Les employeurs de l'économie sociale, mobilisés pour la réussite des emplois d'avenir
Par Knock Billy - Le 01 novembre 2012.
L'Usgeres [ 1 ]Union de syndicats et groupements d'employeurs représentatifs dans l'économie sociale., fédération patronale de l'économie sociale et solidaire, tenait le 16 octobre à Paris sa 3e convention nationale, avec pour thème : “2012-2017 : les enjeux, la place des employeurs". Dans son intervention, le ministre du Travail, Michel Sapin, a insisté sur la “responsabilité en termes d'emploi" qui est celle des entreprises de l'ESS.
“La crise que nous traversons renforce cette utilité, mais démontre aussi que l'économie sociale et solidaire est mieux armée pour résister aux assauts du chômage, car elle est globalement en croissance, a-t-il déclaré. Depuis une dizaine d'années, l'ESS crée, proportionnellement, deux fois plus d'emplois que le secteur privé !"
Et de confirmer : “Vous êtes en première ligne dans la mise en place des emplois d'avenir." 500 000 jeunes ne sont ni en emploi ni en formation, et ces emplois d'avenir ont été conçus comme un “véritable marchepied vers l'emploi stable et durable. Le secteur non marchand est le premier mobilisé, vous en êtes des acteurs-clés et nous comptons sur vous". Ajoutant encore : “Je sais que vous avez cette fibre sociale et que l'insertion vous tient à cœur."
Le ministre a d'ailleurs assuré les employeurs de l'ESS qu'ils seraient également “en première ligne" pour la mise en œuvre du contrat de génération, appelé à constituer pour leurs structures “une aide précieuse" à l'embauche des jeunes en CDI et au maintien dans l'emploi des seniors. “Nous attendons de vous que vous soyez les militants de la qualité du travail dans un contexte où celui-ci est abîmé par le management au regard fixé sur le cours de la Bourse, par les cadences infernales, les horaires décalés ou les tâches vidées de sens. Tout n'est pas simple dans les secteurs d'activité qui sont les vôtres, tout n'est pas rose non plus, mais c'est aussi dans vos métiers que se gagne le combat de l'amélioration de la qualité de vie au travail."
Benoît Hamon, ministre délégué à l'Économie sociale et solidaire et à la Consommation, a présenté les grandes lignes de l'action qu'il entend construire avec les employeurs de l'ESS, leur demandant, lui aussi, une “forte mobilisation" pour recruter des jeunes en emploi d'avenir, et aussi une “exemplarité encore accrue" dans la mise en œuvre du droit du travail, notamment sur le plan de l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes.
“Nous sommes en mesure de participer à cet effort"
Alain Cordesse, le président de l'Usgeres, a répondu à nos questions sur le rôle que les entreprises de l'ESS entendent jouer dans la mise en œuvre des emplois d'avenir. “Aujourd'hui, nous sommes en mesure de participer à cet effort", nous a-t-il assurés. L'Usgeres est persuadée que les collectivités, quelle que soit leur couleur politique, s'y engageront pleinement. Et que, de fait, l'économie sociale est attendue en première ligne sur la réussite de ce dispositif. “Nous nous sommes beaucoup investis dans l'élaboration du texte de loi. Nous avons rencontré les acteurs du dossier au sein du gouvernement, Michel Sapin, Benoît Hamon, ainsi que le Premier ministre et Claude Bartolone, le président de l'Assemblée nationale." L'Usgeres a d'ailleurs jugé certains amendements “attentatoires" aux potentialités de réussite du dispositif. C'est pourquoi elle est intervenue “dans le sens d'un rééquilibrage" du texte.
L'organisation patronale souscrit au fait que les jeunes très éloignés de l'emploi bénéficient prioritairement du dispositif. Mais ne veut pas pénaliser les salariés diplômés résidant dans les quartiers difficiles. De plus, sur les 70 types d'emplois répertoriés dans l'économie sociale, elle en a repéré cinq de niveau VI et neuf de niveau V. Envisageables dans l'économie sociale, elle juge qu'ils doivent être prioritaires et faire l'objet d'actions de formation “considérables". Et le collège employeurs d'Uniformation, l'Opca de l'économie sociale, s'est déclaré prêt à faire un effort à hauteur de “dizaines de millions d'euros". L'objectif étant de favoriser la formation des jeunes de ces niveaux (V et VI) afin de les mettre en responsabilité devant les emplois. Mais, souligne Alain Cordesse, “nous ne nous y engagerons que si nous sommes soutenus financièrement". Notamment par le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP), les Régions et les Opca. “Cela nous permettrait de former un nombre important de jeunes avec un système de tutorat efficace."
Une revendication : siéger dans les instances représentatives
Au sujet du taux de contribution au FPSPP établi, pour 2013, à 13 %, Alain Cordesse ne peut qu'en prendre acte. “Ne siégeant pas au FPSPP, nous ne pouvons qu'émettre un avis..." Précisément, pense-t-il que la demande de l'Usgeres de siéger dans les instances représentatives du dialogue social puisse aboutir ? “Nous sommes optimistes sur ce point. Le ministre a fixé de façon ferme juin 2013 pour que tout soit clarifié. Certes, le dialogue social est engagé sur de nombreux sujets importants et il ne s'agit pas pour nous de brouiller les pistes."
Le fait que “l'ensemble des organisations patronales" − Medef, CGPME, UPA, mais aussi UnaPL [ 2 ]Union nationale des professions libérales., FNSEA [ 3 ]Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles. et, bien sûr, Usgeres − aient participé, le 16 octobre, dans le cadre de la convention nationale, à une table ronde intitulée “Évolution de la démocratie sociale, agenda social, dialogue social : quel positionnement des employeurs ?", constitue, aux yeux d'Alain
Cordesse, “un geste emblématique d'une volonté d'évoluer de la part de tous les acteurs".
Et d'ajouter : “Nous souhaitons, notamment, siéger au sein du FPSPP, du CNFPTLV et du Conseil supérieur de la Prud'homie. Non pour faire acte de présence, mais pour apporter le savoir-faire de l'économie sociale ! Nous devons mieux répartir les représentations et nous les partager entre tous les employeurs. Quels que soient les secteurs, nous rencontrons les mêmes problèmes en matière de gestion des ressources humaines."
Le ministre du Travail, de l'Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social a annoncé qu'il proposerait au Premier ministre que l'Usgeres puisse disposer d'un représentant, en tant que personnalité qualifiée, au sein du Conseil d'orientation pour l'emploi. “C'est un bon signe", pour son président.
Un portail des offres d'emploi dans l'ESS
À l'issue de son intervention, Benoît Hamon a signé avec le président de l'Usgeres un protocole de partenariat par lequel le ministère délégué à l'Économie sociale et solidaire soutient la création d'un portail des offres d'emploi dans l'ESS “orienté vers les jeunes et faisant la promotion des emplois d'avenir et des futurs contrats de génération", une étude de terrain sur l'emploi des jeunes dans ce secteur, pour identifier et lever les freins à leur recrutement, et enfin des “actions de mobilisation et d'information des employeurs" pour faciliter, donc, l'intégration des emplois d'avenir et contrats de génération dans les stratégies des entreprises de l'ESS − et “œuvrer ainsi à leur pérennisation".
“Nous devons répondre positivement sur les emplois d'avenir, par solidarité"
Avec quels moyens Uniformation souhaite-t-il accompagner la mise en œuvre des emplois d'avenir ?
Pour le moment, nous n'avons pas tranché sur les moyens. Notre décision sera prise dans le cadre paritaire habituel employeurs-salariés. Nous nous devons de répondre positivement sur les emplois d'avenir, par solidarité. Si nous ne faisons pas un pas vers les publics visés par ce dispositif, nous n'aurons pas les moyens d'en payer le coût social dans quelques années.
Les emplois d'avenir étant un programme de solidarité nationale, nous ne pourrons les supporter sur les seuls fonds mutualisés de l'Opca. Il faudra un cofinancement de la part du FPSPP. Car une partie des publics que nous formerons dans le cadre de ce dispositif sera amenée à exercer à terme dans d'autres milieux que ceux de l'économie sociale et solidaire.
La participation financière des Régions dans le dispositif nous semble également importante. Nous étudions avec elles comment articuler nos participations : complément de rémunération, intervention sur la formation (aspects pédagogiques, frais annexes), etc.
Notre intervention pourrait concerner les actions de professionnalisation, le plan de formation (mais pas sur toutes les sections financières). Il pourrait y avoir également des actions de pré-qualification (savoirs de base, remise à niveau, apprentissage du français, travail en équipe, informatique, etc.) et des actions aboutissant à de réelles qualifications ou à des certifications. Nous devons faire en sorte de donner au jeune les outils lui permettant de s'insérer dans l'emploi.
Comment pourriez-vous financer ces actions tout en continuant à répondre aux besoins de formation des salariés de l'économie sociale et solidaire ?
Les branches professionnelles de notre Opca ont souvent des accords qui vont très au-delà de l'obligation légale. Pour le plan, certaines petites entreprises versent jusqu'à 2 %, au lieu de 0,4 %. Ces branches se sont donné les moyens pour soutenir la formation dans les professions très réglementées et sur lesquelles il n'existe pas, ou peu, de formations initiales (aide à domicile, sports, par exemple). Nous devons donc garder suffisamment de moyens pour répondre aux politiques des branches. Nous ne devons pas les en priver.
Nous devons cibler certaines actions concernant notamment les savoirs de base. Nous avons reçu de la part du FPSPP une enveloppe de près de 20 millions d'euros pour la qualification de salariés dans ce domaine.
Avec le taux de 13 % (L'Inffo n° 820, p. 2), nous aurons à verser au FPSPP entre 40 et 42 millions. Une telle contribution significative nécessite, sans parler de droit de retour, que nous soyons pris en compte dans les priorités définies par le Fonds paritaire.
Notes
1. | ↑ | Union de syndicats et groupements d'employeurs représentatifs dans l'économie sociale. |
2. | ↑ | Union nationale des professions libérales. |
3. | ↑ | Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles. |