Jean-Michel

Pottier

Jean-Michel Pottier : “la clé d'un accès à la formation adapté aux besoins des TPE"

Pour Jean-Michel Pottier[[Gérant de la SARL Ariane sept
(une TPE de douze salariés du secteur textile publicitaire, située à Valenciennes),
Jean-Michel Pottier est président
de la commission formation
de la CGMPE.]], chef de file pour la CGPME de la prochaine négociation sur la formation, pas question de toucher à l'obligation légale de participation des employeurs à la formation – seule à même, selon lui, de garantir une mutualisation des fonds. Quant à la formation des plus en difficulté, la CGPME fait confiance à la procédure conventionnelle entre les différents acteurs de la formation.

Par - Le 15 octobre 2008.

Inffo Flash - L'accès à la formation des salariés des PME-TPE reste difficile. Quelles en sont les principales raisons ?

Jean-Michel Pottier - Il existe en effet de grandes disparités d'accès entre grandes entreprises et PME-TPE, pour un taux d'accès global de 40 % des salariés par an. Elles sont néanmoins difficiles à comptabiliser, car les TPE tendent à financer directement des formations. Les salariés de PME-TPE souffrent parfois d'un manque d'implication dans la formation. Leur niveau de formation initiale y est pour beaucoup. La pédagogie devrait être mieux adaptée à ces publics. Bien sûr, il y a un problème de disponibilité dans les petites équipes et un facteur financier, mais ce dernier n'est pas le plus déterminant. Ce qui importe, c'est que le chef d'entreprise ait un projet à partager avec ses salariés.

IF - Cependant, vous avez mis en garde contre la fin de l'obligation légale, qui signifierait “un désastre pour le financement de la formation dans les PME". Pourquoi ?

J.-M. P. - La contribution légale constitue la seule garantie de mutualisation pérenne des fonds destinés à financer les plans de formation. Que va-t-il arriver si l'on passe à des logiques conventionnelles, à un “patchwork" illisible, entreprise par entreprise, branche par branche ? Si l'on porte atteinte à l'obligation légale, c'est la disparition de l'accès au plan de formation pour les PME. Par ailleurs, qui contrôlera l'utilisation de ces fonds décidés par voie conventionnelle ? Les Opca, qui deviendraient à la fois conseils et gendarmes ?

IF - La lettre d'orientation suggère une mutualisation des fonds d'Opca de branche et interprofessionnels via le Fup, qui collecterait aussi le Cif au plan national...

J.-M. P. - Laissons le Fup continuer à s'occuper de la professionnalisation, comme il le fait actuellement. Le problème, c'est que le Fup peut donner prise à des tentatives de “siphonnage" – que l'on a déjà connues par le passé.

IF - Néanmoins, les pouvoirs publics apparaissent soucieux d'ouvrir davantage les fonds, dans une logique de sécurisation des parcours. Comment procéder alors ?

J.-M. P. - Il nous faut poursuivre dans la voie de l'expérimentation et de la contractualisation dans les territoires sur des projets bien identifiés entre les acteurs de la formation, les Opca, l'État, et les Régions. Le recours à des conférences des financeurs n'est d'ailleurs pas indispensable. Les fonds des Opca sont destinés à la professionnalisation, je suis contre un droit de tirage tous azimuts… Et s'il existe, comme l'a dit un de mes collègues syndicalistes, des “trous dans la raquette", c'est par défaut de cohérence des acteurs.

IF - Êtes-vous en faveur d'un seul Opca interprofessionnel ?
J.-M. P. - En garder deux ne me semble pas de trop. Il ne s'agit pas d'aller vers un guichet unique. Par ailleurs, je crois au principe immuable de la liberté de choix du chef d'entreprise. J'observe, pour le coup, que l'Agefos-PME est le seul Opca interprofessionnel à être géré de façon paritaire (patrons-salariés). Je suis contre l'uniformisation...

IF - Quel sens donner au concept de seuil minimum de collecte, en ce qui concerne la capacité de fournir des services de proximité aux PME-TPE ?

J.-M. P. - Il faut savoir ce que l'on attend des Opca. S'il s'agit de rendre des services de qualité au tissu des entreprises ancrées dans les territoires, à savoir les PME, il faut une surface financière suffisante. Le seuil de 50 millions d'euros me semble raisonnable pour assurer ce genre des services aux entreprises.

IF - L'accès au Dif est limité dans les PME. Une meilleure transférabilité du Dif ferait-elle progresser la situation ?

J.-M. P. - Avant d'encourager le Dif, la CGPME a la conviction qu'il faudrait d'abord généraliser l'entretien professionnel prévu par l'Ani de 2003, mais non couché dans la loi. Le développement du Dif est corollaire. Ce n'est pas facile, et en demandant cela, j'ai bien conscience de devoir balayer devant ma porte. Il faudrait que cette généralisation soit appuyée par les services déconcentrés de l'État en matière d'emploi et de formation. C'est la clé d'un accès à la formation adapté aux besoins de l'entreprise et de qualité.

IF - Justement, comment améliorer la qualité de l'offre destinée aux PME-TPE ?

J.-M. P. - Pour améliorer la qualité de la formation, il faut d'abord améliorer celle de la demande, puis faire confiance au marché, et ensuite penser à un processus de labellisation dont l'élaboration n'échapperait pas aux organismes de formation.

Propos recueillis par Renée David-Aeschlimann