La formation doit avoir un impact avéré pour augmenter son “seuil de crédibilité"

Par - Le 01 février 2014.

Quelle est la contribution de la formation professionnelle
à l'économie ? Jean-Hervé Lorenzi,
le président du Cercle des économistes, s'est attaché
à répondre à cette question lors de la conférence
inaugurale de l'Université. “C'est peut-être
un des thèmes les plus importants que notre pays
a à gérer. Depuis la crise financière de 2010, la
formation professionnelle s'inscrit dans un univers
de croissance limitée", a constaté ce professeur de
l'Université Paris-Dauphine.

Faible impact sur la rémunération...

Sans complaisance pour son auditoire composé
de professionnels de la formation, Jean-Hervé
Lorenzi a pointé le fait que cette dernière “ne
remplit pas le rôle qu'on pourrait espérer d'elle.
Le fait que des hommes et des femmes suivent
des stages de formation continue n'a pas un gros
impact sur leur rémunération. On s'aperçoit
qu'après une formation solide, un salarié ne va
voir sa rémunération augmenter que de 7 %", at-
il observé.

Tout en relevant “un biais". La formation professionnelle
s'adressant “aux gens bien situés
dans la hiérarchie, ils auraient obtenu leur augmentation
même sans bénéficier d'une formation
Si on considère que la formation ne s'adresse pas
aux moins qualifiés, et si elle ne se traduit pas
une augmentation, il est difficile de motiver les
salariés..." Et d'insister : à moins de débourser
30 000 euros pour un MBA, la formation
ne débouche guère sur des accroissements de
rémunération. Jean-Hervé Lorenzi a fait le
même constat pour ce qui concerne la mobilité
sociale.

... et sur les embauches

Quant à la question du sous-emploi, les études
internationales montrent le très faible impact
de la formation professionnelle, toujours selon
l'économiste. “En moyenne, le chômeur qui suit
une formation reste cinq jours de plus au chômage
que celui qui n'a pas suivi une formation. Mais
il reste 330 jours de plus en activité durant sa vie
professionnelle, toujours grâce à cette même formation",
a nuancé Jean-Hervé Lorenzi. Dans la
même veine lucide, ou pessimiste, l'universitaire
a fait remarquer que les femmes ne bénéficiaient
guère plus de la formation professionnelle, tant
en termes de rémunération que de progression
de carrière. Sans oublier les 150 00 jeunes qui
sortent du système scolaire dépourvus de qualification.

Et le CPF ?

Une lueur d'optimisme dans ce tableau des plus
sombres... la création du compte personnel de
formation ? “Le CPF constitue une avancée importante,
même si le montant de 150 heures est
très en dessous de ce qu'il faudrait faire, le seuil de
crédibilité n'est pas atteint. Ces chiffres sont assez
limités", a tempéré Jean-Hervé Lorenzi.

L'économiste a pourtant conclu son propos sur
une touche positive : “Nul doute que la vraie
question est celle du caractère obligatoire de la formation.
N'est-il pas temps d'inciter les entreprises à
former les salariés et ceux-ci à se prendre en charge,
plutôt que de les contraindre ?"