Acte I : les années 1970

Un texte d'avant-garde

Par - Le 01 décembre 2010.

De nombreuses déclarations de satisfaction saluent la signature de l'accord du 9 juillet 1970. Côté patronal, les réactions apparaissent sans réserve. Les syndicats de salariés sont plus partagés. Si Force ouvrière est enthousiaste, la CFTC se réjouit surtout du renforcement du paritarisme et du choix de la voie contractuelle. La CGT voit dans l'accord une “solution partielle, mais substantielle". La CFDT est la plus réservée, mais estime que si des restrictions subsistent, l'accès à la formation est ouvert aux salariés. Enfin, la CGC n'est totalement satisfaite que lorsqu'un avenant définit un accès spécifique des cadres et de la maîtrise à la formation (cf.encadré).

Le CNPF (Conseil national du patronat français, devenu Medef en 1998) se félicite d'avoir “permis une fois de plus aux partenaires sociaux d'élaborer en commun des solutions concrètes d'une portée considérable, qui placent la France, dans ce domaine, à l'avant-garde de tous les pays industriels". Il rappelle “qu'en offrant aux salariés les meilleures chances de promotion personnelle et sociale, l'accord du 9 juillet 1970 met l'accent sur une finalité essentielle de la production et des échanges : la promotion des hommes qui y travaillent". (Notes et Arguments n° 15, décembre 1970). Le syndicat patronal déclare au Figaro (édition du 10 juillet 1970) que “le nouveau cadre qui vient d'être défini pour la formation professionnelle constitue une anticipation sur notre avenir".

La CGPME (Confédération générale des petites et moyennes entreprises), de son côté, insiste sur “le sérieux des négociations paritaires relatives à la formation professionnelle qui ont abouti à la conclusion de l'accord". Elle “attache la plus haute importance aux actions de formation professionnelle que cet accord, qui concerne plus spécialement l'industrie, permettra d'entreprendre avec l'aide de l'État, actions dont on est en droit d'attendre la disparition des goulots d'étranglement en personnel qualifié et hautement qualifié dans certaines spécialités et un meilleur raccordement entre offres et demandes d'emploi. Il facilitera, par là même, une politique active de l'emploi et une amélioration de la compétitivité des entreprises". (Déclarations et communiqués des organisations signataires, 10 juillet 1970, Législation sociale n° 3 651).

Force ouvrière salue “un accord sans précédent, qui ouvrira à chaque salarié, ouvrier, employé ou cadre, qu'il soit manœuvre ou technicien, un droit à bénéficier d'un congé rémunéré pour lui permettre de se convertir ou d'assurer son perfectionnement professionnel continu". La confédération s'enorgueillit “d'avoir ainsi contribué efficacement à garantir un meilleur emploi aux travailleurs et travailleuses, condition indispensable au progrès social. C'est le fruit d'une action persévérante qu'ils doivent accueillir avec enthousiasme". (Communiqué de juillet 1970, Roger Louet). FO déclare au Monde (édition du 10 juillet 1970) que “rien d'aussi décisif n'avait été fait depuis 1936", et conclut : “Cet accord va être maintenant le point de départ de l'organisation de la formation professionnelle."

La CFTC, pour sa part, se réjouit que “des dispositions particulièrement importantes aient pu être fixées par voie contractuelle. Elle est sensible au fait que les commissions paritaires de l'emploi instituées par l'accord du 10 février 1969 sont renforcées dans leurs pouvoirs et leurs compétences, puisqu'il leur appartient de promouvoir la formation dans les branches professionnelles et de donner leur agrément à tout stage ou cours mis à la disposition des travailleurs". (Communiqué du 9 juillet 1970).

Pour la CGT, l'accord représente “un succès important pour les travailleurs. Il leur ouvre des droits jusqu'alors obstinément refusés par le patronat et leur crée des possibilités nouvelles de défendre plus efficacement leurs intérêts. Plusieurs des problèmes considérés comme essentiels par la CGT et sur lesquels sa délégation a axé son activité y trouvent une solution partielle, mais substantielle". (Déclaration d'Henri Krasucki, lors de la signature, le 9 juillet 1970).

La CFDT est la centrale qui affiche la satisfaction la plus modérée : “Le principe du droit à l'accès à la formation est reconnu à tous les salariés. Des clauses restrictives limitent l'application de ce principe, mais sans le dénaturer. Surtout, ce droit d'accès est affirmé sans distinction de catégories professionnelles." (Hebdomadaire CFDT Syndicalisme n° 1299, 9 juillet 1970). Elle confirme ce point de vue au Monde (édition du 10 juillet 1970) et le complète en soulignant qu'enfin les professions garantiront plus correctement la situation des apprentis par voie collective. Elle explique qu'elle signe essentiellement “pour être présente là où peuvent se recueillir des informations intéressantes et pour parvenir à mieux sensibiliser les travailleurs sur l'importance capitale de la formation et de la promotion professionnelles, notions insuffisamment développées jusqu'ici".

La CGC (devenue en 1981 la CFE-CGC), pour sa part, ne se déclare pleinement satisfaite que lorsque l'avenant du 30 avril 1971 à l'Ani du 9 juillet 1970 est conclu. Elle juge alors son “objectif atteint".

Précisant : “C'est un pas essentiel que nous avons franchi : c'est le premier accord national interprofessionnel prévoyant des dispositions communes à l'ensemble du personnel d'encadrement qui a vu le jour." _ Et elle ajoute : “C'est une grande satisfaction pour nous qui avons toujours affirmé la communauté d'intérêt de la maîtrise et des cadres." _ Elle se réjouit encore que “des dispositions permettent la participation des cadres et des agents de maîtrise à des fonctions d'enseignement, sans rupture du contrat de travail". (Le Creuset - La Voix des cadres du 8 mai 1971).