Entretien avec Pierre Ferracci, président du groupe Alpha

Par - Le 01 septembre 2012.

La voie de la négociation, pour savoir “se remettre en cause"

Le groupe multipartite sur la formation professionnelle, que vous avez présidé en 2008, avait proposé d'englober le plan de formation dans la négociation prévue sur la GPEC. Maintenez-vous cette proposition ?

Nous avions, sans doute, manqué une occasion, avec la loi de 2005 (obligation de négociation triennale sur la GPEC), d'y arrimer une négociation sur le plan de formation. Car négocier sur la GPEC, en liaison avec la stratégie de l'entreprise et sa stratégie RH, sans se demander ce que devient le plan de formation, moyen essentiel de la montée en compétences des salariés, appauvrit le dispositif.
C'est une réalité que, dans bien des cas, les organisations syndicales ne se sont pas beaucoup mobilisées dans le cadre de la négociation sur la GPEC. Cette dernière ayant toujours été assimilée à un préalable pour une restructuration ou un PSE. Alors qu'elle a plutôt pour vocation de préparer le développement des compétences, donc l'amélioration des qualifications des salariés et de la compétitivité de l'entreprise.
J'avais appelé de tous mes vœux que la loi évolue sur cet aspect et qu'au moins dans les entreprises de plus de 300 salariés, la discussion ou la négociation sur le plan soit concernée par la GPEC. Il est dommage que le législateur, au moment de la réforme de 2009, n'ait pas retenu notre proposition.

La “feuille de route" de la conférence sociale semble aller dans votre sens...

En effet, l'État appelle de ses vœux la formalisation des orientations qui nourrissent l'articulation entre le plan de formation et la GPEC. Cette feuille de route donnera à la GPEC ses lettres de noblesse et obligera les partenaires sociaux à se pencher davantage sur le contenu et la qualité du plan de formation. Ainsi, pourra-t-on déboucher sur des accords avec des obligations en termes de concertation et de négociation. Le message est clair : raccorder le plan de formation à la GPEC et que la négociation ait lieu tous les trois ans.
L'entreprise doit redevenir un lieu où les enjeux de formation soient traités avec davantage de dynamisme, d'enthousiasme et d'efficacité. Dans les PME, l'ancrage au niveau des territoires et des branches est important. Dans celles d'une certaine taille, la gestion des compétences des salariés, en particulier les plus fragiles, handicapés notamment par leur formation initiale, doit être suivie avec attention au travers du plan. Nous savons bien que les entreprises ne mobilisent pas spontanément des ressources pour ces publics.
Les entreprises devraient s'inspirer davantage des Régions, qui adoptent toutes leur CPRDFP à la suite de négociations entre les différents partenaires (Région, État, organisations syndicales, patronat).

Les DRH assurent déjà beaucoup de tâches. Les obliger à négocier sur le plan, ne serait-ce pas trop ?

Je suis favorable à la négociation sur tous les sujets essentiels à l'évolution de l'entreprise et des besoins en compétences des salariés. Mais, il faut leur simplifier la tâche en opérant des regroupements de négociations dont les sujets sont complémentaires. Ainsi, par exemple, d'une grande réflexion autour de l'emploi, de la GPEC et la formation.
Certes, l'information-consultation est utile, car elle permet aux représentants des salariés de faire entendre leur voix. Mais ses modalités sont désuètes au regard des enjeux soulevés par la formation au sein de l'entreprise. La négociation est une obligation supplémentaire pour les deux parties, qui doivent se remettre en cause. Ils doivent faire de la négociation sur le plan de formation un outil du dialogue social au sein de l'entreprise.

Comment les aider à étudier le plan de formation ?

Il n'est pas facile pour des salariés de discuter, même dans le cadre d'une information-consultation, de stratégie de l'entreprise, de ses besoins en compétences et de formation, mais précisément, des formations sont proposées aux membres des CE afin qu'ils soient mieux outillés. Les élus dans l'entreprise sont de plus en plus demandeurs de formations techniques.