Mobilisation générale pour “faire tomber le tabou de l'illettrisme"

Par - Le 16 avril 2011.

Le 29 mars a été déclaré “jour de mobilisation nationale contre l'illettrisme". Tenu en présence de nombreux acteurs de la vie politique et de la formation professionnelle, le colloque “Lutte contre l'illettrisme dans l'emploi" organisé par Nadine Morano a vu la signature de deux accords importants.

Rappelant que 54 millions d'euros ont été débloqués cette année par le gouvernement au titre de l'apprentissage des compétences-clés, en plus des 132 millions consacrés à ces formations par le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP), la ministre de l'Apprentissage et de la Formation professionnelle a annoncé aux participants (Opca, partenaires sociaux, représentants de Pôle emploi, d'associations, d'entreprises, du Conseil d'orientation pour l'emploi, etc.) les cinq étapes du plan d'action partagé. Plan signé en conclusion de la journée au Conseil économique, social et environnemental (Cese) : “Mieux connaître l'illettrisme pour mieux agir contre lui, mieux repérer les publics en souffrance, sensibiliser le plus grand nombre d'acteurs à cette thématique, former davantage de personnes et déployer un effort particulier en direction des demandeurs d'emploi souffrant d'illettrisme."

Par ailleurs, six ans après la première enquête “Information et vie quotidienne" consacrée à l'illettrisme, en 2005, et qui avait porté sur près de 10 000 personnes, Nadine Morano s'est engagée à relancer une deuxième consultation dès cette année, dont les résultats seront analysés fin 2011 et comparés à ceux de l'étude précédente. “Ainsi, nous disposerons de chiffres comparables afin de mesurer l'évolution de l'illettrisme dans notre pays", a-t-elle indiqué. Cependant, ni son
ministère ni l'Agence nationale de lutte contre l'illettrisme (ANLCI) ne comptent attendre la publication de cette enquête pour œuvrer au développement des bonnes pratiques, puisque, d'ores et déjà, un document de responsabilisation des entreprises, destiné à aider celles-ci (et notamment les PME) à développer des actions de dépistage et de lutte contre ce “fléau social", est disponible sur le site internet des deux institutions.

Pôle emploi

Les services de Pôle emploi, déjà signataire, en début d'année, d'un accord-cadre avec l'État et l'ANLCI, ont eux aussi déployé un vaste programme à travers tout le territoire. Selon Christian Charpy, directeur général de Pôle emploi, “aujourd'hui, quelques mois après cette signature, 600 agences ont d'ores et déjà été sensibilisées, ce qui représente près de 5 000 agents qui ont eu l'occasion d'être formés au repérage des personnes en situation d'illettrisme
ainsi qu'à leur accompagnement vers des
organismes de formation compétents". Toutefois, Christian Charpy admet que le travail est loin d'être achevé et que l'intensification de la lutte contre l'illettrisme amènera Pôle emploi à développer ses partenariats avec les Régions, les Opca et les organismes susceptibles d'offrir des formations aux compétences-clés en vue d'établir un recueil vivant des bonnes pratiques, diffusable sur un intranet accessible aux agents du SPE.

Offre de formation

La compétence des organismes de formation : un sujet particulièrement sensible, selon Marie-Christine Soroko, déléguée générale de la Fédération de la formation professionnelle (FFP), pour qui “les publics de bas niveau sont généralement ceux qui s'avèrent les plus difficiles à former. Aussi, les organismes de formation aux savoirs de base doivent faire preuve de trésors d'imagination pour développer des programmes susceptibles de les intéresser. Si les stagiaires sortent déçus de ces formations, alors il s'agit d'un échec susceptible de préfigurer de grandes difficultés dans leurs formations futures !" Afin de limiter ces échecs, la déléguée générale a rappelé que sa fédération avait mis en place un CQP de formateur-consultant afin de garantir la professionnalisation des enseignants des savoirs de base. Par ailleurs, en cas de doute sur le professionnalisme d'un organisme de formation, elle a recommandé d'examiner ses certifications. “Nous recommandons aux organismes sérieux de faire valider leur démarche qualité par une norme Iso ou NF", a-t-elle ajouté.

Opca

Le plan d'action partagé n'aura pas été le seul accord signé ce 29 mars, puisqu'en parallèle, 23 Opca (voir encadré) ont paraphé la Charte ANLCI de bonnes pratiques pour le développement des actions de lutte contre l'illettrisme dans un objectif de sécurisation des parcours professionnels, de dépistage de l'illettrisme, d'amélioration de l'évaluation et de l'accompagnement des salariés dans leur retour vers la maîtrise des compétences-clés.

Si de nombreux participants à cette journée ont martelé qu'il fallait “faire tomber le tabou de l'illettrisme en France", nul n'a mieux résumé cette urgence que le parrain de l'opération, le comédien Gérard Depardieu, lui-même ancien illettré, qui, à sa façon, a témoigné de sa propre expérience en la matière : “On est très seul lorsque l'on est illettré. Adolescent, je voulais être incarcéré de force dans un lycée pour apprendre à lire et à écrire ! Je croyais beaucoup en l'école !"

En France en 2011, plus de 3 millions de personnes sont en situation d'illettrisme. 1,8 million d'entre elles ont pourtant un emploi, dont 900 000 personnes qui ont plus de 45 ans. Pour les salariés, c'est une barrière importante à la mobilité et à l'évolution professionnelle. Pour les demandeurs d'emploi, c'est un frein considérable à l'insertion professionnelle.

Les signataires du [plan d'action partagé [ 1 ]PlanActionPartage.pdf
Accord signé entre le ministère de l'Apprentissage et de la Formation professionnelle, l'ANLCI, Pôle emploi, le Conseil national des Missions locales (CNML), l'Assemblée permanente des Chambres de métiers et de l'artisanat, l'Assemblée des Chambres françaises de commerce et d'industrie, l'Association nationale des DRH, le Garf, Grandes écoles au féminin et la Conférence des grandes écoles.

Notes   [ + ]

1. PlanActionPartage.pdf