Philippe
Maitreau
L'AMGVF souhaite que les villes participent aux politiques d'emploi.
En matière d'emploi, les collectivités locales jouent un rôle capital, en amont et sur le terrain de la prévention. Entretien avec Philippe Maitreau, adjoint de Jean-Marie Bockel (PS), maire de Mulhouse président du groupe de travail “Organisation territoriale de l'emploi" de l'Association des maires des grandes villes de France (AMGVF), et vice-président du Comité d'agglomération du pays Mulhousien.
Par Centre Inffo - Le 27 février 2008.
Inffo Flash - Êtes-vous optimiste pour le rôle des collectivités territoriales en matière d'emploi, après la pause annoncée dans le développement des Maisons de l'emploi et la loi du 31 janvier portant fusion de l'ANPE et du réseau des Assedic ?
Philippe Maitreau - Comme chacun sait, la compétence emploi est du ressort de l'État, mais, depuis janvier 2005, la loi de cohésion sociale a introduit une compétence des collectivités territoriales à travers, notamment, la présidence des Maisons de l'emploi. Le gel de leur développement a bien sûr nourri des inquiétudes, et fait craindre que leur budget soit transféré sur les coûts de la fusion Assedic-ANPE. Les craintes budgétaires sont maintenant passées, puisque 150 millions d'euros vont leur être consacrées en 2008.
Cela dit, l'AMGVF et l'AMF sont beaucoup intervenues pendant la discussion parlementaire sur la loi de fusion Assedic-ANPE, pour éviter le retour à une vision verticale de l'action pour l'emploi.
IF - Avez-vous le sentiment que vos interventions ont porté leurs fruits ?
Ph. M. - Disons que nous avons été entendus, peut-être pas compris. La gouvernance du nouvel organisme ne pose pas une articulation claire entre la nouvelle institution et les Maisons de l'emploi, même si celles-ci vont être représentées au Conseil national de l'emploi. _ Ce que nous souhaitons, c'est une véritable co-construction de ces politiques qui vont se déployer sur des territoires de natures très variées. Or, les collectivités territoriales ne sont pas représentées par catégories au conseil d'administration de la nouvelle instance fusionnée et ne seront finalement pas consultées lors de la convention pluriannuelle passée entre cette instance et l'État en régions. De ce point de vue, on peut dire qu'on assiste à un mouvement de recentralisation. En juillet 2007, les villes étaient entrées avec les Régions au CA de l'ANPE. Avec la fusion, c'est un seul représentant pour toutes les collectivités.
IF - Cette fusion a été préconisée pour simplifier les procédures de recherche d'emploi et d'indemnisation. L'intervention des collectivités locales est-elle de nature à simplifier ces procédures ?
Ph. M. - Certes, si l'État balaie devant sa porte, les collectivités territoriales doivent le faire aussi. Les conseils de développement, les comités de bassin d'emploi, le réseau Cap emploi... Leurs initiatives se chevauchent souvent. Nous avons des Plie, des Missions locales, dont 60 % des jeunes qui les fréquentent ne sont pas dans le fichier ANPE, des Maisons de l'emploi. Les actions sont parfois redondantes. Avec l'ensemble des financements alloués à l'action territoriale, nous pouvons avancer dans le sens d'une rationalisation de l'action territoriale. Encore faut-il avancer de concert avec le SPE. L'AMGVF va rencontrer prochainement Christian Charpy, directeur général de l'ANPE.
IF - Quelle démarche particulière ont les collectivités territoriales en matière de résorption du chômage ?
Ph. M. - Quand la politique de l'État porte sur des “stocks", c'est-à-dire des personnes déjà sans emploi, les collectivités agissent sur les “flux", en soutenant en amont les familles en difficulté, par l'action sociale dans les quartiers. C'est une forme d'action plus préventive que curative.
Cela dit, nos trois objectifs pour l'emploi proprement dit sont la sauvegarde de l'emploi par le moyen d'une GPEC territoriale, la création de nouvelles activités pourvoyeuses d'emploi et l'accompagnement vers l'emploi des plus en difficulté.
IF - Qu'en est-il de la politique de création d'activités, notamment à travers les pôles de compétitivité ?
Ph. M. - Si je prends l'exemple de Mulhouse, ma ville, nous avons trois pôles de compétitivité : “Véhicules du futur", “Innovations thérapeutiques" et “Fibres naturelles". Ces initiatives de haute qualité technologique sont néanmoins très lourdes à gérer, tant au plan financier que administratif.
Aussi avons-nous pris l'initiative de créer des pôles de compétences, dont “Rhénatic", en matière de nouvelles technologies, qui regroupe plus de cent PME de dix à cinquante salariés soit au total 2 500 salariés. L'action pour l'emploi y est plus visible.
Propos recueillis par Renée David-Aeschlimann