Entretien avec Stéphane Fayol, directeur des relations et ressources humaines chez Terreal
Par Philippe Grandin - Le 16 avril 2011.
Comment s'est imposé votre recours à la formation dans le cadre de la crise ?
Notre démarche s'inscrit dans l'histoire sociale de notre entreprise. Quand nous avons vu se dessiner cette baisse d'activité, nous avons été amenés à réfléchir à une stratégie, à savoir : préserver la cohésion sociale instaurée depuis la création de l'entreprise en 2000 ; et préserver nos compétences pour répondre à tous les besoins de nos clients qui surviendraient au cœur de la crise. Cela laissait entendre que nous devions disposer en interne d'une flexibilité dans notre organisation. Nous avons aussi profité de cette période de baisse d'activité pour mettre en œuvre des actions de formation plus approfondies afin de préparer, sur le plan des compétences, nos collaborateurs à la reprise économique.
Ces actions entraient dans le cadre d'un plan d'ensemble constitué de trois mesures : mobilisation des partenaires sociaux, des salariés et de la direction ; éviter les décisions désagréables (plan social ou chômage partiel) ; investir via la formation pour préparer l'après-crise et rester performants.
Mais au-delà de ces principes, comment les avez vous développés sur le terrain ?
Le maître mot a été la décentralisation. Il ne s'agissait pas d'établir une action unitaire de formation. Chaque établissement de Terreal est concerné par un type de production et un marché différents. Nous avons donc tenu compte de la réalité de chaque site, c'est-à-dire de la nature du métier et du maintien des compétences spécifiques. Chaque établissement concerné par de la sous-activité a pu bénéficier d'un plan de formation sur mesure, élaboré notamment en partenariat avec des réseaux comme ceux de l'Afpa et de l'Afpi (Association de formation professionnelle de l'industrie). Pour cela, nous nous sommes appuyés sur la période de professionnalisation pour engager des actions dans les domaines de la qualité et du contrôle de la production (s'orienter vers une autonomie des opérateurs de production par la connaissance du process). Dans le même temps, nous avons géré le transfert temporaire de certains salariés d'un site à un autre.
Qu'en a-t-il été du financement de ce projet de formation ?
Nous consacrons chaque année, dans le cadre du plan de formation, de 3 à 5 % de notre masse salariale à la formation. Nous avons fait de la contrainte de la baisse d'activité une opportunité pour développer la formation. Nous avions davantage de temps devant nous et c'est pourquoi nous avons opté pour la période de professionnalisation, qui permet de mener des actions plus longues et plus complexes, et aussi de solliciter des financements (Opca, FNE, etc.). Il nous fallait en effet trouver un équilibre financier pour mener à bien notre stratégie.
Qui la période de professionnalisation a-t-elle concerné, et pour quels parcours ?
Les techniciens et les agents de maîtrise, et, dans une moindre mesure, les cadres. Pour construire notre action de formation, nous avons puisé dans notre “boîte à outils" de GPEC. Nous avons ainsi retenu, par exemple, un premier type de formation relatif à l'encadrement intermédiaire et qui fait intervenir notre école de maîtrise, gérée avec l'Afpi. Il s'agit d'une formation métiers qui permet aux collaborateurs d'obtenir un diplôme dans différentes filières de notre secteur. Ou encore, nous avons considéré un deuxième type de formation ouvert aux ouvriers de production (tuiles et briques) et qui débouche sur un CQP, développé par la branche en parallèle à un diplôme délivré par l'Éducation nationale. Nous avons aussi retenu le parcours professionnel débouchant sur la fonction de technicien qualité, construit en partenariat avec l'Afpa et labellisé par l'Afnor. Tous ces parcours ont été mobilisés pour former plus de salariés pendant la période de crise.
Vous en avez profité pour construire d'autres parcours de formation sur mesure...
Oui, les RRH et managers locaux ont travaillé sur des plans de formation plus adaptés. Au total, deux plans d'envergure ont concerné deux sites fortement impactés par la sous-activité. Le premier plan était consacré à la connaissance de l'environnement de travail, soit plus de 100 heures de formation pour mieux appréhender les diverses facettes de notre métier (process de fabrication des tuiles) avec des intervenants extérieurs. Des modules sur la qualité et son approche dans l'entreprise étaient également au programme. Le second plan était axé sur le développement de l'outil de production pour les opérateurs (mieux s'approprier l'outil, maintenance de premier niveau pour être plus performant dans le pilotage de l'outil de production).
Finalement, nous avons fait d'une contrainte (la baisse de notre activité) une opportunité (un investissement sur les compétences), en rassemblant les financements nécessaires.