Le président François Hollande devrait lancer les chantiers emploi-formation en juillet
Élu le 6 mai à la présidence de la République, François Hollande devrait lancer les chantiers sociaux de son quinquennat lors de la conférence nationale pour la croissance et l'emploi, le 21 juillet.
Au programme : politique de l'emploi et formation, sécurisation des parcours professionnels.
Par David Garcia - Le 16 mai 2012.
“La confiance, c'est à la jeunesse que la République doit l'accorder. Je lui rendrai la place qui doit être la sienne, la première. […] C'est la volonté qui m'anime pour rénover la formation professionnelle, pour accompagner les jeunes vers l'emploi et lutter contre toutes les précarités. Ce sera aussi la belle idée du service civique, que j'entends relancer." C'est ce qu'a déclaré le nouveau président, François Hollande, à l'occasion de son discours d'investiture, prononcé le 15 mai au Palais de l'Élysée. Au cours de l'événement, il a également indiqué que “de nouveaux espaces de négociations seront ouverts aux partenaires sociaux [...], aussi bien les représentants des syndicats de salariés que les organisations professionnelles".
Le 15 mai, le président de la République a nommé Premier ministre Jean-Marc Ayrault, jusqu'alors député-maire de Nantes et président du groupe SRC (Socialiste, radical, citoyen et divers gauche) à l'Assemblée nationale. Les membres du cabinet présidentiel ont également été nommés. Ainsi, Sylvie Hubac devient directrice de cabinet, Alain Zabulon directeur de cabinet adjoint, et Pierre Besnard prend le poste de chef de cabinet.
Insistant sur le thème des jeunes tout au long de sa campagne, lors de son premier discours, le soir de l'élection, l'ancien maire de Tulle a souhaité rappeler son souhait de créer 150 000 “emplois d'avenir". Il s'agira d'emplois du secteur non marchand (administration, collectivités locales, associations), des pleins temps d'une durée maximale de cinq ans, rémunérés à hauteur du Smic et financés à 75 % par l'État. Ces emplois pourront éventuellement être mobilisés dans le secteur marchand du développement durable, pour des entreprises à fort potentiel d'innovation. 100 000 devraient être créés l'année suivant l'entrée en vigueur de la loi, afin de permettre aux jeunes d'accéder au marché du travail, en particulier dans les “quartiers".
François Hollande a également annoncé la création de 500 000 “contrats de génération". Dans la perspective de permettre l'embauche en CDI de jeunes accompagnés par des salariés plus expérimentés et en fin de carrière.
Dans son projet présidentiel, François Hollande a également indiqué vouloir mettre en place, “en concertation avec les partenaires sociaux, la sécurisation des parcours professionnels, pour que chaque salarié puisse se maintenir dans l'entreprise ou l'emploi et accéder à la formation professionnelle". Le financement de la formation sera “concentré sur les publics les plus fragiles, les moins formés et les chômeurs". L'ancien président du Conseil général de Corrèze a assuré qu'il renforcerait les moyens de Pôle emploi.
Enfin, s'adressant à l'Unsa éducation, le candidat Hollande a promis de revenir sur la transformation des Gréta en GIP (groupements d'intérêt public) décidée par le gouvernement Fillon.
Se “décharger" sur les Régions de l'emploi et de la formation professionnelle ?
“En période de crise, il me semble pour le moins étrange qu'un État se décharge sur les Régions de questions aussi cruciales que celles de l'emploi et de la formation professionnelle. Ce serait même, à mon sens, une grossière erreur." C'est ce que déclare Stéphane Lardy, secrétaire confédéral de Force ouvrière, chargé de l'emploi et de la formation professionnelle, à L'Inffo. Interrogé sur les conséquences de l'élection de François Hollande pour la formation professionnelle, notamment en ce qui concerne les relations entre l'État et les Régions, qui sont aujourd'hui de même couleur politique à la seule exception, en métropole, de l'Alsace, il juge peu probable que le premier se décide à déléguer totalement l'emploi et la formation aux secondes.
“Que constate-t-on depuis quinze ans ? À chaque fois qu'un transfert de compétences a lieu vers les collectivités territoriales, l'État crée quelque chose en rajoutant une strate. Cette problématique tient plus à une question structurelle qu'à une simple opposition politique. Elle a également trait à la vision que l'on a de la République", observe-t-il.
D'autre part, Stéphane Lardy déclare ne pas saisir “exactement quel est l'acte II de la décentralisation". Interrogeant : “Qu'est-ce que le service public régional de l'emploi et de la formation ? Quelles en sont les conséquences en matière de politiques publiques de formation, notamment en matière d'égalité d'accès pour les salariés et les demandeurs d'emploi et en matière d'articulation et de coordination entre les différents acteurs du système ?"
Pour lui, la priorité à présent est de “clarifier les compétences". Mais “ce ne sera pas simple, car personne ne veut perdre la main, surtout en cette période de chômage de masse".
Le "nouvel acte de décentralisation"
Mettre en œuvre l'élargissement des compétences régionales en matière d'emploi et de formation. C'est l'un des défis de Marylise Lebranchu, ministre de la Réforme de l'État, de la Décentralisation et de la Fonction publique dans le nouveau gouvernement. Dans son programme, François Hollande évoquait un “nouvel acte de décentralisation, pour donner plus de responsabilités aux Régions en matière de développement économique, d'emploi et de formation".
Titulaire d'une maîtrise d'aménagement du territoire obtenue à l'Université de Rennes, Marylise Lebranchu a notamment été secrétaire d'État auprès du ministre de l'Économie de juin 1997 à octobre 2000, puis garde des Sceaux jusqu'en mai 2002. Députée depuis 1997 (Finistère), elle a été première vice-présidente du Conseil régional de Bretagne de 2004 à 2010 et s'est également investie dans la commune de Morlaix, dont elle a été maire de 1995 à 1998.
Le dialogue social, un “principe absolu" pour Michel Sapin
François Hollande a décidé dans son programme électoral de l'inscrire dans la Constitution.
Le dialogue social érigé en principe absolu, tel est l'état d'esprit dans lequel Michel Sapin a pris ses fonctions de ministre du Travail, de l'Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social (TEFD).
Le ministre a ainsi souligné, lors de la passation de pouvoirs, que le dialogue social serait “rétabli". Avec le chômage, deux dossiers apparaissent prioritaires : les retraites et le Smic. Pour l'un comme pour l'autre, le ministre a souligné “la nécessité du dialogue social, un pilier du redressement de notre pays". “Les ultimatums aux partenaires sociaux, c'est fini, avait-il même assuré le 16 mai dernier, sur France-Info. Notre société est en grande partie bloquée parce que le dialogue social est bloqué", le relancer “est tout à fait décisif pour l'avenir".
Lutte contre le chômage et création d'emploi ne pourront pas être traitées sans les partenaires sociaux. Celui qui s'est dit “choqué par l'absence de dialogue sur la mise en place de la TVA sociale et sur les accords compétitivité-emploi", aura donc à cœur de rétablir le contact.
Une première rencontre avec les partenaires sociaux aura lieu lors de la grande conférence sociale programmée le 21 juillet prochain. Aux yeux de Michel Sapin, nous vivons “une période de redressement pour la France aussi importante que celle de reconstruction après-guerre".
Un ministre expérimenté à la Formation professionnelle
Michel Sapin, le nouveau titulaire de la Formation
professionnelle, est tout sauf un novice. Jusqu'alors député de l'Indre, cet ancien élève de l'École nationale d'administration et de Normale Sup a déjà été ministre délégué auprès du ministre de la Justice en 1991-1992, avant d'être en charge de l'Économie et des Finances en 1992-1993. Lorsque le Parti socialiste revient au pouvoir, avec Lionel Jospin à la tête du gouvernement, il obtient le portefeuille de la Fonction publique et de la Réforme de l'État (2000-2002).
Davantage économiste que spécialiste des questions d'emploi et de travail − il était secrétaire national du PS chargé de l'économie et de la fiscalité depuis 2007 −, Michel Sapin a publié L'État en mouvement, en 2002.
Un ancien de l'ARF, conseiller social
Michel Yahiel, inspecteur général des affaires sociales, a été nommé conseiller social du président de la République, le 19 mai. Cet ancien élève de l'École nationale d'administration occupait jusqu'alors la fonction de délégué général de l'Association des Régions de France, opposée au précédent gouvernement sur le thème de la décentralisation de la formation professionnelle.
“Je l'ai connu quand il était directeur général du Fonds d'action sociale dans les années 1980, a indiqué Jean-Paul Denanot, président du Conseil régional de Limousin et de la commission formation de l'ARF, dans un entretien accordé à L'Inffo le 21 mai. Il va porter la voix des Régions sur la décentralisation, tant le président de la République est décidé à réussir la décentralisation." Jean-Paul Denanot assure que le nouveau conseiller sera la cheville ouvrière de l'organisation de la conférence sociale programmée en juillet : “Le dossier prioritaire, c'est la création d'une chaîne emploi-formation-orientation, qu'il faut traiter globalement."
Michel Yahiel a notamment été directeur des cabinets de Jean-Louis Bianco, puis de René Teulade, respectivement ministres des Affaires sociales et de l'Intégration (1991-1993), puis directeur général du cabinet Bernard Brunhes International (1996-1999) et président de l'ANDRH, Association nationale des directeurs de ressources humaines (2009-2010).
Gilles Gateau, directeur de cabinet
C'est à Gilles Gateau qu'il appartient désormais de diriger le cabinet de Michel Sapin, ministre du Travail.
Il avait occupé des fonctions de conseiller technique dans le cabinet de Martine Aubry, elle-même en charge du Travail entre 1991 et 1993, puis à Matignon auprès du Premier ministre Lionel Jospin, de 1997 à 2001.
Venu de l'ancienne ANPE, Gilles Gateau avait été en 2001 nommé directeur des compétences et de la performance sociale à EDF par Henri Proglio. Ce dernier, du fait de la pyramide des âges qui contraignait le groupe énergétique à renouveler à terme 50 % de son effectif, lui avait confié le projet “Défi Formation", visant à passer à 4 % d'alternants dans l'effectif total (105 000 personnes en France) d'ici à 2015, de préparer des jeunes sans diplôme au CAP et de créer un réseau de campus à travers toute la France. Des initiatives saluées par l'ensemble des partenaires sociaux.
Pour Jean-Michel Cerdan, secrétaire confédéral de la CFTC, membre de la commission logement de l'organisation syndicale et salarié d'EDF, l'arrivée de Gilles Gateau dans l'équipe de Michel Sapin est “une bonne nouvelle. Gilles Gateau est un homme très social, très à l'écoute et issu du monde du travail, du monde de l'entreprise".