Question à Maryse Dumas (CGT), membre du conseil d'orientation de l'Afpa

Par - Le 01 juin 2012.

“Il existe un avenir pour l'Afpa"

Que diriez-vous de la situation de l'Afpa aujourd'hui ?

La situation est très grave. L'Afpa a été déstabilisée en l'espace de quelques mois par sa mise en concurrence et par la privation de ses moyens, notamment ses psychologues, son patrimoine. S'y ajoute une pratique managériale qui a méprisé ses compétences, son personnel dévoué. Il y a eu de la part de ce management une négation des valeurs de l'Afpa et de ses salariés, pour servir le culte du chiffre.

Quel rôle joue le conseil d'orientation, mis en place l'été dernier, pour contrer cette situation ?

Le conseil d'orientation est composé de l'État, des syndicats, des organisations patronales et des Régions, ainsi que de personnalités qualifiées. Il définit les orientations stratégiques de l'Afpa. Par exemple, il dit de qui l'Afpa doit se rapprocher. C'est à partir de ces orientations que le conseil d'administration élabore le budget. Je dirai que nous sommes actuellement dans une sorte de course poursuite.

Après tâtonnements, le conseil d'orientation prend la mesure de son rôle et commence à le jouer. Cependant, le temps presse, l'Afpa rencontre beaucoup de difficultés liées et nous manquons de temps et de sérénité pour reprendre pied avec des perspectives offensives. Mais il y a un avenir pour l'Afpa ! Simplement, le conseil ne doit pas mettre trop de temps à produire ces orientations.

Quelles sont à votre sens les intentions de l'État ?

Je ne suis pas sûre qu'il ait une intention particulière. Il siège au conseil d'orientation, il prend la mesure de la situation et travaille pour l'améliorer. Plus que des intentions de l'État, il faut plutôt parler de la volonté politique. Dans la lettre de mission de Gérard Larcher, Nicolas Sarkozy n'avait pas dit un mot de l'Afpa. Nous avons dû rédiger une déclaration commune rappelant que l'association faisait partie du premier cercle du service public de l'emploi, pour que le sénateur l'évoque dans son rapport. Rappelons que l'ancien président de la République a réformé Pôle emploi dans l'impréparation et la rapidité totales, ce qui a fait des dégâts considérables. L'Afpa fait partie du lot et subit une logique politique qui consiste à dire que tout ce qui est public est à mettre à la poubelle. Selon moi, les intentions politiques étaient claires : faire disparaître l'Afpa. La direction est d'ailleurs dans cette logique, ce n'est pas un hasard si le personnel a été à ce point méprisé. J'espère qu'en appliquant les orientations du conseil, la direction fera la preuve qu'elle est capable d'évoluer. Pour le moment, les décisions sont gelées, mais ce qui a été décidé avant l'été continue à produire ses effets.

Cette situation n'était-elle pas paradoxale, l'ancien président ayant fait de la formation des demandeurs d'emploi un sujet central ?

Si, bien sûr. Le conseil d'orientation a mis en avant la position centrale de l'Afpa dans le service public de l'emploi. Le problème est de savoir ce qu'on veut offrir comme formations aux demandeurs d'emploi : des stages parking pour réduire les chiffres, ou des formations aboutissant à un emploi ?

Les partenariats sont-ils une solution pour sortir l'Afpa
de l'ornière ?


Oui, l'Afpa doit développer des partenariats avec Pôle emploi, le Cnam ou les Gréta, car elle peut jouer un rôle en matière d'information, d'orientation et d'accompagnement, dont elle peut devenir le pivot. L'Afpa peut faire franchir les étapes à ceux qui veulent, par exemple, passer d'un BEP à une licence. Elle a également des moyens concernant l'hébergement et la restauration, qu'elle peut partager. Et il est possible d'imaginer des partenariats avec les lycées professionnels pour partager du matériel, par exemple.

L'Afpa doit-elle rester nationale ?

Certains évoquent en effet l'équation 22 Régions = 22 Afpa.
Nous, nous plaidons pour un pilotage national avec une activité territoriale au travers de directions régionales.

Enfin, quel est l'enjeu du “paquet Almunia" ?

C'est un enjeu d'implantation et, surtout, un enjeu financier qui a à voir avec les SIEG. L'Afpa est entrée dans le champ concurrentiel, il est interdit à l'État ou aux Régions de favoriser l'Afpa lors des appels d'offres. Mais depuis décembre 2011, un élément nouveau est apparu avec le paquet Almunia : une partie des missions de l'association n'appartiendrait pas au domaine concurrentiel, ce qui permettrait le développement de coopération de service public. L'ARF dit que c'est possible, et nous le disons également. Seul l'État n'est pas de cet avis, arguant que c'est contraire au droit français. Pour régler la question, il suffirait de changer le droit, ce qui est toujours possible si les politiques en ont la volonté… Nous discutons actuellement de l'opportunité de demander à “l'Europe" de trancher la question. Le dossier pourrait évoluer maintenant, avec la nouvelle majorité.