Conclusion d'un contrat d'apprentissage par un étranger mineur : délivrance de plein droit de l'autorisation de travail

Comment doit être appliqué l'article L5221-5 du Code du travail prévoyant que l'autorisation de travail est accordée de plein droit, pour la conclusion d'un contrat d'apprentissage ou de professionnalisation à durée déterminée, à l'étranger mineur isolé pris en charge par l'aide sociale à l'enfance ?

Par - Le 23 février 2017.

Telle est la question que tranche le Conseil d'Etat, en formation de référé, dans une ordonnance du 15 février 2017, publiée au recueil Lebon.

L'article L5221-5 du Code du travail prévoit qu'un étranger autorisé à séjourner en France ne peut exercer une activité professionnelle salariée en France sans avoir obtenu au préalable d'autorisation de travail. Ce même texte prévoit cependant que cette autorisation de travail est accordée de droit à l'étranger qui est autorisé à séjourner en France pour la conclusion d'un contrat d'apprentissage ou de professionnalisation à durée déterminée.

Pour l'administration, cette disposition devait se combiner avec celle de l'article l'article L311-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (Ceseda) qui impose à tout étranger âgé de plus de 18 ans qui souhaite séjourner en France pour une durée supérieure à 3 mois d'être titulaire d'un titre de séjour. Elle en concluait qu'étant mineur, le demandeur ne pouvait bénéficier du principe de délivrance de plein droit de l'autorisation de travail pour conclure un contrat d'apprentissage puisqu'il ne pouvait demander à bénéficier d'un titre de séjour avant d'avoir atteint sa majorité.

Cette position est censurée par les juges administratifs comme portant « une atteinte grave et manifestement illégale à l'intérêt supérieur de l'enfant et à l'exigence constitutionnelle d'égal accès à l'instruction ».

Les magistrats rappellent que si le l° de l'article L311-3 du Ceseda détermine les conditions dans lesquelles les étrangers âgés de 16 à 18 ans qui déclarent vouloir exercer une activité professionnelle reçoivent, de plein droit, un titre de séjour, ces dispositions ne couvrent pas le cas des mineurs étrangers de cet âge confiés au service de l'aide sociale à l'enfance.

Il s'ensuit que, pour bénéficier de l'application des dispositions de l'article L5221-5 du Code du travail, les mineurs étrangers âgés de 16 à 18 ans confiés au service de l'aide sociale à l'enfance doivent être regardés comme autorisés à séjourner en France lorsqu'ils sollicitent, pour la conclusion d'un contrat d'apprentissage ou de professionnalisation à durée déterminée, une autorisation de travail.

Par ailleurs, le 2 ° de l'article L313-15 du Ceseda prévoit que, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, la carte de séjour portant la mention "salarié" ou la mention "travailleur temporaire" peut être délivrée, à titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger qui a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de 16 ans et l'âge de 18 ans et qui justifie suivre depuis au moins 6 mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le suivi par l'intéressé d'une formation avant sa majorité était donc, précise les juges, au surplus, l'une des conditions de la délivrance ultérieure d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L313-15 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Enfin, cette autorisation doit être délivrée de plein droit au mineur, sans que puissent y faire obstacle les dispositions de l'article R5221-22 du même Code, qui identifient certains cas dans lesquels la situation de l'emploi ne peut être opposée aux étrangers pris en charge par le service de l'aide sociale à l'enfance qui sollicitent une autorisation de travail. Les dispositions de l'article R5221-22 du Code du travail n'ont en effet ni pour objet, ni pour effet de déroger à la règle selon laquelle l'autorisation de travail doit être délivrée de plein droit à un mineur pour la conclusion d'un contrat d'apprentissage ou de professionnalisation à durée déterminée.

Ordonnance du Conseil d'État, Juge des référés, n° 407355, publiée au recueil Lebon

Pour aller plus loin, voir notre article (accès abonné) du 21 février 2017.

Textes visés :
Art. L5221-5 du Code du travail
Art. R5221-22 du Code du travail
Art. L311-1 du Cde de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
Art. L313-15 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.