Départ du “Tour de France de l'insertion dans l'industrie"

Par - Le 16 avril 2012.

Après deux ans d'activité loin des médias, le fonds A2I, créé fin 2009 par l'UIMM, a lancé le 3 avril une opération de communication au long cours sous la forme d'un “Tour de France de l'insertion dans l'industrie". Deux ans au cours desquels ce fonds va investir 8,4 millions pour soutenir 81 projets de terrain, au bénéfice de 11 000 personnes. Soit, selon Anne Lauvergeon, présidente du fonds, de quoi faire d'A2I “le premier opérateur privé en matière d'insertion professionnelle".

Pourquoi l'UIMM a-t-elle créé ce fonds A2I ? “Nous sommes dans une situation totalement paradoxale, avec un contexte de chômage élevé et une pénurie de main-d'œuvre, qualifiée ou non", explique l'ex-présidente d'Areva. Soulignant les difficultés de recrutement des entreprises industrielles et, “plus encore, de leurs fournisseurs et sous-traitants", Anne Lauvergeon décrit “l'absurdité" d'une situation où “le défaut de compétences sur le marché du travail fait que certaines entreprises sont obligées de refuser des commandes, voire de délocaliser. Des entreprises ne parviennent pas à recruter à la hauteur de leurs besoins sur des postes de soudeur, tuyauteur, chaudronnier, etc., alors que ce sont des métiers bien payés et qui réclament des qualifications, poursuit-elle. Disposer d'une main-d'œuvre formée et qualifiée à leurs besoins représente un enjeu totalement crucial pour les entreprises industrielles, à la fois pour leur avenir et leur développement". Développant une problématique de la “compétitivité des compétences", Anne Lauvergeon décrit un “enjeu profond et grandissant (…), à la croisée de deux enjeux majeurs pour le pays : l'emploi et l'industrie".

La “compétitivité des compétences"

Aussi et dans ces conditions, “lutter contre un chômage massif qui a des conséquences économiques et sociales ravageuses" n'est ni une “bonne action" ni un “alibi", mais une “nécessité sociale, économique et industrielle, insiste-t-elle. Notre ambition est très grande :
bâtir pour les populations marginalisées des parcours vers l'emploi, établir des passerelles entre les structures d'insertion par l'activité économique, les organismes de formation en alternance, les entreprises industrielles et contribuer à résoudre les difficultés de recrutement". Pour ce faire, le fonds soutient aussi bien des dispositifs déjà bien ancrés dans le paysage (alternance) que des solutions moins connues étant apparues pertinentes, à l'instar des “écoles de production" (voir L'Inffo n° 808, p. 8), sur lesquelles Anne Lauvergeon ne tarit pas d'éloges. Deux ans après le lancement d'A2I, Denis Boissard, directeur général du fonds, dresse un premier bilan quantitatif : “Sur les 11 000 personnes concernées, 745 jeunes ou adultes ont intégré un sas de préqualification et de découverte des métiers industriels, 410 un parcours de formation qualifiante en alternance et 751 ont accédé à un emploi".

Les grandes typologies de l'exclusion

Alors que la première étape du “Tour de France pour l'insertion dans l'industrie" avait lieu dans les locaux parisiens d'Ares (Association pour la réinsertion économique et sociale), son directeur général
Thibaut Guilluy témoigne : “L'arrivée d'un fonds comme A2I dans le monde de l'insertion est quelque chose d'absolument essentiel pour que nous puissions mettre en œuvre nos projets. Nous avons besoin de ces aides au démarrage pour faire de l'innovation et apporter la plus-value sociale qui est la nôtre."

Alors que le projet soutenu par A2I doit permettre de renforcer le dispositif d'accompagnement dont bénéficient plus de 350 salariés d'Ares, son responsable précise : “Avec le fonds A2I, nous avons décidé de concentrer toutes nos actions sur la formation professionnelle et les passerelles vers le monde de l'entreprise." Objectif d'Ares : “Permettre à des personnes qui connaissent des difficultés particulières d'accès à l'emploi de pouvoir remettre le pied à l'étrier par le travail." Passant en moyenne douze à dix-huit mois au sein de l'entreprise d'insertion, les salariés n'ont pas vocation à y rester, mais à s'en servir comme d'un “tremplin", explique Thibaut Guilluy. Du marketing publi-promotionnel au BTP en passant par la valorisation de déchets ou le lavage sans eau de véhicules, Ares présente “des activités assez diversifiées pour pouvoir construire les parcours en fonction des motivations, des compétences et des capacités" de chacun, précise-t-il. À l'insertion par le travail s'ajoute un “accompagnement social et professionnel", assuré par des chargés d'insertion qui suivent de 20 à 25 salariés. “Quand les problèmes sociaux s'accumulent − santé, logement, problèmes administratifs, etc. −, ces boulets au pied rendent difficile toute mise en perspective, commente le directeur général d'Ares. Mais quand les personnes retrouvent une certaine assise personnelle, alors nous pouvons évoquer leur projet professionnel." Ce qui, grâce au soutien du fonds A2I et en lien avec le GIM [ 1 ]Groupe des industries métallurgiques de la région parisienne. et l'Aforp [ 2 ]Association pour la formation et le perfectionnement du personnel des entreprises de la région parisienne., passe par “des visites d'entreprise et des rencontres métier pour faire découvrir le champ des possibles [aux] salariés" d'Ares. Vient ensuite “la question de la formation, très importante, notamment dans nos structures où le manque de qualification est un véritable frein à l'accès au travail, avec 9 personnes sur 10 qui ont un niveau équivalent ou inférieur au CAP", indique Thibaut Guilluy. Dernière étape soulignée par le directeur général de l'association : “La lutte contre l'exclusion ne peut se faire sans un partenariat fort avec le monde de l'entreprise. Il faut prendre conscience que les salariés qui font vivre efficacement nos associations sont porteurs de compétences, de motivation et de talents." Et de conclure sur ce qui pourrait bien être la principale justification du Tour de France entamé ce 3 avril : “Il faut vraiment sortir des poncifs, des a priori et des préjugés qui masquent les talents de nos salariés."
Les grandes typologies de l'exclusion suivantes seront abordées lors des prochaines étapes du Tour de France de l'insertion dans l'industrie : étudiants en décrochage de l'enseignement supérieur (à Brest, le 25 avril), décrocheurs scolaires (à Lille, le 16 mai), femmes dans l'industrie (à Cluses, le 31 mai), chômeurs de longue durée (à Bagnols-sur-Cèze, le 13 juin), accès à l'emploi des personnes handicapées en milieu ordinaire de travail (à Angers, le 4 juillet).

Notes   [ + ]

1. Groupe des industries métallurgiques de la région parisienne.
2. Association pour la formation et le perfectionnement du personnel des entreprises de la région parisienne.