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Par - Le 12 mai 2016.

Deux ans après la réforme de la formation professionnelle, les pratiques des entreprises évoluent et s'adaptent. La réforme semble s'ancrer dans les mœurs, même si des efforts supplémentaires sont encore à fournir. Quant au numérique, annoncé un temps comme une panacée pour compenser la disparition du « 0,9% plan de formation », il n'apparaît aujourd'hui plus comme une solution miracle, mais comme un dispositif parmi d'autres, dont l'investissement initial demeure encore coûteux. C'est ce que révèle l'enquête « Les futurs de la formation : évolution ou révolution », menée par les étudiants du cursus RH de l'IGS et les équipes de recherche du Laboratoire d'innovation sociale et de performance économique (Lispe) dévoilée le 10 mai, au cours de la troisième « Nuit des RH » organisée par le groupe IGS.

Menée auprès de 291 responsables formation et de 246 salariés, l'enquête révèle que, deux ans après le vote de la loi du 5 mars 2014, la réforme ne fait pas encore l'unanimité. 47% jugent ainsi que celle-ci entraîne un repositionnement stratégique de la fonction formation dans l'entreprise. Pour 39% des répondants, elle est synonyme de complexification financière et 27% estiment qu'elle induit un renforcement administratif de l'environnement formatif. Pourtant, les entreprises s'adaptent. Ainsi, 40% de celles interrogées affirment avoir augmenté le nombre de formations certifiantes proposées à leurs salariés ces deux dernières années. Et 46% indiquent que leur budget formation est demeuré stable malgré la réduction de la contribution mutualisée obligatoire. Dans le même temps, du côté des salariés, la réforme fait aussi son chemin… plutôt lentement : si 94% des sondés estiment savoir ce qu'est le compte personnel de formation (CPF), ils ne sont que 55% à avoir ouvert leurs droits par le biais du site moncompteformation.gouv.fr et seuls 43% ont crédité des heures dessus.

Le numérique peine encore à séduire massivement

Quant au numérique, il tarde à faire sa révolution annoncée… Près de 33% des responsables formation interrogés avouent ne jamais avoir eu recours aux formations à distance et 39% ne jamais avoir mis en place de dispositifs de type blended-learning. Interrogés sur les raisons de cette réticence, ils indiquent être rebutés par le coût de ces technologies (notamment l'achat de licences utilisateurs), ne pas disposer des compétences digitales nécessaires à la création de modules personnalisés ou buter sur la conciliation des temps entre temps de formation et temps de travail. Pour certaines entreprises, enfin, c'est surtout l'absence de culture numérique chez leurs salariés qui coince : dans l'industrie, notamment, où certains collaborateurs ne disposent ni d'adresses mails, ni d'ordinateurs sur leurs postes de travail.

Recul ou stagnation de la formation dans les PME

Face à la réforme, quatre types d'évolutions se dessinent en fonction des tailles des entreprises. 22% des sondées, plutôt de petite taille (PME ou petites ETI) semblent ne pas s'être saisies de la réforme et ne pas se sentir à l'aise avec le numérique. Celles-ci continuent donc à investir essentiellement dans le présentiel et visent peu les formations certifiantes. Dans les grandes entreprises (23% de l'échantillon), la réforme est, a contrario, entrée dans les mœurs et, depuis deux ans, celles-ci diversifient massivement leurs modes pédagogiques, en misant notamment sur les outils numériques à distance. Les ETI (35% du panel), elles, semblent miser sur un redéploiement des formations présentielles selon de nouvelles méthodes pédagogiques, particulièrement le numérique ou les apprentissages en situation de travail. Avec cependant le constat d'un recul du taux d'accès à la formation au sein de ces entreprises. Enfin, pour les plus petites des entreprises interrogées (20% du panel), le recul des activités de formation est patent, qu'elle soit présentielle ou digitale. A cette situation s'ajoute la frilosité des responsables formation qui sentent leur poste menacé par les conséquences de la réforme, d'autant que leurs fonctions apparaissent comme éloignées de la direction générale où se planifient les orientations stratégiques de l'entreprise.