentiels. Il est donc probable que les organismes de formation indépendants en dessous d'une certaine taille (un million d'euros à Paris, 500 000 euros hors Île-de-France) auront de plus en plus de mal à se maintenir dans les années qui viennent, à moins d'être spécialisés dans des marchés de niche.

Et en termes de nombre d'organismes ?

Aujourd'hui, on compte environ 400 organismes spécialisés en formation professionnelle langues, liés ou non à des réseaux, qui emploient plus de deux salariés à temps plein sur le territoire français. Au delà de 500 000 euros, ce nombre est d'environ 150 organismes aujourd'hui. On peut donc prévoir sans trop de risques que le nombre d'organismes au-dessus de 500 000 euros n'excédera pas une centaine dans les trois à cinq ans qui viennent. En revanche, il est fort probable que le nombre total d'organismes augmente, car les employeurs risquent, sous la pression des coûts, de pousser de plus en plus leurs formateurs à adopter des statuts indépendants (auto entrepreneurs, notamment).

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