Pôle emploi - Les syndicats désapprouvent le plan “Pôle emploi 2015"
Par Benjamin d'Alguerre - Le 01 décembre 2012.
Aucun suffrage favorable [ 1 ]Ont voté contre : FO, le SNU-FSU, la CGT, Sud, la Snap et la CFTC. Se sont abstenues la CFDT, la CFE-CGC et l'Unsa. , six votes négatifs et trois abstentions. Réunis en comité central d'entreprise le 20 novembre, les organisations syndicales de Pôle emploi ont massivement désapprouvé les nouvelles modalités d'accompagnement des demandeurs d'emploi inscrites dans le cadre du plan “Pôle emploi 2015" proposé pour consultation par la direction de l'ex-ANPE.
Rappel des faits : lors de son arrivée à la tête du service public de l'emploi, en septembre dernier, Jean Bassères avait présenté son plan de rénovation de l'opérateur public à l'horizon 2015, prévoyant, notamment, la fin du suivi personnel mensualisé (SMP) des demandeurs d'emploi dans le but de mobiliser en priorité les conseillers vers les chômeurs les plus éloignés de l'emploi. “Faire plus pour ceux qui en ont le plus besoin", disait-on alors à la direction de Pôle emploi. Un “plus" qui s'appuyait sur l'engagement pris par Michel Sapin en juin 2012 de créer de 2 000 postes de conseillers supplémentaires en CDI d'ici la fin de l'année pour renforcer les équipes au sein des agences.
L'inadéquation des moyens et des besoins
Pierre angulaire de cette réorganisation de Pôle emploi, le “suivi différencié" des chômeurs en fonction de leur éloignement de l'emploi aurait dû contribuer à alléger les portefeuilles des conseillers afin que ces derniers concentrent leurs efforts sur les inscrits les plus fragiles. Ainsi, les publics les plus éloignés de l'emploi sont susceptibles de bénéficier d'un “accompagnement renforcé", géré par un agent de l'opérateur public en charge de 70 demandeurs d'emploi au maximum. Un “accompagnement de suivi" concerne les publics “médians" (soit un portefeuille de 150 à 200 demandeurs d'emploi par conseiller). Quant aux chômeurs les plus proches de l'emploi, leur situation relève d'un “accompagnement guidé" assuré par un conseiller susceptible de gérer entre 200 et 350 dossiers.
Or, aux yeux des membres du CCE réunis le 20 novembre, les moyens actuels de Pôle emploi ne correspondent pas aux objectifs de la direction. “Sans renforts supplémentaires, c'est une gageure", juge Loïc Barboux, représentant syndical Force ouvrière au CCE de l'opérateur public, joint par L'Inffo le 22 novembre. La raison : l'inadéquation entre le nombre de conseillers – fût-il renforcé par l'arrivée de 2 000 CDI supplémentaires – et la brusque augmentation du chômage enregistrée au cours des derniers mois. “Depuis un an, la France compte près de 350 000 demandeurs d'emploi supplémentaires et nous en attendons autant l'année prochaine. Chaque jour, ce sont 90 nouveaux chômeurs qui sont reçus par les conseillers Pôle emploi pour un entretien d'inscription et de diagnostic (EID), première étape de leur inscription au chômage. À ce rythme, il ne faut qu'une semaine pour remplir un nouveau portefeuille ! Les agents en charge d'un accompagnement renforcé devront suivre entre 140 et 210 demandeurs d'emploi au lieu des 70 prévus. Dans ces conditions, il est impossible d'assurer un accompagnement de qualité".
Un constat qui s'appuie, notamment, sur les travaux de la mission parlementaire “Travail et emploi" dans lesquels le député PS Jean-Patrick Gille estime qu'“un alignement sur les capacités d'accompagnement de l'Allemagne ou du Royaume-Uni nécessiterait le recrutement de 20 000 agents supplémentaires". FO, pour sa part estime que les volumes présentés dans le plan Pôle emploi 2015 ne sauraient être tenus à moins de 10 000 recrutements de nouveaux conseillers.
Les efforts de l'État salués, mais…
La CFDT, pour sa part, estime les besoins à 3 000 nouveaux agents (en plus des agents supplémentaires dont le recrutement est en cours). Et si elle a préféré s'abstenir, c'est “qu'elle salue les efforts déjà consentis par Michel Sapin", comme l'explique Pascal Nezan, représentant syndical cédétiste au CCE. “Sur le papier, la CFDT partage les orientations stratégiques du plan, tranche-t-il, en revanche, nous restons prudents face aux chiffres annoncés par la direction concernant les gains de productivité gagnés grâce à des redéploiements internes, notamment via le transfert d'agents du siège dans les agences. Pour l'instant, ces chiffres ne sont pas vérifiés et ne le seront probablement pas en 2013". Dans ces conditions, il paraît difficile au représentant CFDT d'assurer un suivi de qualité, “particulièrement dès lors que Pôle emploi s'inscrit dans une démarche d'accompagnement des demandeurs d'emploi dans des dispositifs de formation tout au long de la vie".
Suite à cette consultation, la direction nationale de Pôle emploi entrera, dans les semaines à venir, dans une phase de consultation des agences régionales. “Chaque Pôle emploi régional discutera pied-à-pied en fonction des situations de terrain", annonce Loïc Barboux. À la CFDT, “les instances nationales se tiennent prêtes à épauler les représentants syndicaux dans les territoires dans leurs négociations sur les déclinaisons locales de ce plan", prévient pour sa part Pascal Nezan.
Jointe par L'Inffo, la direction de Pôle emploi confirme les trois fourchettes indicatives attribuées aux conseillers selon l'éloignement des chômeurs par rapport à l'emploi. Toutefois, elle n'écarte pas la possibilité qu'il y ait à certains moments “des pics d'activité compte-tenu des variations saisonnières importantes dans certains bassins d'emploi", et que certains portefeuilles atteignent des niveaux supérieurs que la fourchette haute. Elle précise que 20 000 agents, au lieu de 18 000 à fin juin, auront en charge un portefeuille de demandeurs d'emploi, la moitié se consacrant exclusivement aux entretiens.
Notes
1. | ↑ | Ont voté contre : FO, le SNU-FSU, la CGT, Sud, la Snap et la CFTC. Se sont abstenues la CFDT, la CFE-CGC et l'Unsa. |