Entretien avec Stéphane Diebold, président du Groupement des acteurs et responsables de la formation en entreprise
Par Knock Billy - Le 16 janvier 2013.
“Le Garf : une organisation d'agitateurs d'idées à partir des pratiques"
Le Garf vient de renouveler son bureau [Voir L'Inffo n° 822, p. 13.[/footnote] . Le conseil d'administration a élu Stéphane Diebold, directeur formation au sein du groupe [Réjean Dancause, nouveau président, en remplacement de Gerald Lefèvre. Tour d'horizon des projets en cours ou à venir, entre régionalisation, “européanisation" et “réécriture de la pédagogie".
Quels sont les grands chantiers du nouveau bureau du Garf ?
Une des grandes orientations que nous avons retenue est de recréer du lien pour favoriser une association apprenante. Pour ce faire, nous travaillerons au développement des activités avec les réseaux sociaux, la Web TV. Le développement de cette dernière est un axe important dans nos actions, qui nécessitent de créer de nouveaux canaux de communication. Avec le Garf 2.0 et le Garf TV, nous disposons de nouveaux outils pour cette communication nouvelle qui enrichissent nos publications habituelles.
À ce propos, signalons la parution, en décembre 2012, de l'étude “Apprendre en situation de travail - Apports de la didactique professionnelle".
Lors de la dernière convention nationale, nous avons pris l'engagement de poursuivre la dynamisation du Garf avec une accentuation du travail de régionalisation de notre organisation. C'est aussi l'un des axes prioritaires de notre mandat. Dans ce cadre, nous entendons créer des outils de convivialité, en développant de grands pôles régionaux concertés pour favoriser une véritable stratégie locale portée conjointement par le local et le national. Il s'agit pour nous de rapprocher davantage notre organisation du terrain. Nous prônons une décentralisation forte de notre organisation, afin d'être capables de développer des grandes zones de compétences (sortes de zones d'excellence) où nous pourrons recréer des liens avec les territoires. Ainsi, pourrons-nous donner à chacune des zones une vraie dynamique portée par nos vice-présidents, montrant par là-même l'implication globale de notre bureau.
Nous entendons également travailler sur l'internationalisation de nos activités pour avoir plusieurs points de vue sur les pratiques de la formation au sein de l'entreprise. Il s'agit pour nous de collaborer davantage avec nos collègues internationaux afin de bénéficier de visions différentes et de nous enrichir mutuellement. Nous entendons travailler surtout avec nos collègues d'Europe et d'Amérique du Nord. L'européanisation du Garf est un angle prioritaire. Il s'agit de promouvoir les nouvelles opportunités européennes en sy nergie avec les associations partenaires, dont la Fédération européenne pour la formation et le développement (ETDF) [Créée le 11 mars 1993, [ETDF rassemble des associations nationales et des institutions de formation et de ressources humaines à but non lucratif.[/footnote] , qui nous soutient pour faire le lien entre les “garfistes" et l'Europe.
Les nouveaux outils de communication sont pour le Garf un des moyens efficaces pour nos actions à l'international.
Dans une situation de crise économique, où les prévisions des budgets formation des entreprises sont en baisse, quel rôle les responsables formation peuvent-ils jouer ?
Bien sûr, ils ont un rôle important à jouer. Les responsables formation peuvent aider les entreprises à optimiser les dépenses formation, par une meilleure gestion budgétaire et financière.
n budget, quel que soit son montant, est aussi une politique. En temps de crise, l'innovation est un atout. Ce n'est pas parce qu'un responsable formation dispose d'un budget réduit qu'il doit être moins percutant.
Il peut être performant et meilleur avec moins de moyens. Nous avons un impératif d'innovation. Le Garf en est le lieu. Laboratoire d'innovations sociales, le “Garf Lab" peut permettre de nombreuses innovations de pratiques et d'échanges avec les collègues.
Quels rôles le Garf peut-il jouer dans le cadre des nouveaux dispositifs concernant la formation ou l'emploi (“compte personnel de formation", emplois d'avenir, etc.) ?
Le projet de CPF s'inscrit dans la suite de la politique engagée par l'État d'individualisation de la formation. Il y a une cohérence et une complémentarité des outils. Il serait, à nos yeux, utile de mélanger Dif et Cif. Cependant, nous estimons que cette individualisation nécessite de développer le collectif. Tout l'enjeu de l'entreprise n'est pas tant de porter cette individualisation, mais de porter la dimension collective. Car un individu n'aura de la motivation que si, collectivement, il intègre une aventure humaine. Penser l'individualisation comme seul vecteur empêche de marcher sur ses deux jambes. L'individu se réalise dans le collectif. C'est le rôle de l'entreprise que de recréer du sens pour le salarié. Seule la formation peut lui permettre de jouer ce rôle.
Et le responsable formation est au centre de cette œuvre...
Ce qui suppose une autre pédagogie !
Tout ceci repose la question de la place de la formation et de la réécriture de la pédagogie. Car une pédagogie formative doit respecter les temps nouveaux : on va de plus en plus vite en formation, avec la multitâche, la “pensée mosaïque", etc. On sort du sérail linéaire, on y intègre l'“érotisation de la formation" ! De tous ces éléments, émerge une nouvelle écriture, avec une mise à jour de bonnes et belles pratiques... Les entreprises qui souhaitent faire réellement de la formation devront, d'une manière ou d'une autre, revoir leurs contenus et leurs contenants. En matière d'innovation pédagogique, les entreprises de petite taille, parce que plus flexibles et souvent matures, sont plus aptes à mettre en place de nouvelles modalités de formation. Plus que la taille, l'important dans ce domaine, c'est la maturité de l'entreprise. À condition que celle-ci comprenne la formation comme un élément stratégique pour son développement. Le métier de la formation est d'assurer la transformation. Dans un monde en perpétuelle transformation, ne pas former expose l'entreprise à un risque d'obsolescence rapide.
Quel rôle peut jouer l'organisation des responsables formation pour une meilleure compétitivité des entreprises ?
Le Garf est une organisation d'agitateurs d'idées à partir des pratiques. Nous avons des retours sur les écosystèmes de pratiques apprenantes, de nouvelles pédagogies nous permettant d'avoir des analyses et des propositions utiles.
La performance de l'entreprise ne réside pas que dans la gestion des compétences, elle dépend aussi de professionnels bien outillés pour répondre aux problèmes. Le rôle du Garf est donc de permettre à l'entreprise de se doter de nouvelles formes d'apprentissage au service de sa performance (Web radio, Web TV, réseaux sociaux, etc.). Nous sommes l'unique organisation en France où des professionnels de la formation réfléchissent et échangent à partir de leurs expériences et pratiques afin de proposer aux entreprises des pistes efficaces pour accroître les compétences de leurs collaborateurs, et ainsi leur compétitivité !
L'association constitue un réseau de professionnels qui contribue à “développer les ressources humaines et la dynamique des compétences dans les organisations". Créé en 1954, le Garf regroupe environ 800 professionnels, représentant 750 entreprises ou administrations, mais aussi des chercheurs, des universitaires, des acteurs de la formation représentant l'offre et son financement. C'est un lieu d'expertise et de ressources issues de cinquante années d'activités dans les entreprises. Les membres du Garf accompagnent les stratégies industrielles et humaines de leurs organisations. Ils sont répartis en 30 groupes de travail sur le territoire national. Chacun étant animé par un président.