CCCA-BTP : la vie de l'apprenti passée au crible pour mieux répondre à ses besoins

Par - Le 16 septembre 2013.

Une enquête du Comité de concertation et de coordination de l'apprentissage du BTP révèle que la
mobilité constitue une solution envisagée par les apprentis pour accroître leurs chances d'insertion.
Mais le réseau constate que l'apprentissage fait les frais du contexte économique morose.

Les partenaires sociaux ont la
volonté d'engager une politique
d'apprentissage, ce qui pour
nous traduit une double ambition
: assurer la réussite du projet
professionnel des jeunes et répondre
aux besoins de compétences et de qualifications
des entreprises de BTP."
C'est ce qu'a rappelé Daniel Munoz,
directeur de la formation au sein du
Comité de concertation et de coordination
de l'apprentissage du bâtiment
et des travaux publics (CCCABTP),
lors de la présentation d'une
enquête nationale relative à la formation
des apprentis, le 4 septembre
dernier à Paris.
Une enquête du Comité de concertation et de coordination de l'apprentissage du BTP révèle que la
mobilité constitue une solution envisagée par les apprentis pour accroître leurs chances d'insertion.
Mais le réseau constate que l'apprentissage fait les frais du contexte économique morose.
Il a également indiqué que le réseau des
CFA du BTP représente “près de 15 %
des apprentis tous secteurs d'activité
confondus, et affiche un taux de réussite
et d'insertion professionnelle de plus de
80 %". Par exemple, sept mois après la
fin de la formation, 85 % d'apprentis
en charpente bois trouvent un emploi,
80 % de couvreurs, 89 % dans les travaux
publics ou encore 75 % de carreleurs.

La baisse des signatures de contrats d'apprentissage

Malgré ces bons résultats, les effectifs du
réseau du CCCA-BTP continuent de
fléchir, soit une baisse de 14,5 % entre
2007 et 2012. À ce titre, Daniel Munoz
a exprimé son inquiétude, en évoquant
“la baisse des signatures de contrats d'apprentissage
en raison de la difficulté pour
les jeunes de trouver des entreprises d'accueil
et d'un développement important du
bac pro dans les lycées professionnels, qui ne
correspond pas forcément avec les besoins
des entreprises". De plus, a-t-il souligné,
“compte tenu du contexte économique
morose, le secteur a estimé à 40 000 les
pertes d'emplois en 2013 (25 000 salariés
et 15 000 intérimaires). Des prévisions
de notre secteur qui devraient néanmoins
s'inverser en 2015."

L'annonce par le gouvernement [ 1 ]L'Inffo n° 839, p. 2., le
mois dernier, de la suppression de
l'indemnité compensatrice forfaitaire
(ICF) pour les entreprises de 10 salariés
et plus qui embauchent un apprenti,
n'a, pour le moins, pas été perçue
comme un élément favorable, “même
s'il est nécessaire de réformer le système
d'aides aux entreprises". En effet, plaide
Daniel Munoz, “les aides aux employeurs
comptent de façon importante. Le problème
est aussi que les entreprises artisanales
ont des difficultés à savoir combien
va leur coûter un apprenti et de ce point
de vue, il est nécessaire que les exonérations
soient plus simples à identifier".

Au sujet du document de cadrage du
gouvernement relatif à la concertation
sur l'apprentissage, le directeur formation
du CCCA-BTP considère qu'il
est “nécessaire de mobiliser les moyens
sur les formations destinées aux apprentis
les moins qualifiés (niveaux IV et V),
comme l'avait annoncé Thierry Repentin,
ancien ministre délégué en charge de
la Formation".

Accompagnement et pédagogie dans les CFA

Malgré ces diverses craintes, l'association
nationale, professionnelle et paritaire
poursuit ses actions pour enrayer
la baisse des apprentis au sein de son
réseau : améliorer les outils pédagogiques
des CFA, répondre à l'évolution
des besoins des jeunes, aller à la rencontre
des entreprises pour les inciter
à former, sensibiliser les familles aux
débouchés des métiers du BTP...

En matière d'accompagnement des
apprentis, par exemple, l'association a
mis en œuvre, en partenariat avec Pro
BTP [Groupe de protection sociale du [BTP[/footnote], groupe de protection sociale
au service du bâtiment et des travaux
publics, une formation à destination
du personnel socioéducatif des CFA.
“Nous avons également développé, a témoigné
Céline Sanhaji, responsable de
l'accompagnement éducatif du CFA
BTP de Rouen, un réseau de parrains
(retraités du BTP bénévoles) afin d'accompagner
les jeunes apprentis à trouver
des entreprises et de les aider dans leurs
difficultés (gestion de leur budget, aide
financière, assurance personnelle et logement,
etc.). Pour donner du corps à cette
action visant à aider les jeunes à devenir
plus autonomes, nous l'avons intégrée à
leur formation. En outre, au sein de notre
établissement, nous avons élaboré des
modules de formation pour les maîtres
d'apprentissage à partir des journées de
rencontres entre employeurs et apprentis."

Par ailleurs, Daniel Munoz a émis le
souhait d'“une bonne concertation avec
l'Éducation nationale". Le système Affelnet
(affectation des élèves sur le net),
qui permet aux élèves de troisième de
lister par ordre de préférence le lycée
(général, technologique ou professionnel)
où ils veulent aller à la rentrée, “ne
fait apparaître qu'en bas de page une
case apprentissage sans plus de détails,
déplore-t-il. Il existe deux voies d'égale
dignité, l'apprentissage en CFA et la voie
scolaire, et la préservation des périmètres
de chacun n'a aucun sens."

Baromètre de la vie de l'apprenti"

À l'occasion de la rentrée des jeunes
en apprentissage, l'enquête nationale
du CCCA-BTP intitulée “Baromètre
de la vie de l'apprenti" révèle que
“l'apprentissage a répondu aux attentes
des apprentis pour 89,7 % d'entre eux".
L'association a en effet interrogé les
65 000 apprentis en formation de son
réseau, “afin de mieux identifier leur
motivation mais aussi leur sentiment et
leur aspiration à l'entrée, au cours et postérieurement
à leur parcours de formation
en apprentissage", a indiqué Daniel
Munoz.

Après l'obtention de leur diplôme,
souligne l'enquête, “39,7 % des jeunes
comptent trouver un emploi, et 40 %
souhaitent continuer leur formation dans
le BTP en apprentissage : pour 42,5 %
d'entre eux pour avoir plus de chance de
trouver un emploi qui leur convienne
et pour 67,9 % pour se spécialiser dans
le métier". Par ailleurs, “67,3 % envisagent,
à l'issue de leur formation, de
travailler dans le BTP, 57 % sont prêts
à partir dans une autre région pour y
trouver du travail et 46,7 % sont prêts à
partir pour l'étranger". Daniel Munoz a
attiré l'attention sur “cette mobilité des
apprentis pour trouver un emploi, alors
même que le discours ambiant tend à
insister sur une nécessaire proximité du
lieu de travail".

De son côté, Gilles Moreau, sociologue
à l'Université de Poitiers, a confirmé
que “plus d'un jeune sur deux, et ce dès
le CAP, intègre l'idée de la mobilité dans
la réalisation de son projet professionnel".
Au sujet du CAP, a-t-il ajouté,
“sa valeur diffère selon les branches,
mais dans le bâtiment, il reste associé au
bac pro. Il constitue le premier diplôme
de la classification ouvrière".

Difficile recherche d'un maître d'apprentissage

Un autre enseignement de l'enquête
concerne la vie et la formation en entreprise.
Malgré certaines difficultés,
“60 % des apprentis disent avoir cherché
leur entreprise d'accueil eux-mêmes
et 47 % par le biais d'un proche". En
majorité (94,1 %), ils estiment avoir
été bien accueillis à leur arrivée dans
l'entreprise et ils jugent bonnes les
relations avec leur maître d'apprentissage
(89,7 %) et avec les autres ouvriers
(92,4 %). D'après 58,5 % des
apprentis, ce qui est indiqué dans le
livret d'apprentissage (support de liaison
entre l'entreprise et le CFA) est “au
moins pris en compte de temps en temps
dans l'entreprise".

Un renouvellement du profil social type

“Depuis le début de la crise, note l'association
nationale, on constate un durcissement
dans la recherche d'un maître
d'apprentissage en entreprise. L'enquête
révèle que 37,8 % des apprentis disent
que la recherche s'est avérée difficile. Les
difficultés croissent avec l'élévation du
diplôme, révélatrices en cela des besoins
limités des entreprises."

Par ailleurs, plus de 80 % des apprentis
s'estiment satisfaits de leur formation
en CFA, tandis que l'accueil en entreprise
a été de bonne qualité pour 94 %
d'entre eux. Que ce soit au plan des
relations avec le personnel du CFA ou
de celles en entreprise, l'écrasante majorité
des jeunes en apprentissage dans
le bâtiment exprime de la satisfaction.
Concernant leurs motivations, plus des
trois quarts des interrogés affirment
qu'ils se sont orientés vers l'apprentissage
pour toucher un salaire. De plus,
huit sur dix habitent chez leurs parents.
“Il y a un renouvellement du profil
social type de l'apprenti", résume Gilles
Moreau.

Une nouvelle vague d'enquêtes sera
menée l'année prochaine, dans la perspective
de la 4e édition de la Rencontre
nationale des apprentis, organisée fin
2014 par le CCCA-BTP.

Notes   [ + ]

1. L'Inffo n° 839, p. 2.