Les itinéraires des sept membres fondateurs du Club de l'apprentissage
Par François Boltz - Le 16 avril 2011.
Les “porte-parole" du Club de l'apprentissage dont la fondation a été célébrée par Nadine Morano, ministre de l'Apprentissage et de la Formation professionnelle, le 7 avril au Cnam (voir aussi notre article), ont tous en commun d'être des symboles de la réussite par l'apprentissage. Charge à eux de témoigner de leur expérience et de sensibiliser les jeunes sur les avantages de ce type de formation - mais aussi de parrainer des apprentis. Mais qu'en est-il de ces itinéraires ?
Alain Baraton est jardinier en chef du grand parc de Versailles, de Trianon et de Marly (840 hectares). Quand il y est entré en 1976, il était apprenti, aujourd'hui il est l'un des jardiniers les plus connus de France. Il est vrai qu'il est l'auteur de nombreux articles et de huit ouvrages spécialisés, et qu'il a été chroniqueur jardin sur France Télévision, avant de l'être sur France Inter. Le “jardinier de Versailles" a dû faire face au désastre de la tempête du 26 décembre 1999 qui a dévasté le parc (18 500 arbres arrachés par le vent, 40 000 autres abattus par la suite). Huit ans plus tard, 300 000 arbres ont été replantés sous sa direction. Il tient à sa qualifier plus que jamais de “jardinier", plutôt que de paysagiste : manière de rappeler la noblesse du métier appris on ne peut plus près du terrain. Pour lui, l'apprentissage, c'est “la promesse d'un métier".
Gérard Dorey est directeur exécutif de Carrefour Proximité, après avoir débuté, voici 45 ans, comme apprenti chez un commerçant indépendant. Il a suivi ensuite des études à l'École des commerces d'alimentation (Écal) de Rouen. Ayant rejoint le groupe Promodès en 1979, il y a gravi les échelons, jusqu'à devenir directeur exécutif proximité France vingt ans plus tard. Après la fusion de Promodès et de Carrefour, il est devenu, en 2006, membre du conseil exécutif du groupe. “Avec l'apprentissage, des vocations se découvrent", dit-il.
Robert Mahler, retraité, ancien président France d'Alstom, a été l'élève d'une “école saisonnière d'agriculture", avant de passer un CAP d'électromécanicien en 1963. Suivi d'un BTS, puis d'une maîtrise, puis d'un diplôme d'ingénieur à Supélec, dix ans après le CAP. Chef de projets dans des laminoirs, directeur d'une activité de turbines à gaz, puis rejoignant l'activité transmissions, il a été largement présent sur le terrain avant de devenir président France d'Alstom, en 2000. Depuis 2009, il est ce que l'on appelle un retraité actif : administrateur au CNRS et président de son comité d'audit, expert dans plusieurs instituts. “Ce que l'apprentissage m'a apporté, au-delà de la fierté de maîtriser un vrai métier, c'est le respect du travail bien fait, déclare-t-il. Devenu chef d'entreprise, la considération que j'avais pour mes anciens collègues ouvriers d'atelier et de chantier a profondément marqué la qualité des relations sociales par le respect mutuel que nous nous portions."
Franck Provost est président directeur général du groupe Provalliance. Il a fait ses débuts dans la coiffure par l'apprentissage au Lude (Sarthe) en 1965. En 1976 il a remporté le concours de “champion du France la coiffure", et en 1976 de “champion du monde". C'est en 1979 qu'il ouvre son premier salon parisien ; en 1988 et 1989 il était élu “manager de l'année" de la profession. Le premier salon franchisé “Franck Provost" s'est ouvert en 1995, et deux ans plus tard le rythme de création était d'un par semaine. Franck Provost a créé avec des confrères un syndicat professionnel en 1995 : le Conseil national des entreprises de coiffure (CNEC), qui représente aujourd'hui 3 000 salons, et dont il a été élu président en 2000 (réélu en 2003, 2006 et 2009). Il en est certain : “Dans chaque être humain, il y a du talent ; l'apprentissage permet de le découvrir et de le valoriser."
Michel Roth, chef cuisinier, a débuté comme apprenti chez un “maître cuisinier de France". Il a été titré “Un des meilleurs ouvriers de France" en 1991, et ce disciple de Paul Bocuse a obtenu ensuite pas moins de neuf autres prix, trophées et médailles d'or. Ayant rejoint le Ritz en 1981, il en est actuellement directeur des cuisines. Son dicton : “L'apprentissage, c'est les racines d'un métier qui vous amène à la passion et au bonheur !"
Guy Savoy, cuisinier lui aussi, a été apprenti à 16 ans chez un chocolatier puis chez les frères Troisgros, chez Lasserre, au Lion d'Or à Genève, à L'Oasis à La Napoule. Il a ouvert son premier restaurant à 27 ans, avec sa première étoile un an plus tard, et la deuxième en 1985, la troisième en 2002. Après quoi il commencé d'ouvrir d'autres restaurants. Il espère voir “la fin de l'idée reçue, et bien ancrée, selon laquelle l'aptitude intellectuelle doit toujours primer sur l'aptitude manuelle pour libérer les intelligences".
Patrick Scicard, président du groupe Lenôtre, est l'enfant de parents pâtissiers : très tôt passionné, il est passé par toutes les étapes, commis de cuisine, apprenti pâtissier, réceptionniste, maître d'hôtel auprès de grands traiteurs et de palaces parisiens. Il n'avait pas 30 ans quand il a rejoint le groupe des hôtels Concorde en tant que directeur général de l'hôtel quatre étoiles Lutetia, avant d'être celui de l'hôtel Martinez, à Cannes. Il a pris les rênes de Lenôtre en 1995 (président du directoire en 1999). Ce passionné a lancé en 2003 la première école de cuisine et de pâtisserie pour amateurs, aux Champs-Élysées. “L'apprentissage, aime-t-il à répéter, c'est l'école du savoir-faire, du savoir-vivre, du savoir être, du savoir travailler ensemble - et partager."