L' Afpa entame l'“acte II" de son plan de refondation

Inffo formation n° 865- 1er-14 octobre 2014 - Benjamin d'Alguerre - Knock Billy

Par - Le 01 novembre 2014.

Si les résultats financiers
de l'Afpa demeurent encore
déficitaires, les progrès
constatés depuis la reprise
en main de l'opérateur en
2012 alors que ce dernier
était au bord de la faillite,
ont convaincu ses dirigeants
de lancer l'“acte II" du plan
de refondation qui devrait
engager l'Association
nationale pour la formation
des adultes jusqu'en 2020.

Le retour à un excédent brut
d'exploitation positif, ce ne
sera pas encore pour cette an
née à l'Afpa, qui devrait termi
ner 2014 avec un déficit de près
de 10
millions d'euros dans sa trésorerie.
Plus de deux ans après la nomination
d'Yves Barou à sa présidence et le lance
ment de son plan de refondation, l'As
sociation pour la formation des adultes
demeure dans le rouge.

Une commande publique
en stagnation


En septembre, le secrétaire général de
FO, Jean-Claude Mailly, s'était d'ail
leurs ému de la situation de l'opéra
teur au travers d'un courrier adressé à
François Rebsamen.
“Les perspectives de
croissance que nous faisions voici deux
ans ne sont pas allées aussi loin que nous
l'espérions"
, reconnaissait Yves Barou le
16
octobre, à l'occasion de la présenta
tion à la presse de l'Acte
II du plan de
refondation.

En raison, notamment, d'une com
mande publique en stagnation. Ainsi,
si le plan des “30
000 formations d'ur
gence" a été un succès pour l'Associa
tion, le plan “100
000" qui devait le
compléter rencontre davantage de dif
ficultés à monter en puissance, du fait
de la situation des comptes publics.
“Mais il faut voir d'où nous partions
, a
relativisé Yves Barou
:
92
millions de
déficit en 2011
; 50
millions l'année sui
vante
; 37
millions en 2013 et 10
mil
lions cette année."

Le gel des salaires est prolongé

Optimiste, le président de l'opérateur
table sur le retour à un excédent posi
tif en 2015. Dans un contexte toujours
marqué par le non-renouvellement de
près de 60
% des départs à la retraite
et par un gel des salaires qui persistera.
Entre 2003 et 2013, l'Afpa a perdu
près de 3
000
collaborateurs, dont 850
ces deux dernières années au titre des
départs non remplacés.

“Alors que le nombre de salariés a diminué
pour tourner autour de 7
500
aujourd'hui,
le poids des personnels hiérarchiques, lui,
est demeuré stable et s'élève à près de 1
000
personnes"
, estime François Duval, délé
gué syndical central Sud-FPA.
“Avant de
maintenir le gel des salaires des employés,
il faudrait commencer par réduire ce poids
hiérarchique qui pèse sur les finances de
l'Afpa",
revendique-t-il.

Les 230 millions nécessaires

Mais si le déficit de l'opérateur se
comble petit à petit, l'Afpa poursuit la
renégociation de son financement avec
l'État afin d'obtenir les 230
millions
nécessaires à l'établissement d'un nou
veau
business-plan
. 160
millions ont
déjà été versés.

Demeure aussi le contentieux autour
du patrimoine immobilier de l'Associa
tion −
propriété de l'État aujourd'hui,
avant transfert aux Régions en 2015
que l'Afpa souhaiterait voir revenir
dans son giron, ne serait-ce que pour
pouvoir l'engager auprès des banques.
“Sans patrimoine à engager, les banques
continuent de nous prêter à un taux de
4
%"
, déplore Yves Barou.

Arme anti-chômage

Le président de l'Afpa ne souhaite pas
pour autant rester focalisé sur les seuls
résultats financiers.
“Il y a aussi le bilan
d'utilité sociale de l'Afpa. Le taux de re
tour à l'emploi de nos stagiaires six mois
après leur formation a dépassé les 60
%
malgré la dégradation de la conjoncture
économique. L'Afpa, c'est une arme anti-
chômage
!"

L'occasion d'entamer ce deuxième acte
de la refondation qui engagera l'opé
rateur jusqu'en 2020. Après avoir dé
poussiéré son offre de formation grâce
au numérique et à la création de par
cours modularisés en conformité avec
les modalités du compte personnel de
formation, l'opérateur a imaginé un
nouveau plan de bataille qui anticipe
d'ores et déjà la future réforme territo
riale, en réorganisant l'Afpa en 13
di
rections régionales à l'horizon 2018.
Et en remodelant son maillage dans les
territoires autour de 30
centres straté
giques nationaux –
“qui seraient pro
priétés de l'Afpa"
, espère Yves Barou

et de 70
centres territoriaux.

Formateurs mobiles

À quoi s'adjoindrait une recrudes
cence des formateurs mobiles (180
au
jourd'hui, leur nombre devrait évoluer
à 300
en 2018) chargés de dispenser
leur expertise de façon souple et ra
pide
:
“Aller vers les stagiaires fait partie
de l'historique de la maison..."

Une réorganisation qui s'accompa
gnera d'une
“révolution numérique"
de sa stratégie pédagogique, misant
notamment sur les serious games et les
simulateurs de gestes professionnels
qui se traduira par la mise en ligne,
d'ici l'été 2015, d'une plateforme
francophone (conçue en collabora
tion avec la Belgique) accueillant une
cinquantaine de “jeux sérieux" (
smart
experiencing games
), ainsi que de divers
services dématérialisés concernant
l'orientation et l'information sur les
métiers. Ce renouveau pédagogique
s'accompagnera d'une modernisation
des métiers accessibles par le biais des
formations Afpa –
une filière “res
sources humaines" est à l'étude
– que
l'Association souhaite co-construire
avec les Conseils régionaux.

Viser le marché des entreprises

Autre changement de cap
: si l'Afpa
n'envisage pas de réduire ses efforts de
formation en direction des demandeurs
d'emploi –
estimant même qu'elle
pourrait en accueillir 10
000
de plus
chaque année
– elle n'en espère pas
moins se positionner sur le marché
des entreprises, considéré comme un
débouché d'avenir.

Une programmation
réévaluée


Elle espère toucher ce nouveau marché
par le biais du CPF dont chaque sala
rié disposera au 1
er
janvier
2015.
“La
production de l'offre de formation suivra
au plus près les besoins des entreprises
avec une programmation très réactive
et particulièrement réévaluée"
, explique
Yves Barou.

Afpa Acte II
: le processus est engagé.
Il devrait faire l'objet d'une feuille de
route portant jusqu'à 2017 qui devrait
être finalisée au premier trimestre 2015.

Benjamin d'Alguerre

QUESTIONS À CHRISTIAN FILLIOT, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL CGT AFPA

“Nous devrons nous inscrire dans une logique de cofinancement"

Le président de l'Afpa a parlé
de “formateurs mobiles". Que
recouvre ce concept
?


C'est un concept hybride. Il s'agirait d'avoir,
aux côtés des formateurs sédentaires et
de ceux dits itinérants (qui remplacent, sur
des périodes généralement assez courtes,
d'autres formateurs en congés, en formation
ou indisponibles), des formateurs du même
secteur sur un même lieu, ou sur un nombre
de lieux plus restreint. Ainsi, ceux-ci,
lorsqu'il y aurait besoin de formateurs,
pourraient se déplacer pour assurer les
formations.
Avec le système d'appels d'offres, les
formateurs doivent être agiles et se déplacer,
afin d'assurer les actions de formation quels
que soient les lieux.

Parler de l'offre de “services
dématérialisés" concernant
l'orientation signifie-t-il le retour des
activités d'orientation au sein de
l'Afpa
?


Il ne s'agit pas de reconstituer l'activité
d'orientation, qui a été confiée à Pôle
emploi, mais de faire le constat que
nombre de stagiaires abandonnent
le parcours de formation parce que,
notamment, ils ont pu être mal conseillés
ou se sont engagés dans une formation
inadaptée à leur projet professionnel.
Parler d'offre de services dématérialisés
concernant l'orientation n'est pas
suffisant. Il faut permettre véritablement
à des personnes ayant des projets de
transition professionnelle et étant dans
l'expectative entre différents métiers, par
exemple, de pouvoir visiter des plateaux
techniques, afin de se faire une idée exacte
du métier auquel elles aspirent. Il faut
continuer à accompagner les stagiaires,
même pendant leur formation.

Serez-vous prêts pour proposer dès
janvier 2015 des formations dans le
cadre du CPF ?


Oui, nous avons une offre à proposer.
Nous disposons de modules adaptés au
compte personnel de formation.
Cependant, notre offre sur 120 ou 150
heures
est limitée. Pour avoir des formations
visant une reconnaissance par certification,
nous devrons plutôt nous inscrire dans
une logique de cofinancement adossant le
CPF à des financements complémentaires
(Opca,Régions, etc.). Il y a donc une
ingénierie financière à mettre en place.

Propos recueillis par Knock Billy