Bretagne - Une école Vaucanson pour les bacheliers professionnels à Saint-Brieuc

Par - Le 16 mai 2012.

En septembre, l'école Vaucanson de Bretagne ouvrira ses portes à Saint-Brieuc (Côtes d'Armor). Destinée aux titulaires de bacs professionnels, elle proposera une formation supérieure conduisant à une licence en ingénierie industrielle. L'institut Vaucanson (du nom d'un ingénieur et inventeur autodidacte du XVIIIe siècle) vise en effet à conduire les titulaires de bac pro jusqu'à bac + 5. La formation repose essentiellement sur l'apprentissage, avec le concours d'entreprises implantées localement.

Cette initiative, qui prend appui sur une première expérimentation menée en Seine-Saint-Denis, associe plusieurs partenaires : le Cnam (Conservatoire national des arts et métiers) Bretagne, le CFAI (centre de formation des apprentis de l'industrie) de Plérin, la Région Bretagne et l'académie de Rennes. “L'idée d'implanter en Bretagne une école Vaucanson, en s'appuyant sur ce qui se fait déjà en région parisienne, revient à la Région. C'est un projet expérimental qui répond à des enjeux éducatifs et professionnels. Il s'agit de proposer à des jeunes motivés une formation en alternance pour l'obtention d'une licence", rappelle Bernard Pouliquen, vice-président du Conseil régional en charge de l'enseignement supérieur et de la recherche. “Cette formation en alternance est basée sur une pédagogie par projet et fait référence à ce que les jeunes titulaires de baccalauréats professionnels ont appris dans leurs lycées. Il est important de développer des pédagogies adaptées, fondées sur les acquisitions liées à leur formation antérieure, dans une démarche moins conceptuelle, centrée sur la logique de projet. L'apprentissage et l'alternance sont de nature à favoriser l'encadrement de ces néobacheliers. L'alternance est à considérer comme un outil pédagogique plein et entier, destiné à la formation des jeunes. Sur ce plan, nous modifions les représentations sur le destin scolaire des jeunes", explique Bernard Pouliquen. “En élaborant, ajoute-t-il, des formations de niveau licence en apprentissage, en mobilisant les acteurs économiques, en nouant des partenariats avec les écoles d'ingénieurs,il est proposé de dépasser les représentations éculées du travail manuel et de porter les étudiants au plus haut niveau de compétences."
L'implication de la Région dans ce projet relève à la fois “de sa compétence en matière d'apprentissage" et d'une “action politique volontaire réunissant autour de la table plusieurs acteurs pour faire de la promotion sociale". Et Bernard Pouliquen d'expliquer : “La licence en ingénierie industrielle renvoie à de réels besoins des entreprises. Cette nouvelle voie de réussite centrée sur une pédagogie de projets permettra aux entreprises de diversifier leur recrutement et de valoriser un potentiel de jeunes disposant de solides compétences techniques et professionnelles. Cette année, la filière industrielle est privilégiée et un bilan de la formation sera réalisé d'ici un an. Le but étant de voir comment les cursus s'organisent et d'ouvrir les formations à d'autres secteurs, le tertiaire par exemple."
Pour Michel Chapelain, responsable du centre de formation des apprentis de l'industrie (CFAI) de Plérin, “l'ouverture, à la rentrée prochaine, de l'école Vaucanson, va redorer le blason de l'apprentissage et celui de la filière industrielle. Nous bénéficierons ainsi d'une vitrine pour accueillir et attirer de jeunes bacheliers professionnels. Au sein de l'école, les jeunes vont monter en compétences par le biais de projets techniques. Notre rôle est d'intervenir à un moment-clé de la formation des jeunes. Ces derniers vont exprimer des besoins à travers leurs projets et nous y répondrons dans le domaine des sciences physiques appliquées". Le CFAI a d'ores et déjà positionné deux de ses meilleurs apprentis pour une intégration dans le cursus de l'école. Les dossiers des postulants, qui proviennent également des lycées professionnels de la région, seront examinés par le Cnam, qui effectue la sélection. Les jeunes bacheliers professionnels ont donc la possibilité de poursuivre leurs études, en préparant un BTS, par exemple, au sein d'une même entreprise, ou de postuler auprès d'une autre entreprise pour préparer cette licence d'ingénierie industrielle.

Entretien avec Laurent Buchon, directeur régional du Cnam Bretagne

“Faire émerger de nouveaux profils"

Qu'est-ce qui caractérise le projet de création de l'école Vaucanson à Saint-Brieuc ?

L'initiative de la création d'une seconde école Vaucanson revient à la Région, et notamment aux élus régionaux en charge de l'enseignement supérieur et de l'apprentissage, Bernard Pouliquen et Georgette Bréard, très sensibles à la poursuite des études des bacheliers professionnels.
En partant de l'expérimentation menée en Seine-Saint-Denis, nous avons conçu un dispositif qui conduit, au terme d'une formation de trois ans après le baccalauréat professionnel, à l'obtention d'une licence du Cnam en ingénierie industrielle. Pour cela, nous nous appuyons sur le CFAI, puisqu'il s'agit d'apprentissage. D'ici un ou deux ans, nous proposerons, toujours dans le cadre de l'apprentissage, une licence dans les domaines de la gestion et du management. Dans le cadre de la formation, l'acquisition des connaissances et des compétences s'effectuent à partir de projets. Chacun repose sur un scénario pédagogique, élaboré par une équipe d'enseignants (du CFAI, de lycées professionnels, d'IUT, d'écoles d'ingénieurs, etc.) et de spécialistes en ingénierie pédagogique du Cnam. Un lien a été établi avec les entreprises, notamment un travail d'écoute afin que les projets correspondent à des compétences recherchées.

Au sein de ces dernières, les apprentis auront à perfectionner leur geste professionnel et à acquérir des compétences transverses. L'objectif est que les jeunes soient positionnés sur des postes de responsabilité et d'encadrement intermédiaire. Nous nous sommes rapprochés, avec le CFAI, des entreprises qui ont déjà, au plan national, apporté leur appui à ce projet (EDF, Michelin, GDF-Suez, PSA, etc.), car sensibles à la revalorisation de la voie professionnelle (lycées professionnels et apprentissage). À terme, les entreprises d'accueil seront celles du bassin d'emploi breton.

Quels sont les objectifs visés à travers cette nouvelle voie d'apprentissage ?

Les stagiaires doivent être installés dans des perspectives d'évolution, autrement dit en réalisant des tâches de gestion, de management, de maintenance systèmes… L'objectif est l'obtention d'un diplôme bac + 3, mais nous n'excluons pas l'idée de promouvoir des profils “d'excellence" (niveau bac + 5). Il s'agit bien de faire émerger des cadres à profils différents. Un autre objectif est de diffuser des pratiques, mais aussi d'en recueillir, dans la mesure où certains enseignants de lycées professionnels et d'IUT sont à l'origine d'autres initiatives qui vont dans le sens de notre projet. Je pense, par exemple, au diplôme d'Université (DU) proposé conjointement par les IUT de Brest (29) et de Lorient (56).

Le DU (en un an pour la version longue) veut aider les bacheliers professionnels à intégrer un DUT. Une fois le DU en poche, ces derniers pourront en effet accéder à une formation industrielle de niveau bac + 2 : BTS industriel, DUT Génie électrique et informatique industrielle, DUT Génie industriel et maintenance, DUT Génie mécanique et productique, DUT Qualité, logistique industrielle et organisation.