François Bonneau, président de la Région Centre et de la commission éducation de l'ARF : « S'inscrire au cœur du continuum formation-orientation-développement économique »
Par Philippe Grandin - Le 16 septembre 2013.
Les Conseils régionaux entendent exercer pleinement la « coresponsabilité » que prévoient les réformes en cours en matière d'orientation et de formation professionnelle. François Bonneau, président de la Région Centre et de la commission éducation de l'Association des régions de France, a répondu à nos questions, mardi 24 septembre.
Qu'est-ce que le texte de loi de « refondation de l'école » apporte de plus aux Régions concernant l'élaboration de la carte des formations professionnelles initiales ? Auront-elles finalement le dernier mot à ce sujet ?
Jusqu'aux nouvelles orientations prises par Vincent Peillon, les textes étaient faits de telle manière que chacun travaillait de son côté, la Région élaborant la carte des formations en apprentissage et les autorités académiques celle des formations en lycée professionnel ou agricole. C'était un gâchis de ne pouvoir articuler ces deux documents, au détriment des jeunes et des territoires. Désormais, avec la loi de refondation de l'école de la République, c'est la Région qui va arrêter la carte des formations en formations professionnelles initiales, qu'elles soient en lycée ou en CFA, après un dialogue avec les autorités académiques. C'est là une avancée considérable, gage d'efficacité, d'une collaboration efficiente entre les acteurs et l'adaptation aux réalités économiques et sociales des territoires.
En quoi l'expérimentation du service public régional de l'orientation (SPRO) fait-il écho au projet de loi sur la décentralisation ?
L'exemple de la construction récente des CPRDFP (contrats de plan régionaux de développement des formations professionnelles) montre que, quand les Régions sont à l'initiative, elles peuvent travailler en bonne intelligence et dans le sens de l'intérêt général avec les services préfectoraux et académiques, tout en approfondissant le dialogue avec les partenaires sociaux. Ces nouvelles dispositions vont permettre d'améliorer l'offre de formation de proximité faite aux jeunes, tout en l'articulant avec le développement économique du territoire.
Plus largement, le deuxième projet de loi sur la décentralisation prévoit de donner de nouvelles compétences aux Régions qui devraient les inscrire au cœur du continuum formation-orientation-développement économique.
En quel sens ?
D'un part, il est prévu de leur donner des compétences renforcées en matière de pilotage de l'apprentissage en particulier et de la formation professionnelle en général, allant dans le sens du service public régional de la formation tout au long de la vie que l'ARF appelle de ses vœux. Le même projet de loi prévoit de confier aussi à la Région la coordination des acteurs chargés de la prise en charge des décrocheurs, ces jeunes (187 736 jeunes identifiés en mars 2013) sortis sans diplôme de formation initiale, par le biais du pilotage des « plateformes de suivi et d'appui ».
Enfin, la Région est aussi appelée à animer le service public de l'orientation sur son territoire, c'est-à-dire à coordonner l'action des opérateurs de l'orientation. Rappelons simplement que le principal problème en matière d'information des jeunes et des adultes vient du nombre important d'acteurs (plus de 8 000 points d'information sur l'orientation sur le territoire national [ 1 ]CIO, Missions locales, Pôle emploi, réseau Information jeunesse, Apec, Fongecif, Agefiph-Cap emploi, Maisons de l'emploi, Cités des métiers, services et opérateurs des collectivités, établissements d'enseignement et organismes de formation, chambres consulaires, associations… ) et de l'absence d'un pilotage organisant la coordination et donc la cohérence des services, des dispositifs et des interventions au profit des jeunes. Et l'expérience de la mise en place par le précédent gouvernement d'un Service public de l'orientation a montré qu'il n'était pas possible de travailler dans tous ces domaines sans les Régions et sans s'appuyer sur le travail engagé au niveau territorial dans le cadre de l'élaboration des CPRDFP.
L'expérimentation du SPRO va être engagée cette année...
Elle permettra de voir, sur la base des politiques déjà menées par les Régions, comment répondre de la meilleure façon aux demandes des jeunes et des adultes en matière d'accueil, d'information, de conseil et d'accompagnement. Car c'est des besoins exprimés par les citoyens qu'il faut partir pour réorganiser l'action publique dans ce domaine, au plus près du terrain. C'est pourquoi, si un cadre de travail national a été élaboré avec les huit Régions [ 2 ]Aquitaine, Centre, Limousin, Pays de la Loire, Bretagne, Rhône-Alpes, Poitou-Charentes, Auvergne. et les sept ministères concernés, les traductions de ce SPRO peuvent différer selon les territoires, leur histoire, les acteurs présents, les stratégies en matière de développement économique…
Cela me permet d'insister sur un second point. Des marges de progrès existent pour améliorer l'insertion professionnelle des jeunes, tout en concourant au développement des industries et des services. Un strict « adéquationnisme » formation-emploi n'est ni souhaitable ni possible. Mais il est nécessaire de mieux articuler les formations et l'information qui est donnée aux jeunes avec les débouchés existants ou à venir. C'est le deuxième pari du SPRO.
Notes
1. | ↑ | CIO, Missions locales, Pôle emploi, réseau Information jeunesse, Apec, Fongecif, Agefiph-Cap emploi, Maisons de l'emploi, Cités des métiers, services et opérateurs des collectivités, établissements d'enseignement et organismes de formation, chambres consulaires, associations… |
2. | ↑ | Aquitaine, Centre, Limousin, Pays de la Loire, Bretagne, Rhône-Alpes, Poitou-Charentes, Auvergne. |