Emplois d'avenir : des organismes paritaires prêts à s'engager, malgré des difficultés pratiques

Par - Le 01 novembre 2012.

La mise en place des emplois d'avenir et la participation attendue de la part des deux Opca les plus concernés, Uniformation et Unifaf, sont plutôt bien accueillies par les représentants paritaires de ces deux organismes. Cependant, reste encore à trouver des modalités pratiques de mise en œuvre pour contourner des difficultés d'ordre pratique, au premier rang desquelles : une limitation des ressources financières, l'existence de nombreuses professions réglementées dans les branches, ou encore des difficultés pour les professionnels à assurer la fonction de tuteur. Alors que le projet de loi vient d'être adopté par le Parlement, nous avons interrogé Jean-Pierre Faucheux, président d'Uniformation, et Marcel Beutin, vice-président d'Unifaf, tous deux issus des rangs de la CFTC.

“Sur le principe, nous sommes prêts à participer, déclare Jean-Pierre
Faucheux. Nous attendons toujours un rendez-vous avec le ministère de la Formation professionnelle et de l'apprentissage. N'oublions pas que le ministre, Thierry Repentin, est signataire [ 1 ]Avant d'occuper son poste actuel, Thierry Repentin était président de l'Union sociale pour l'habitat, fédération patronale qui avait désigné Habitat Formation, ex-Opca des acteurs de la ville. Ce dernier a rejoint Uniformation dans le cadre de la réforme de 2009. du nouvel accord constitutif d'Uniformation ! Il connaît donc bien notre secteur." Même écho du côté de la vice-présidence d'Unifaf : “Il y a une volonté presque éthique de la branche. Beaucoup de nos établissements sont associatifs. Politiquement, nous sommes là !"

Des branches mobilisées

Ainsi, ce dernier souligne que les différentes branches d'Unifaf se mobilisent déjà pour la mise en place des emplois d'avenir : “Le bureau travaille avec les services techniques de l'Opca pour émettre des propositions qui devront ensuite être validées par le conseil d'administration. Notre objectif premier est de mettre en place des parcours qualifiants et certifiants pour les jeunes en difficulté. Il nous faut élaborer une ingénierie, pour permettre notamment à une partie des emplois d'avenir de basculer sur des contrats de professionnalisation. Ces parcours pourraient être articulés avec des dispositifs tels que la POE (préparation opérationnelle à l'emploi) et mis en œuvre avec la participation de Pôle emploi." Chez Uniformation, la réflexion est également bien entamée : “Nous avons déjà commencé à interroger toutes nos branches", indique ainsi Jean-Pierre Faucheux.

Un nombre limité de métiers concernés

Si les deux représentants d'Opca voient d'un bon œil le nouveau dispositif, ils affirment néanmoins que celui-ci ne pourra s'appliquer qu'à un nombre limité de secteurs et métiers. “Les emplois d'avenir s'adressent aux bas niveaux de qualification. Or, dans certaines de nos branches, le minimum requis est un niveau III (bac) et beaucoup de nos métiers sont réglementés. Des bas niveaux de qualification, nous en avons surtout dans l'aide à domicile, et il faut bien comprendre que c'est un secteur qui licencie aussi", affirme Jean-Pierre Faucheux. “Les emplois d'avenir concerneront surtout les activités générales de nos établissements, tout ce à qui a trait à l'accueil, la maintenance, la logistique, la cuisine… Cela pourra permettre aux jeunes de s'inscrire dans des parcours de formation débouchant sur des CAP", déclare quant à lui Marcel Beutin. “Nous pouvons également les orienter vers des formations qualifiantes de la branche de niveau V, qui mènent aux métiers d'aide-soignant ou d'aide médico-psychologique."

Trouver les financements

Comme à Uniformation, de nombreuses professions sont encadrées ou règlementées, et exigent des formations longues. Or, selon Marcel Beutin, “les budgets d'Unifaf ne suffisent déjà pas à satisfaire tous les besoins". Aussi, il craint que, dans le cadre des emplois d'avenir, les structures employeuses se voient imposer un reste à charge sur la formation des jeunes, “ce qui rendrait le dispositif moins incitatif". Selon lui, c'est un problème de financement qui risque ainsi de se poser. “Chez Unifaf, nous disposons depuis déjà longtemps d'une enveloppe de fonds mutualisés pour prendre en compte les demandes des jeunes, et cela dans le cadre des contrats aidés. Elle représente 2 millions d'euros, sachant que nous consacrons également 33 millions d'euros aux contrats de professionnalisation et 5 millions d'euros à l'indemnisation et à la formation des tuteurs. Avec l'arrivée des emplois d'avenir, il faut que le CA accepte d'augmenter l'enveloppe mutualisée, et c'est un effort que nous acceptons. Nous comptons également sur le FPSPP (Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels) pour nous aider, dans le cadre d'un appel à projets spécifique. Enfin, il faut creuser une autre piste : celle de la signature d'un Edec (engagement de développement des emplois et des compétences) avec l'État, qui déboucherait sur des Adec (actions de développement des emplois et des compétences) au niveau des territoires."

Mise en œuvre pratique du tutorat

La mise en œuvre pratique des emplois d'avenir devra également faire face, selon les deux représentants paritaires, de difficultés pratiques, notamment en ce qui concerne le tutorat. “Dans l'aide à domicile, les usagers sont souvent des personnes âgées qui acceptent qu'une autre personne vienne chez elles pour les assister. Seront-t-elles toutes disposées à accepter la venue d'un tuteur ?

Nous sommes sur des métiers où il faut être très prudents", explique Jean-Pierre Faucheux. “Les jeunes concernés par les emplois d'avenir sont souvent en difficulté sociale et ont besoin d'être tutorés. Toutefois, dans nos établissements, les personnes qui ont avant tout besoin d'être accompagnées sont les usagers, et pas le personnel ! Être tuteur, ce n'est pas le métier de nos professionnels, et je crois important de se pencher sur cette question : nous pouvons imaginer, par exemple, une externalisation du tutorat…", déclare Marcel Beutin. Il affirme, pour sa part, avoir eu la possibilité d'exprimer ses positions lors d'une rencontre tenue au ministère début octobre.

Notes   [ + ]

1. Avant d'occuper son poste actuel, Thierry Repentin était président de l'Union sociale pour l'habitat, fédération patronale qui avait désigné Habitat Formation, ex-Opca des acteurs de la ville. Ce dernier a rejoint Uniformation dans le cadre de la réforme de 2009.